Défaillances d’entreprises (2/5) : des promoteurs et CMistes emportés partout en France

La crise de la demande qui sévit encore a rayé de la carte certains opérateurs du logement collectif et individuel. D’autres sont menacés de disparition. Tour d’horizon.

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Le siège du Groupe Réalités à Saint-Herblain, à l’ouest de Nantes
L'ancien siège du groupe Réalités, promoteur national en redressement judiciaire.

La reprise espérée par les promoteurs immobiliers ne vient pas : le nombre de ventes de logements neufs a encore baissé au premier trimestre et le timide retour des accédants est insuffisant pour pallier le retrait des investisseurs locatifs qui ne sont plus stimulés par le Pinel. A l’échelle nationale, le volume de leurs réservations a chuté d’environ 50% depuis le troisième trimestre 2022, marqué par le début de la rapide hausse des taux d’intérêt qui a refroidi les clients institutionnels et désolvabilisé les particuliers.

Dans ce sombre tableau, impossible de manquer Réalités, placé en redressement judiciaire en février dernier. Le 19e promoteur national en 2023 comptait alors 60 programmes en chantier qui n’étaient pas touchés, soit 3200 logements.

Diversifié dans l’exploitation de résidences gérées mais aussi la restauration, la santé ou encore le sponsoring sportif, le groupe coté a été l’un des premiers opérateurs à annoncer un plan social sur fond de crise de la demande. C’était début 2024. D’autres décisions douloureuses ont suivi pour encore réduire la masse salariale. En deux ans et demi, entre vagues de suppressions de postes et ventes de filiales éloignées de son coeur de métier pour renflouer ses caisses, Réalités est passé de plus de 1000 salariés à moins d’une centaine.

Un autre habitué des communications financières est menacé de disparition. Il s’agit de Capelli, dont les actions sont suspendues de cotation sur Euronext Paris depuis septembre 2024.

Positionné dans le logement libre, intermédiaire, social et géré en Ile-de-France, sur la Côte d’Azur, dans la métropole lyonnaise ou encore au Luxembourg -un marché étranger qui n’échappe pas à la crise-, Capelli a reconnu en 2024 son erreur d’avoir participé à la surenchère foncière à l’époque des taux bas. En témoigne sa charge financière de 30,7M€, sur l’exercice 2023 clos avec trois mois de retard en mars 2024, « liée aux très forts investissements réalisés en n-2 pour l’achat de foncier sur notamment deux opérations d’envergure », expliquait alors le groupe.

Son dernier communiqué, en mars dernier, faisait état de son placement « sous la protection du tribunal de commerce de Paris ». Capelli comptait 8 chantiers en cours, tous en co-promotion. 

Un groupe poitevin sauve un promoteur toulousain

D’autres opérateurs établis dans plusieurs régions de métropole sont en difficulté. 

En mars dernier, P2i a acté l’abandon de 56 projets, liquidés par le tribunal de commerce d’Angers. Ils étaient situés en Loire-Atlantique, Charente-Maritime, dans le Lot-et-Garonne ou encore le Loiret. Loin de son fief du Maine-et-Loire sur lequel il tente de se recentrer pour rebondir.

En redressement judiciaire depuis novembre 2024, l’angevin a emprunté des millions d’euros via les plates-formes de crowdfunding immobilier pour financer ses programmes de 2016 à 2024. Les créanciers, essentiellement des particuliers, risquent de ne pas toucher leurs intérêts ni de revoir leur capital investi.

Toujours à Angers, le promoteur et constructeur de maisons individuelles Carréneuf a, lui, été liquidé fin 2023

Citons encore Promocéan qui vient d’être placé en redressement judiciaire. Le promoteur de La Baule (Loire-Atlantique) avait pourtant réduit la voilure en passant de 3 à 1 agence et de 24 à 7 salariés, mais a laissé des plumes dans une affaire compliquée à Saint-Nazaire (Loire-Atlantique). Ses 19 programmes en cours se situent dans l’Ouest et dans les Alpes.

Dans la région de Toulouse, la holding d’AFC Promotion, fondée par l’ancienne présidente de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI) Alexandra François-Cuxac, a été placée en redressement judiciaire en octobre 2024, tandis que Carrère Promotion vient d’être sauvé de la banqueroute par le groupe poitevin Pierreval, dont l’activité de foncière lui permet de générer du cash malgré la baisse des ventes de logements. Et de reprendre des opérateurs en difficulté…

Frédéric Carrère, le dirigeant de la société rachetée, et son équipe de douze développeurs auront la mission de conquérir de nouveaux territoires avec l’ambition de produire 600 à 700 logements à moyen terme.

Les CMistes trinquent aussi

Bousculés depuis fin 2021, soit un an avant les promoteurs, en raison de la hausse des coûts de construction post-Covid, les CMistes trinquent aussi. La liquidation en 2022 de Geoxia, un des poids lourds de la construction de maisons individuelles, a sonné l’alerte pour un secteur qui a vu son volume de ventes chuter, de 139 600 unités en 2021 à 50 800 l’an dernier. 

Le rhodanien AST Groupe, qui avait passé le cap des 1000 ventes en 2007 puis s’était diversifié dans la promotion et l’aménagement, a été en partie emporté par la crise de la demande qui sévit encore. Le normand Hexaom, leader national de la construction de maisons individuelles, et son partenaire breton Trécobat ont repris fin 2024 ses activités de studios de jardin, maisons à ossature bois, charpentes et menuiseries, mais pas la promotion ni l’aménagement.

En Bretagne, les sociétés Maisons Rennaises et E-Loft ont été liquidées en 2023 ; le constructeur haut-de-gamme Woodz l’a été en 2024. Même sort pour Maisons Kervran, qui pouvait réaliser jusqu’à 250 chantiers par an.

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