Contrairement à la FNTP et à la FFB, la Capeb n’observe pas de dégradation des délais de paiement des collectivités ces derniers mois. « Nous n’avons pas d’alerte majeure en ce sens. Mais le problème ancien des "délais cachés" existe toujours, constate le président de la confédération, Jean-Christophe Repon.
De plus, le marché se crispant et l’activité étant en baisse, nous allons avoir davantage de tensions sur les délais de paiement, car la gestion de la trésorerie va être plus compliquée ». Ce qui justifie que la Capeb formule six propositions, dans le cadre des Rencontres de la simplification organisées par Bercy, visant à améliorer les délais de règlement des marchés publics de travaux. « Il y a par exemple des modifications à apporter à la plate-forme Chorus Pro, pour la rendre plus ergonomique, détaille le président. Elle pourrait aussi rendre automatique le versement des intérêts moratoires en cas de dépassement du délai légal de trente jours ».
Les propositions de la Capeb
Neuf (sur trente-neuf au total) concernent directement les marchés publics :
« 1/ Pérenniser le seuil de la dispense de procédure de publicité et de mise en concurrence préalable pour les marchés publics de travaux dont la valeur estimée est inférieure à 100 000 euros hors taxes (fin prévue au 31/12/2024) ;
2/ Pour éviter de faire refaire les projets de décompte mensuel aux entreprises pour 2 ou 20 centimes d’euros, rendre possible le règlement des sommes demandées sous réserve de régularisation des calculs au moment du projet de décompte général ;
3/ Harmoniser les règles d’arrondis entre l’ordonnateur et le comptable public afin d’éviter les rejets de projet décompte mensuel des entreprises pour quelques centimes d’euros, situation qui retarde le paiement des entreprises ;
4/ Rendre obligatoire la diffusion d’un modèle type de projet de décompte mensuel afin d’éviter que les maîtres d’ouvrage publics obligent les entreprises à refaire leur projet de décompte mensuel au final une nouvelle fois, d’une part parce que cela retarde le paiement de l’entreprise et d’autre part parce que les démarches administratives rendent plus coûteuse l’exécution des marchés publics et que cela les dissuade de répondre à des consultations de marchés publics ;
5/ Verser automatiquement les intérêts moratoires dus aux entreprises. Même si cette règle est dans le Code de la commande publique, elle n’est pas respectée ce qui oblige actuellement les entreprises à demander le versement des intérêts moratoires, ce qu’elles n’osent que très rarement faire, craignant d’être rejetées des futures consultations ;
6/ Modifier le portail Chorus pro afin qu’en l’absence de règlement des sommes dues à l’entreprise dans un délai de 30 jours, les intérêts moratoires lui soient versés automatiquement ;
7/ Rendre Chorus pro plus ergonomique et intuitif pour des non spécialistes dont le cœur de métier est de réaliser des travaux mais pas d’être experts en bureautique ;
8/ Supprimer la notion règlementaire de seuil minimal à déposer (lot) dans le cadre d’une demande de CEE effectuée par un acteur obligé ou délégataire auprès du PNCEE (Pôle national des CEE) afin d’accélérer les paiements des primes ;
9/ Faciliter la création de groupements momentanés d’entreprises (GME) en mettant fin à la solidarité de fait entre entreprises. »
Rétablir les Assises
Des propositions déjà portées par la Capeb au sein du groupe de travail relatif aux bonnes pratiques de facturation dans les marchés de travaux, co-piloté par le Médiateur des entreprises et l’Observatoire économique de la commande publique. Ce dernier a annoncé la publication d’un document de synthèse au premier semestre 2024. « Mais je ne sais pas dans quel cadre se fera cette restitution, relève Jean-Christophe Repon. Car ce travail a été entrepris dans le cadre des Assises du BTP, or à ma connaissance elles n’existent plus ». Les Rencontres de la simplification semblent en effet avoir supplanté les Assises. « Pourtant les difficultés du secteur n’ont pas disparu et sont même renforcées par la crise. Il nous semble important d’avoir un cadre pérenne pour aborder ces problématiques. C’est pourquoi nous invitons le futur gouvernement à se ré-emparer des Assises du BTP ».
Favoriser l'accès des TPE à la commande publique
Ce qui n’a pas empêché la Capeb de prendre part à la consultation lancée le 15 novembre 2023 par le ministère de l’Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique dans le cadre des Rencontres de la simplification. Clôturée fin décembre, elle doit aboutir à une loi de simplification (baptisée « loi Pacte 2 ») courant 2024. Jean-Christophe Repon espère y trouver des dispositions concernant les marchés publics. « Le constat est plutôt satisfaisant en matière de simplification des marchés publics, à travers notamment la dématérialisation des procédures. Cela nous invite à poursuivre cette démarche et à être encore plus exigeants. Et la période Covid a aussi montré la capacité du gouvernement à être souple ».
Pour preuve, le relèvement du seuil en-dessous duquel les marchés de travaux peuvent être passés sans publicité ni mise en concurrence à 100 000 euros (contre 40 000 euros pour les fournitures et services). Cette dérogation temporaire prise pendant la crise sanitaire a déjà fait l’objet d’une prolongation. Elle doit désormais prendre fin le 31 décembre 2024. Si elle semble très peu utilisée par les collectivités, son efficacité ne fait pas de doute aux yeux de Jean-Christophe Repon : « Cette mesure peut amener de l’activité aux TPE/PME, en facilitant l’accès à la commande publique. Elle doit être pérennisée et faire l’objet d’un observatoire dédié pour mesurer ses résultats ».