Ce que l’ordonnance Coronavirus du 22 avril modifie pour le BTP

Voiture-balai des mesures d’urgence prises sur le fondement de la loi d’habilitation du 23 mars 2020, l’ordonnance présentée en conseil des ministres le 22 avril et parue le lendemain au "JO" répond à des besoins spécifiques d’adaptation de la réglementation d’exception adoptée pour faire face à la crise sanitaire et économique. Au menu : urbanisme, commande publique, copropriété...

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Ordonnances et décrets dessinant un cadre juridique ad hoc pour surmonter les difficultés résultant de l’épidémie de Covid-19 se succèdent à un rythme effréné. Au « JO » de ce 23 avril, outre des ordonnances spécifiques à l’outre-mer, c’est une ordonnance « portant diverses mesures » (n° 2020-460) qui retient l’attention. Voici les principales nouveautés et adaptations qui concernent le secteur du BTP.

Urbanisme

C’est à un véritable jeu de pistes qu’il faut se livrer pour connaître les règles à respecter désormais en matière de délais - en témoigne, encore, le décret du 21 avril apportant de nouvelles dérogations aux mesures de suspension (lire notre Veille juridique).

La présente ordonnance revient en effet sur la fameuse ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 gelant de façon générale et conséquente les délais en cours, laquelle avait déjà été retouchée par l'ordonnance n° 2020-427 du 15 avril 2020. Cette dernière avait notamment introduit des règles particulières de suspension pour l'instruction des autorisations et certificats d'urbanisme et des préemptions, permettant d’aller plus vite que ce que prévoyaient les mesures générales de suspension.

La présente ordonnance (article 23) ménage la possibilité d’accélérer encore les choses pour ces deux procédures, en autorisant l’exécutif à fixer par décret la reprise du cours des délais dans les conditions fixées par l'article 9 de l'ordonnance n° 2020-306 – c’est-à-dire, pour des motifs divers tels que la protection des intérêts fondamentaux de la Nation, la sécurité, la salubrité publique, la sauvegarde de l'emploi et de l'activité, la préservation de l'environnement, etc.

Le texte, toujours dans son article 23, apporte un autre changement notable à l'ordonnance n° 2020-306 (article 12 ter). Désormais, l’instruction des autorisations de travaux et des autorisations d’ouverture en matière de sécurité incendie et d’accessibilité des établissements recevant du public (ERP) et des immeubles de grande hauteur (IGH), ainsi que les autorisations de division d’immeubles, reprendra son cours dès la cessation de l'état d'urgence sanitaire, et non un mois après.

Avec toujours le même objectif, rappelé par le rapport de présentation au président de la République : « Relancer aussi rapidement que possible, une fois passée la période de crise sanitaire, de nombreux travaux dans les ERP et IGH réalisés par les artisans et PME du bâtiment, notamment les réaménagements de commerces qui devront faire des travaux d'adaptation au Covid-19 à la sortie du confinement ».

Immobilier

Comme attendu, l’ordonnance n° 2020-460 (article 1er) revient aussi sur les règles applicables aux contrats de syndic adoptées par l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 pour pallier l’impossibilité de réunir les assemblées générales (AG) de copropriétaires en raison du confinement.

Ainsi, les contrats de syndics devant être renouvelés entre le 12 mars et deux mois après la fin de l’état d’urgence sanitaire (et non plus un mois comme prévu dans l’ordonnance) sont prolongés jusqu’à la prochaine AG. Laquelle devra se tenir dans les huit mois à compter de la fin de l’urgence sanitaire, au lieu de six mois comme prévu initialement. Et le texte prolonge les mandats des membres du conseil syndical dans les mêmes conditions.

Comme l’explique le rapport de présentation, il s’agit de permettre aux syndics de faire face, à la sortie du confinement, « compte tenu du délai nécessaire à l’organisation d’une AG et du nombre d’AG à organiser ».

Par ailleurs, l’ordonnance précise que la rémunération du syndic sera forfaitaire, calculée au prorata selon les modalités prévues par le contrat arrivé à échéance.

Commande publique

Enfin, l’article 20 de l’ordonnance n° 2020-460 retouche certaines dispositions de l’ordonnance n° 2020-319 du 25 mars, pour apporter davantage de souplesse ou de sécurité aux acteurs de la commande publique.

D’une part, il vient permettre aux collectivités territoriales, à leurs établissements publics et à leurs groupements, de conclure des avenants aux conventions de délégation de service public (DSP) et aux marchés publics sans avoir à recueillir l’avis préalable de la commission de DSP ou de la commission d’appel d’offres, même si ces avenants entraînent une augmentation du montant global supérieure à 5%. Et ce, en dérogeant aux articles L. 1411-6 et L. 1414-4 du Code général des collectivités territoriales. Le but est de gagner du temps, le confinement rendant plus difficile la réunion de ces commissions.

D’autre part, l’ordonnance entend remédier aux conséquences économiques drastiques subies par certains délégataires de services publics, qui doivent fortement restreindre ou cesser leurs activités en raison de la crise. Pour sécuriser leur situation, explique le rapport de présentation, elle précise dans l’ordonnance n° 2020-319 « que les mesures destinées à les soutenir financièrement s'applique non seulement en cas de décision expresse de suspension prise par l'autorité concédante mais également lorsque l'arrêt de l'activité est la conséquence nécessaire d'une mesure de fermeture d'établissement prise par l'autorité de police administrative ».

Elle prévoit en outre que les titulaires d’une autorisation d’occupation du domaine public, lorsque leur activité est fortement dégradée du fait de l'épidémie de Covid-19, peuvent suspendre le versement des redevances d'occupation domaniale. « Cette disposition serait applicable aux contrats de la commande publique, comme les contrats de mobilier urbain, qui ne peuvent bénéficier des autres dispositions de l'ordonnance [n° 2020-319] en l'absence de suspension de leur exécution, ainsi qu'aux pures conventions domaniales, qui sont des contrats publics par détermination de la loi mais ne peuvent bénéficier ni des dispositions applicables aux marchés ou aux concessions ni de la théorie de l'imprévision qui, en l'état de la jurisprudence administrative, n'est susceptible d'être invoquée que dans le cadre de la prise en charge de missions de service public, de la gestion d'un service public ou de l'exécution de mesures prises dans un but d'intérêt général », détaille le rapport de présentation.

Et aussi…

L’ordonnance comporte aussi et notamment des mesures visant à faciliter la transmission des dossiers aux Centres de formalités des entreprises (article 2), des dispositions relatives à l’activité partielle (articles 5 à 8), aux délais de consultation du comité social et économique dans les entreprises (article 9), aux délais d’instruction des demandes relatives à la reconnaissance des accidents du travail et des maladies professionnelles, à l'utilisation de points ou aux réclamations dans le cadre du compte professionnel de prévention (article 14) ou encore aux modalités de contrôle des bénéficiaires d'aides versées par le Fonds de solidarité (article 18).

Ordonnance n° 2020-460 du 22 avril 2020 portant diverses mesures prises pour faire face à l'épidémie de covid-19

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