Négociants recherchent collaboratrices, activement

Confronté à des difficultés de recrutement ainsi qu'à des impératifs de RSE, le négoce cherche à employer de plus en plus de femmes, dans des métiers réputés masculins. Une démarche de long terme, qui mobilise largement dans les entreprises.

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Il a beau vendre des produits de la construction, secteur à image masculine, à des artisans essentiellement mâles, le négoce est unanime : il entend recruter davantage de femmes. Avec à l'appui des arguments solides, allant bien au-delà du traditionnel « les femmes sont plus minutieuses et elles ont un sens de la déco plus poussé que celui des hommes ». Désormais, les négociants recherchent des collaboratrices, y compris en tant que commerciales, vendeuses-magasinières ou chefs (ou cheffes ?) d'agence, bref dans les fonctions jusqu'ici les moins féminisées. « La qualité de la relation que nouent les équipes avec les clients est essentielle, explique Pierre Lucien-Brun, DRH de SGDB France. Or, la diversité fait la richesse et l'ambiance d'un collectif, en termes de genre comme en termes d'âge. » Cette approche s'inscrit dans l'item plus large de la RSE, sur lequel l'ensemble du négoce travaille activement.

Mais cet engagement en faveur de la féminisation des métiers peut aussi revêtir une dimension très opérationnelle. « Les femmes représentent plus de 50 % de la population, poursuit Pierre Lucien-Brun. Pourquoi se priver de ces talents et de ces intelligences ? » Une interrogation d'autant plus fondée que, dans la logistique comme dans le commerce, le recrutement est particulièrement tendu. Reste qu'attirer des femmes n'est pas chose aisée, même si, comme le note Lydia Bouquet, directrice générale adjointe de Partedis, la situation a nettement progressé. « Hors siège, le taux de représentation des femmes dans l'effectif est passé de 17 % en 2018 à 22 % en 2022 dans notre activité sanitaire-chauffage, et de 17 à 21 % dans notre activité bois-matériaux. » Une progression encourageante, qui montre que les femmes peuvent trouver leur place dans tous les métiers du négoce. Une intégration qui appelle toutefois des actions précises.

Accueillir

Le sujet peut paraître prosaïque, voire évident. Mais ouvrir le recrutement aux femmes, c'est bien sûr proposer des locaux de travail en conséquence, avec en particulier des sanitaires distincts. Vu de l'extérieur, cela peut paraître la moindre des choses. Chez SGDB France, comme dans d'autre groupes du marché, toutes les agences nouvelles ou rénovées intègrent cette exigence. Mais « il reste dans notre parc toute une série d'agences qui ne sont pas encore à ce standard, reconnaît Pierre Lucien-Brun. Au fur et à mesure que nous rénovons les agences, nous intégrons cet élément de vestiaire et de douche. »

Ce sujet s'inscrit dans une approche plus large, celle de l'inclusion. Autrement dit, l'entreprise doit accueillir tout le monde, sans distinction. « Toutes nos annonces sont non genrées », souligne Lydia Bouquet. SGDB France, comme pratiquement toutes les grandes entreprises aujourd'hui, fait de même, sans toutefois aller jusqu'à l'écriture inclusive, non consensuelle.

La force de l'exemple

Chez plusieurs acteurs, l'accueil passe aussi par l'image que renvoie l'entreprise. La féminisation des comités exécutifs des grandes entreprises est engagée dans toute l'économie française, notamment dans les entreprises du CAC 40. Une politique fondée sur la vertu de l'exemple.

À une plus petite échelle, Lydia Bouquet observe elle aussi : « Notre comité de direction compte deux femmes sur cinq membres, et bientôt sur quatre puisque l'un des trois hommes, partira prochainement à la retraite. » Féminiser les postes de direction envoie donc un signal positif. Côté SGDB France, de nombreuses nominations de femmes à des postes de direction générale (Pum, Clim +, Point. P Île-de-France, Cédéo Île-de-France… ) ont été effectuées ces dernières années, le plus souvent par promotion interne. « C'est une politique qui envoie un signal fort à notre organisation, souligne Pierre Lucien-Brun. Mais il faut parallèlement préparer le vivier de collaboratrices pour les postes de direction dans 5, 10 ou 15 ans. »

Cette approche de long terme rejoint la démarche que VM vient d'entamer avec le BTP CFA Vendée, qui a ouvert récemment une formation spécifique pour le négoce de matériaux. « Nous doublons nos recrutements d'alternants, et nous allons fournir un effort particulier pour attirer des femmes pour ces contrats d'alternance », explique Laurent Grimaud, DRH de VM. C'est aussi avec les écoles et centres de formation que Partedis travaille pour identifier des candidats… et des candidates. Dans beaucoup d'entreprises, la question de la féminisation s'inscrit dans un cadre plus large, mêlant attractivité des métiers pour les jeunes, responsabilité sociétale et capacité à affirmer une raison d'être.

Sensibiliser et inciter

La féminisation des métiers, vécue comme un impératif sociétal autant qu'économique, résulte donc d'un travail de long terme de la part des enseignes. Si les équipes en place, comme les clients, accueillent globalement très bien les collaboratrices dans les points de vente, il faut parfois formaliser certaines actions. « Chez Partedis, le recrutement est très décentralisé au niveau des chefs d'agence, explique Lydia Bouquet. On a donc mis en place un guide de recrutement, listant les questions à poser, mais aussi celles à ne pas poser. » Côté SGDB France, « nous formons nos équipes à recruter sans discriminer, et nous travaillons les parcours d'intégration en veillant au respect de la diversité, détaille Pierre Lucien-Brun. Car si une femme s'intéresse à un de nos métiers, mais que l'expérience vécue crée un sentiment de discrimination, nos annonces n'auront servi à rien ! »

Chez VM, la féminisation des métiers est même devenue un sujet de performance. « Nous avons intégré un critère de féminisation dans l'accord d'intéressement », souligne Laurent Grimaud. Une manière originale de faire de cette question un objet de mobilisation collective, au même titre que la performance financière ou le respect de l'environnement.

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