Mercredi 3 avril, la Commission européenne a annoncé avoir ouvert une nouvelle enquête approfondie sur les contributions financières provenant d’un Etat tiers perçues par des candidats à un marché public. C’est la deuxième procédure de ce type depuis l’entrée en vigueur du règlement sur les subventions étrangères le 12 octobre 2023 (la première, ouverte le 16 février, concerne des contributions financières perçues par une filiale d'une entreprise chinoise fabricante de trains).
Il s’agit cette fois d’examiner les sommes perçues par deux entreprises ayant répondu à un marché public en Roumanie portant sur la conception, la construction et l’exploitation d’un parc photovoltaïque : d’une part une société allemande détenue et contrôlée à 100 % par l’entreprise hongkongaise Longi Green Energy Technology, d’autre part deux sociétés détenues et contrôlées totalement par l’entreprise publique chinoise Shangaï Electric Group.
Concurrence loyale
Pour rappel, le règlement européen du 14 décembre 2022 (règlement UE 2022/2560 sur les subventions étrangères) oblige les soumissionnaires à des marchés publics au sein de l’Union européenne, d’un montant égal ou supérieur à 250 millions d’euros HT, à notifier les contributions financières provenant d’un Etat tiers qu’elles ont reçues au cours des trois dernières années si elles dépassent 4 M€. La notification donne lieu à une enquête préalable, qui peut déboucher, comme c’est le cas ici, sur une enquête approfondie. La Commission estime en effet « qu'il existe suffisamment d'éléments indiquant que les deux [candidats] ont bénéficié de subventions étrangères faussant le marché intérieur. »
L’enquête approfondie peut durer jusqu’à 110 jours. Si Bruxelles conclut que les soumissionnaires ont bénéficié d’un avantage indû susceptible de les favoriser dans l’attribution du marché public, alors leurs offres devront être rejetées par le pouvoir adjudicateur. Dans le cas inverse, ou si les entreprises ont pris des engagements jugés suffisants par la Commission, alors leurs offres pourront être examinées.
Secteur stratégique
Comme le souligne Thierry Breton, le commissaire européen au Marché intérieur, « les panneaux solaires revêtent une importance stratégique pour l’Europe : pour notre production d’énergie propre, l’emploi en Europe et la sécurité de l’approvisionnement ». Ils font ainsi partie des technologies renouvelables visées dans le futur règlement européen pour une industrie « zéro nette », dont le vote au Parlement européen est prévu le 22 avril. Ce texte comporte une mesure obligeant les acheteurs publics d’intégrer dans les marchés publics des clauses imposant à l’attributaire de ne pas utiliser plus de 50 % de produits issus d’Etats tiers.
En France, la loi Industrie verte du 23 octobre 2023 (art. 29) prévoit déjà la possibilité de rejeter une offre remise dans le cadre d’un marché de pose ou de fourniture de panneaux photovoltaïques qui contient une part majoritaire de produits originaires d’un pays tiers avec lequel l’Union européenne n’a pas conclu d’accord pour l’accès aux marchés est majoritaire. Cette disposition ne concerne que les marchés publics passés par les entités adjudicatrices (acheteurs agissant en qualité d’opérateurs de réseaux).