Nouvelle étape dans l’élaboration du projet de loi de simplification, la présentation ce jeudi 15 février à Bercy du rapport des cinq parlementaires de la majorité (Louis Marguerrite, député de Saône-et-Loire ; Alexis Izard, député de l’Essonne ; Philippe Bolo, député du Maine-et-Loire ; Anne-Cécile Violland, député de Haute-Savoie ; Nadège Havet, sénatrice du Finistère). Les quatorze propositions qu’il contient viendront alimenter le texte de la future loi, aux côtés des résultats de la consultation publique qui s’est tenue du 15 novembre au 29 décembre 2023 et des demandes formulées par les fédérations professionnelles. Le projet, qui sera présenté dans les prochains mois (possiblement courant mars), devrait d’ailleurs contenir des mesures sectorielles.
« Dites-le nous une fois pour toutes » et coffre-fort numérique
Le rapport, approuvé par Bruno Le Maire, ministre de l’Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, et par Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des PME, du Commerce, de l’Artisanat et du Tourisme, fait la part belle aux mesures en faveur des TPE. Ses rédacteurs proposent ainsi de leur « faciliter drastiquement l’accès à la commande publique ». Ce qui passe par un allègement des procédures de passation des contrats. Par exemple en « généralisant le recours au marché public simplifié » qui permet aux entreprises de répondre avec leur seul numéro Siret dès lors que l’acheteur public a identifié ce marché comme éligible au dispositif. Le formulaire de réponse est alors pré-rempli et la collecte des attestations et certificats nécessaires auprès des administrations est automatique. On peut toutefois relever que depuis 2019, le dispositif marché public simplifié a été remplacé par le Dume...
Plus largement, les parlementaires souhaitent que le principe du « Dites-le nous une fois » soit pleinement applicable, en matière de commande publique mais aussi pour toutes les démarches administratives. Ils proposent à cet effet de mettre en place « l’équivalent d’un coffre-fort numérique où seraient accessibles les éléments relatifs aux entreprises détenus par l’administration ».
Les retards de paiement en ligne de mire
Le rapport s’attaque aussi aux délais de paiement dans le secteur public. A cet égard, il est proposé une simplification de la facturation dans les marchés publics. Avec notamment une mesure pour lutter contre les délais cachés, soit toutes les irrégularités ou contestations qui décalent le point de départ du délai effectif de paiement. Les parlementaires préconisent de prévoir que le délai commence à courir à compter de la réception de la facture, et non de son enregistrement dans Chorus Pro (plate-forme obligatoire pour la facturation auprès d’une administration) où celle-ci peut notamment être rejetée si elle est incomplète.
Ils proposent également de relever le taux des intérêts moratoires pour l'aligner sur celui applicable entre entreprises (taux BCE + 10 points, au lieu de 8). "D’un niveau exclusivement réglementaire, ces mesures peuvent être implémentées en parallèle de l’examen du projet de loi", précise le rapport.
Les autres mesures « commande publique » :
- Une centralisation de l’ensemble des consultations de l’Etat, de ses établissements publics et hôpitaux et organismes de sécurité sociale sur la plateforme Place ;
- La création de « supports contractuels novateurs » pour les solutions innovantes, avec un éventuel relèvement du seuil de 100 000 euros pour les achats innovants sans procédure de publicité ni mise en concurrence préalable ;
- La création d’un bloc de compétences unique en faveur du juge administratif pour l’ensemble des contrats relatifs à un marché public, y compris le contrat conclu entre le titulaire et le sous-traitant (contrat de droit privé, qui obéit à la compétence du juge judiciaire).
Accélérer les procédures d'urbanisme
La simplification passe aussi par la dématérialisation souligne le rapport, qui note que « les TPE et les PME doivent avoir la possibilité de réaliser 100 % de leurs démarches administratives de manière dématérialisée ». Y compris en matière d’autorisations d’urbanisme ou environnementale, pour lesquelles il est proposé que tous les services « disposent d’un logiciel permettant l’instruction dématérialisée de ces demandes, tout en conservant, pour les entreprises qui le préfèrent, la possibilité de déposer un dossier papier ».
Autre proposition pour gagner du temps : restreindre le champ d’action de la Commission nationale du débat public (CNDP). Une proposition qui fait écho aux propos de Gabriel Attal, lors de sa déclaration de politique générale devant l'Assemblée nationale mardi 30 janvier. Il souhaite « concentrer les travaux de la CNDP uniquement sur les projets d’envergure nationale ». Mesure qui, si elle aboutit, devrait alors plutôt se retrouver dans la future loi Industrie verte 2, annoncée par le Premier ministre.
Rétablir la confiance
« Nous voulons aussi renforcer la confiance entre administration et entreprises », explique le député Louis Marguerrite lors de la remise du rapport. D’abord en privilégiant « les régimes de déclaration aux régimes d’autorisation ». Le rapport reprend notamment une des propositions de la CPME, qui souhaite que les permis de construire déposés sur le périmètre d’une opération d’aménagement réalisée sous permis d’aménager ou en zone d’aménagement concerté fassent l’objet d’une simple déclaration. Ensuite, en favorisant la coordination entre les administrations pour réduire le nombre de contrôles.
Crash test
Bruno Le Maire l’a rappelé, la future loi doit « transformer le maquis en jardin ». Un objectif qui se retrouve dans la proposition visant à « mettre fin à des redondances et à des formalités inutiles », ainsi que dans la mise en place d’une procédure de révision périodique des normes en vigueur, « au maximum tous les cinq ans ». Un travail sur le stock de normes, qui devraient s’accompagner d’une réflexion sur le flux. Les parlementaires plaident ainsi pour la création d’un « test PME » pour mesurer l’impact de toute nouvelle norme sur ces entreprises.
Les autres propositions du rapport :
- Permettre aux entreprises de moins de cinq ans et de moins de cinquante salariés de définir avec les salariés l’application de certaines dispositions des accords de branche ;
- Alléger les obligations des trois principaux seuils 11-50-250 en les translatant d’un niveau ;
- Aligner les droits bancaire et assurantiel des professionnels et des particuliers ;
- Proposer une visite de conformité et un rescrit pour faciliter l’accompagnement des entreprises ;
- Réduire les délais de contentieux, notamment prud’hommaux ;
- Favoriser la coordination et l’acceptation des contrôles ;
- Dépénaliser les niveaux de sanction en cas de manquement, de bonne foi, à des obligations déclaratives des dirigeants.