Comme les promoteurs fragilisés par la baisse des autorisations et des ventes de logements neufs, la multinationale cotée Bureau Veritas et la jeune société française Terre de Données structurent leur offre cochant les cases ZAN et décarbonation.
De la rénovation de logements énergivores à la réhabilitation ou transformation de bâtiments obsolètes, ce petit marché est perçu comme un relais de croissance par leurs clients promoteurs, et promis à un bel avenir, selon les experts de CBRE, JLL ou Xerfi.
Actuellement, la branche construction de Bureau Veritas compte 600 ingénieurs spécialisés dans le contrôle technique du bâtiment, à construire, à réhabiliter ou à transformer. « Fin 2024, la moitié d’entre eux seront formés pour intervenir sur les chantiers de réhabilitation, contre un gros tiers actuellement », annonce Jacques Matillon, PD-G de Bureau Veritas Construction.
Bureau Veritas à fond sur la réhab’
Leur mission ? Accompagner les maîtres d’ouvrage, des bailleurs sociaux aux foncières en passant par les promoteurs, pour « les aider à anticiper les aléas techniques souvent plus nombreux dans l’acte de réhabiliter que dans les constructions neuves : pollutions imprévues, structures pas aussi solides qu’elles devraient l’être ou encore planchers qui ne sont pas bien raccordés au noyau », lit-on dans le livre blanc de Bureau Veritas dédié à ce marché prometteur, téléchargeable gratuitement sur son site depuis décembre.
En somme, il s’agit de réduire les risques techniques. « Les principaux enjeux sur la réhabilitation restent la solidité, en particulier les surcharges à prendre en compte lors de surélévation, la sécurité incendie, la ligne directrice étant la non-aggravation de la situation avant travaux, et l’accessibilité handicapés », résume-t-il.
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En matière de décarbonation, des études de réemploi préalables et des diagnostics produits, équipements, matériaux et déchets sont déjà proposés pour « faciliter et rendre accessible financièrement le réemploi des matériaux » issus des chantiers de réhab’, moins émissifs que les projets neufs sur le volet construction, illustre Bureau Veritas dans son livre blanc.
« Le marché va croître rapidement »
Pourquoi se réveiller maintenant ? « Le marché va croître rapidement car c’est une opportunité parmi d’autres pour lancer des programmes qui correspondent aux attentes sociétales et au ZAN. Il en va de la survie des promoteurs, qui feront moins d’opérations car plus risquées », anticipe Jacques Matillon.
La direction de Bureau Veritas Construction a décidé l’été dernier, sur fond d’enracinement de la crise du logement, d’ajouter un chapitre réhab’ à ses réunions techniques. Celles-ci rassemblent, tous les deux mois, « les opérationnels, la direction technique, les spécialistes régionaux et les commerciaux pour faire le point sur le décryptage réglementaire et les évolutions des modes constructifs », explique le dirigeant.
« Le développement du marché de la réhabilitation place Bureau Veritas au centre du jeu, grâce à notre expertise en analyse du risque. Dans le neuf, la situation est très différente car moins complexe. À nous d’accompagner nos clients à se conformer à des référentiels issus d’époques différentes, voire à se positionner en absence de référentiel », conseille-t-il.
Bureau Veritas Construction ne va pas se scinder en deux « business units », l’une consacrée à la construction, l’autre à la réhab’. « Le sujet de la réhabilitation est embarqué dans notre offre de services et de solutions : la « Ligne Verte ». Nous préférons former nos équipes et continuer de travailler avec les acteurs locaux comme le Service départemental d’incendie et de secours (SDIS) pour imaginer les solutions idoines en matière de réhabilitation », soutient-il.
Terre de Données identifie « les gisements de passoires thermiques »
De son côté, Terre de Données, jeune société spécialisée dans la collecte de données publiques relatives à la fabrique de la ville pour des collectivités ou encore des aménageurs, doit lancer le mois prochain Datarenov.
« Un outil capable de vous donner le pourcentage de logements étiquetés E, F et G (visés par une interdiction de mise en location, NDLR) dans telle commune ou tel quartier. L’idée est d’identifier, via une cartographie interactive, les gisements de passoires thermiques à traiter. Il s’agit d’une demande de nos clients promoteurs », témoigne Julien Cresp, co-fondateur.
Concrètement, Nexity, Redman ou encore le francilien Edelis, qui utilisent déjà ses autres outils, pourront connaître les caractéristiques de chaque immeuble, adresse par adresse : année de construction, surface utile, hauteur du bâtiment, matériaux utilisés… Un filtre permettra en outre d’isoler les diagnostics de performance énergétique (DPE) créés avec la méthode de calcul de 2021.
Les informations disponibles dépendent du recensement de la Base de données nationale des bâtiments (BDND) existants et de l’observatoire des DPE et audits énergétiques de l’Agence de la transition écologique (Ademe), dont la mise à jour est mensuelle. Le promoteur devra payer entre 200 et 250€ par quartier analysé.
Julien Cresp, entouré de deux acolytes en interne et de développeurs externes, est en train de lever des fonds pour recruter des commerciaux. Le premier chiffre d’affaires de Terre de Données, réalisé en 2023, affiche 150 000€. La jeune société vise les 800 000€ en 2024.