Le détail des mesures logement et urbanisme de la loi de programmation pour la refondation de Mayotte

Ce texte permet notamment à chaque commune de l’archipel d’être considérée comme un quartier prioritaire de la politique de la ville. Il complète la loi d’urgence pour Mayotte promulguée en février dernier et porte des mesures en matière d’aménagement et d’habitat illégal.

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Géré par la Société immobilière de Mayotte, filiale du bailleur CDC Habitat, ce bâtiment a été touché par le cyclone Chido en décembre 2024.
Géré par la Société immobilière de Mayotte, filiale du bailleur CDC Habitat, ce bâtiment a été touché par le cyclone Chido en décembre 2024.

Après la loi d’urgence pour Mayotte, promulguée en février 2025, la loi de programmation pour la refondation de Mayotte, pensée comme la seconde étape de l’intervention de l’État sur l’archipel touché par le cyclone Chido en décembre 2024, est publiée au « Journal officiel » du 12 août 2025. Et ce, après sa validation par le Conseil constitutionnel, le 7 août, à l’issue d’une saisine des députés écologistes et La France insoumise, qui contestaient notamment l’article 18 permettant au préfet de déroger à l’obligation de relogement ou d’hébergement d’urgence en cas d’expulsion ou de destruction d’habitat informel. Si cet article a été déclaré conforme, le Conseil constitutionnel a toutefois émis une réserve d’interprétation.

Cette loi de programmation présente notamment les crédits du plan « Mayotte debout », annoncé par François Bayrou dans la foulée du passage du cyclone Chido et précisé en annexe, ainsi que la création de l’Etablissement public chargé de la reconstruction et du développement de l’archipel.

Voici le détail des mesures de la loi pour l’habitat et l’urbanisme.

Titre Ier : objectifs de l'action de l'Etat pour Mayotte

Plan « Mayotte debout » (art. 1er et art. 2). Ces deux articles introduisent le rapport annexé qui détaille le plan « Mayotte debout » et les crédits qui y sont associés. Parmi ses priorités, l’Etat cite l’offre de logements qui « fera l’objet d’une augmentation massive au titre de la reconstruction », notamment au titre de l’opération d’intérêt national, qui a été précisée par décret du 30 juin 2025 ; il se fixe un objectif de reconstruction de 24 000 logements durant les dix prochaines années, « avec une livraison de 1 500 logements dès 2027 [qui] sera ajusté à la lumière des conclusions de la mission inter-inspections chargée de l’évaluation des dégâts causés par le cyclone Chido ».

« En matière de logement social, la déclinaison territoriale du futur plan logement dédié aux outre-mer définira, dès 2025, un objectif de constructions annuelles de logements sociaux comprenant un objectif spécifique de logements locatifs très sociaux, partagé avec l’ensemble des acteurs. »

Les crédits prévus en soutien aux collectivités territoriales au titre de la reconstruction s’élèvent à 100 M€ en AE (autorisations d'engagement) et 35 M€ en CP (crédits de paiement) pour 2025, à 200 M€ en AE et 125 M€ en CP pour 2026 et 140 M€ en CP pour 2027. Le logement bénéficiera de 200 M€ en AE chaque année pour la phase 2025-2029.

« Au titre de la reconstruction, une feuille de route "du bidonville au logement" sera finalisée afin d’accélérer la résorption de l’habitat illégal et insalubre, en lien avec les collectivités territoriales et les acteurs du logement », précise l’annexe qui rappelle également la création d’un nouvel établissement public chargé de la refondation de Mayotte et absorbant l’EPFA Mayotte existant.

Suivi de la loi (art. 3). Un comité de suivi, placé auprès du Premier ministre, est chargé de veiller au suivi de la mise en œuvre et à l’évaluation de la présente loi et d’en rendre compte au Parlement. Il est composé de trois députés et de trois sénateurs ainsi que des parlementaires élus à Mayotte, de deux membres de la Cour des comptes, de quatre représentants de l’État, du préfet de Mayotte, du président de l’assemblée de Mayotte, du président de l’association des maires de Mayotte et du président de l’association des intercommunalités de Mayotte. Il rendra, avant le 1er juillet 2028, un rapport public intermédiaire évaluant l’impact de la reconstruction et de la refondation de Mayotte et la réalisation des investissements.

Préfet de Mayotte (art. 4). Jusqu’au 31 décembre 2030, le préfet de Mayotte « dirige l’action de l’ensemble des services et des établissements publics de l’Etat ayant un champ d’action territorial à Mayotte, qui sont placés pour emploi sous son autorité, à l’exclusion de l’établissement public chargé de coordonner les travaux de reconstruction de Mayotte ». Un décret en Conseil d’Etat doit déterminer les modalités d’application de cette disposition.

Titre II : lutter contre l'immigration clandestine et l'habitat illégal

Chapitre IV : renforcer la lutte contre l’habitat informel

Habitat informel (art. 18). Cet article crée une procédure spécifique d’évacuation des locaux ou installations édifiés sans droit ni titre pour le territoire de Mayotte. Dans ce cas de figure précis, le préfet du département peut ordonner, par arrêté, aux occupants l’évacuation des lieux et aux propriétaires de procéder à leur démolition. Un rapport devra présenter les solutions d’hébergement ou de relogement envisagées. L’arrêté préfectoral précise le délai dans lequel l’évacuation et la démolition doivent être conduites, en sachant que ce délai ne peut être inférieur à quinze jours, à partir de la notification de l’arrêté aux occupants et aux propriétaires. Si ces derniers n’occupent pas le local ou l’installation visé, le délai de démolition est alors prolongé de huit jours à compter de l’évacuation « volontaire » des lieux.

Si un habitat a été illégalement construit depuis moins de sept jours, le préfet ordonne la démolition dans un délai de 24 heures à compter de la notification de l’acte. Si le local est occupé, le délai d’évacuation ne peut être inférieur à quinze jours, mais peut être rallongé de 24 heures lorsque le local n’est pas occupé par son propriétaire. Les obligations relatives à l’évacuation et la démolition ne peuvent être exécutées « d’office » ni de manière anticipée par rapport aux délais prévus par la loi, ou « avant que le tribunal administratif ait statué, s’il a été saisi par le propriétaire ou l’occupant concerné […] d’un recours ».

Jusqu’au 13 décembre 2034, « compte tenu des circonstances locales » et de la rareté de l’offre en logement et hébergement, le représentant de l’État pourra « de manière motivée » déroger à son obligation de joindre en annexe une proposition de relogement ou d’hébergement d’urgence.

Titre IV : façonner l'avenir de Mayotte

Chapitre II : favoriser l’aménagement durable de Mayotte

Etablissement public de l’Etat à Mayotte (art. 30).L’établissement créé par l’Etat pour la refondation de Mayotte est éligible au fonds de prévention des risques naturels majeurs (dit « Fonds Barnier »), dans le cadre de démolitions d’habitations édifiées sans droit ni titre dans une zone exposée à un risque naturel prévisible, telles que prévues par l’article 6 de la loi n° 2011-725 du 23 juin 2011 portant dispositions particulières relatives aux quartiers d’habitat informel et à la lutte contre l’habitat indigne dans les départements et régions d’outre-mer (dite « loi Letchimy »), ainsi que pour les dépenses afférentes à la libération et à la remise en état des terrains concernés.

Prise de possession (art. 34). Le délai de prescription acquisitive, fixé à dix ans par la loi n° 2024-322 du 9 avril 2024 sur l’habitat dégradé et ce jusqu’en 2038, est désormais applicable à Mayotte aux possessions ayant débuté avant le 11 avril 2024, à condition qu’elles soient constatées dans un acte de notoriété ou une décision judiciaire. Cette disposition entrera en vigueur un an après la publication du décret déterminant les modalités d’information des personnes susceptibles d’être concernées par ces dispositions, et le 31 décembre 2027 au plus tard.

Marchés publics pour l’hébergement d’étudiants (art. 36).Les marchés de travaux soumis au Code de la commande publique, qui ont pour objet l’édification de constructions temporaires nécessaires à la continuité des services publics de l’enseignement scolaire et de l’enseignement supérieur et à l’hébergement des élèves et des étudiants en vue de pallier les conséquences du cyclone Chido, peuvent être négociés sans publicité mais avec mise en concurrence préalable, si leur valeur estimée est inférieure à 3,5 M€ hors taxes.

Ratification d’ordonnances (art. 37). Les ordonnances n° 2025-453 du 23 mai 2025 relative à la transformation de l’établissement public foncier et d’aménagement de Mayotte et n° 2025-454 du 23 mai 2025 portant diverses mesures d’adaptations et de dérogations temporaires aux règles de construction à Mayotte afin d’accélérer sa reconstruction à la suite du passage du cyclone Chido sont ratifiées.

Chapitre III : créer les conditions du développement de Mayotte

Quartiers prioritaires de la politique de la ville (art. 40). A Mayotte, par dérogation à l’article 5 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine (dite « loi Lamy ») et jusqu’au 1er janvier 2030, chaque commune est considérée comme un quartier prioritaire de la politique de la ville.

Titre V : moderniser le fonctionnement institutionnel de la collectivité

Chapitre Ier : dispositions concernant le Code général des collectivités territoriales

Transformation du département en département-région (art. 48). Le Code général des collectivités territoriales est modifié pour prendre en compte la transformation du département de Mayotte en département-région, comme prévu par la loi organique n° 2025-793 relative au département-région de Mayotte adoptée simultanément à la loi de refondation.

L’Assemblée de Mayotte est notamment saisie pour avis par le préfet de Mayotte, avant le 31 décembre de chaque année, des orientations générales de la programmation des aides de l’État en faveur de l’habitat pour l’année suivante, arrêtées après avis du conseil territorial de l’habitat. Celles-ci précisent la répartition des aides par dispositif, d’une part, et la répartition des aides par bassin d’habitat, d’autre part.

Conseil territorial de l’habitat (art. 48). Le conseil territorial de l’habitat est instauré. Sa composition (dont la moitié, au moins, est issue de conseillers de l’assemblée de Mayotte), ses modalités de fonctionnement et ses attributions sont précisées par décret en Conseil d’Etat.

SAR (art. 48). Le plan d’aménagement et de développement durable entré en vigueur le 22 juin 2009 est assimilé au schéma d’aménagement régional.

Titre VI : dispositions transitoires et finales

Rapport (art. 53). Dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, le gouvernement remet au Parlement un rapport recensant et évaluant les plans stratégiques applicables à Mayotte.

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