Le Grand Paris Express suit-il la bonne trajectoire, en tenant compte des risques et aléas ? La Société du Grand Paris (SGP), maître d’ouvrage du « chantier du siècle » réunissait son conseil de surveillance mardi 25 juin 2019 en fin de journée. Avec, à l’ordre du jour, la présentation de l’audit externe sur les conditions de mise en œuvre de la feuille de route gouvernementale du 22 février 2018.
En résumé, cet audit réalisé par PwC, "ne remet pas en cause le calendrier de réalisation" des 200 km de métro du Grand Paris Express d'ici à 2030, de même qu'il "(confirme) les analyses et les orientations prises par la Société du Grand Paris depuis plusieurs mois", explique cette dernière, dans un communiqué.
A l’heure actuelle, la trajectoire semble donc respectée. Avec un gros « warning », toutefois, sur la soutenabilité du chantier pour les entreprises de BTP et d’ingénierie.
Risque de « surchauffe » des entreprises
L’audit met en effet en garde contre un "risque important" de surchauffe dans le BTP et l'ingénierie. En cause : la forte demande, et notamment celle liée à la construction du futur métro automatique autour de Paris.
Les auditeurs pointent « le risque important lié à la capacité des entreprises de travaux publics et d'ingénierie de conduire le projet, notamment face à la mise en oeuvre concomitante d'autres grands projets en Ile-de-France", affirme la SGP, dans un communiqué.
Mais le maître d’ouvrage se veut rassurant : il rappelle avoir identifié ce risque, et travailler "à l'ordonnancement de ses calendriers d'appels d'offres, en lien avec les fédérations professionnelles et avec les entreprises".
Ce risque de surchauffe n’est pas le seul écueil identifié par PwC. Le cabinet de conseil s'inquiète aussi de "la désignation tardive de l'opérateur de transport", qui doit être choisi par Ile-de-France Mobilités, l'organisation régionale des transports. "Une réflexion partenariale est amorcée et doit être renforcée pour imaginer le dispositif permettant d'anticiper les besoins des futurs opérateurs dans la conception", approuve la SGP.
Ligne 15 Sud et 15 Est : interopérabilité maintenue
Lors de cette même séance, le conseil de surveillance s’est prononcé sur un point très attendu par les collectivités locales : il a décidé de maintenir l’interopérabilité des lignes 15 Sud et 15 Est en gare de Champigny-sur-Centre (Val-de-Marne), qui feront l'objet de marchés de conception-réalisation.
Ce dispositif permettra un passage direct des trains entre le tronçon Est (Saint-Denis Pleyel/Champigny Centre) et le tronçon Sud (Pont de Sèvres Noisy-Champs via Champigny Centre) grâce à un échangeur. Ce qui évite ainsi toute rupture de charge aux voyageurs.
Suite à la demande du Premier ministre d’optimiser le coût global du Grand Paris Express, la Société du Grand Paris (SGP) avait étudié la possibilité de ne plus assurer cette interopérabilité en supprimant l’un des deux ouvrages d’entonnement prévus, ce qui aurait permis de réaliser une économie de 127 millions d’euros.
Concertation
Devant l’opposition des élus concernés et du syndicat Ile-de-France Mobilités, le maître d’ouvrage du métro automatique a lancé au printemps dernier une concertation sous l’égide d’un garant indépendant.
Les débats ont porté sur trois sujets principaux : la bonne connaissance et l’acceptation par les parties prenantes des impacts que ces investissements vont générer dans la commune de Champigny ; l’impact en termes de qualité de service et de fréquence de desserte des territoires et la robustesse de l’exploitation », précise la SGP dans un communiqué.
Craintes des territoires
Ces échanges « ayant fait émerger des craintes des territoires de ne pas voir la ligne 15 Est réalisé dans son intégralité et selon le calendrier attendu », le conseil de surveillance a décidé de « poursuivre la réalisation de la ligne 15 Est en intégrant dans son programme d’investissement la réalisation de l’ensemble des infrastructures nécessaires à l’interopérabilité », indique la SGP dans un communiqué.
Les élus des territoires desservis se félicitent de cette décision. « En tant que président d’Est Ensemble et de l’association de promotion de la ligne 15 Est, je salue cette décision de raison, tout en regrettant ces longs mois de polémique qui auraient pu et dû être évités si la SGP s’en était tenue à ses engagements initiaux. Nous n’avons pas de temps à perdre ! », déclare Gérard Cosme.
Les élus demandent plus de moyens pour la SGP
De son côté, Christian Favier, président du conseil départemental du Val-de-Marne, insiste sur « les travaux d’Ile-de-France Mobilités et le rapport rédigé par Pascal Auzannet [qui] ont démontré sans ambiguïté la pertinence de l’interopérabilité ».
Le patron du Val-de-Marne souhaite désormais « que les moyens humains et financiers soient accordés à la Société du Grand Paris pour réaliser ce grand chantier dans les meilleures conditions ».
Selon l’élu, des échanges sont en cours pour que des moyens nouveaux soient accordés à la SGP dans le cadre du projet de loi de finances pour 2020. « Il est extrêmement important qu’ils soient à la hauteur pour sécuriser au mieux le projet. J’ai soumis plusieurs propositions au conseil de surveillance pour y parvenir », insiste Christian Favier.