«En 2023 et 2024, les promoteurs seront sous les 100 000 réservations par an», Alain Tourdjman (BPCE)

Remontée des taux, hausse des coûts de construction... Le délai d’écoulement des logements neufs s’allonge. Pour Alain Tourdjman, directeur des études du groupe BPCE, les promoteurs doivent urgemment revoir leur modèle de production pour que leurs produits restent abordables.

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Conjoncture, ciel sombre, grue, chantier, logement, Asnières (Hauts-de-Seine) novembre 2021
Le ciel au-dessus des promoteurs ne devrait pas s’éclaircir avant 2025, selon le groupe BPCE.

Dans la métropole de Nantes, il fallait 17,2 mois au quatrième 2022 pour vendre un programme de logements neufs, contre 13,8 mois sur la même période un an plus tôt selon la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI). En Ile-de-France : 14,7 mois, contre 10 mois au T4 2021. Pourquoi cet allongement du délai d’écoulement ?

Comme en 2008-2009, le délai d’écoulement moyen à l’échelle nationale est aujourd’hui de 15 mois en raison de l’insolvabilité des clients particuliers du fait de la hausse des taux, alors que les promoteurs avaient déjà du mal à reconstituer leur stock, sur fond de pénurie de fonciers et de ralentissement des mises en vente depuis 2019. Dans le même temps, la profession doit utiliser plus de matériaux biosourcés, de charpentes bois, de béton bas carbone… pour respecter la RE 2020, ce qui renchérit les coûts de construction et donc les prix finaux. Il y a un fort besoin de R&D pour créer de nouveaux modèles de production et baisser ces coûts, à travers la construction hors-site par exemple. C’est à ce moment-là que les promoteurs pourront répondre à cette injonction contradictoire : faire beaucoup mieux mais pas plus cher, car les clients ne pourront plus acheter.

Des territoires sont-ils plus concernés que d’autres par l’allongement des délais de vente ?

C’est dans les zones B2 et C que nous observons une plus forte hausse des logements neufs à vendre. Ce sont des territoires où le foncier est moins cher, car les promoteurs y ont fait le pari de rééquilibrer leur offre impactée par la cherté du foncier dans d’autres secteurs et par la hausse des coûts. Finalement, cette stratégie peine à fonctionner, puisque les réservations ne suivent pas. Quasiment partout le foncier demeure très fragmenté, souvent privé, donc difficile à négocier. Et les autorisations de mises en chantier tombent au compte-goutte. Pour un promoteur régional implanté à Nantes, cela suppose de trouver une production ailleurs. Sauf qu’il faudrait plusieurs villes comme Angers pour compenser le déficit car les professionnels se plaignent d’un ralentissement des autorisations à Nantes comme à Rennes.

Combien de temps faudra-t-il à la profession pour se relever ?

Nous prévoyons une réduction des ventes en 2023 et 2024. Les promoteurs seront sous les 100 000 réservations par an, autour de 95 000 selon nos prévisions, en raison du manque d’offre et des difficultés de financement des ménages, contre environ 130 000 entre 2016 et 2019. La production sera très faible jusque 2024, le temps que les promoteurs se réinventent, par exemple en pivotant vers la rénovation comme le font certains constructeurs de maisons individuelles. D’ici là le déficit de logements sera plus important, et il pourrait y avoir un redémarrage de l’activité en 2025. Mais cela dépend de la manne publique, qui ne pourra peut-être pas à la fois relancer la construction et soutenir la rénovation et l’investissement locatif.

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