« Le DPE n’est pas fiable », a lancé Frédéric Mirabel-Chambaud, président de Les Diagnostiqueurs indépendants (LDI), association nationale mise en sommeil faute d’adhérents bénévoles.
L’entrepreneur ardéchois a été entendu le 13 avril dans le cadre d’une commission d’enquête du Sénat (présidée par la LR Dominique Estrosi-Sassone) sur le diagnostic de performance énergétique (DPE), opposable depuis juillet 2021 mais pointé du doigt pour son manque de fiabilité.
Contexte : l’hétérogénéité des DPE pour un même bien a été dénoncée ces derniers mois par les associations 60 millions de consommateurs et UFC-Que Choisir et l’entreprise de conseils énergétiques HelloWatt.
« Le logiciel est à côté de la plaque »
Sans langue de bois, Frédéric Mirabel-Chambaud a rappelé que chaque jeudi après-midi, depuis la pandémie, les fédérations professionnelles, les éditeurs de logiciels et la Direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP) se retrouvent en visio. Objectif : « améliorer ce DPE car sur de petits logements de 10 ou 15 m² et de grandes maisons de 700 ou 800 m², le logiciel est à côté de la plaque et les résultats sont aberrants », a-t-il pointé
« Les petites surfaces en dernier étage et au rez-de-chaussée sont pénalisées », a confirmé Lionel Janot, son homologue de la Fédération interprofessionnelle du diagnostic immobilier (Fidi), regroupant 1500 professionnels.
Autre problème : la non-prise en compte du patrimoine. « Le bâtiment du Sénat est magnifique », mais les conclusions du DPE actuel suggèreraient de le raser, a observé Frédéric Mirabel-Chambaud. Et l’haussmanien parisien ? « Il faudrait une hauteur sous plafond de 2 mètres 50 et une isolation thermique par l’extérieur » pour suivre à la lettre les recommandations du DPE, a-t-il relevé. Idem sur « les maisons traditionnelles avec un mur en pierre de taille » qui ne mérite pas d’être caché par du « Placo isolant ».
Bientôt un diplôme d’Etat ?
Ses confrères également présents se sont montrés moins critiques. Parmi eux, Yannick Ainouche, président de la Chambre des diagnostiqueurs immobiliers (CDI) de la Fédération nationale de l’immobilier (Fnaim), représentant 1 600 professionnels.
« Bras armé de la politique publique de rénovation énergétique », la filière est « une profession de reconvertis dont la formation assez légère permet d’être certifié », a-t-il remarqué, avant de lister les mesures à mettre en place pour professionnaliser les troupes : création d’une convention collective, d’un diplôme d’Etat, d’un budget de formation continue et « des sanctions », car « certains confrères ne sont pas au rendez-vous ».
« Une infime minorité » qui fait les choux gras de « la presse à scandale », a complété Jean-Christophe Protais, président du Syndicat interprofessionnel du diagnostic immobilier, de l’analyse et de la numérisation de l’existant (Sidiane), qui revendique plus de 2000 professionnels.
Plus de 1000 emplois à pourvoir
Portée en partie par les propriétaires bailleurs qui souhaitent améliorer l’étiquette de leur logement énergivore visé par des interdictions de hausse de loyer et de mise en location, la demande croit plus vite que les effectifs des sociétés indépendantes de la filière. Il « manque plus de 1000 collègues, peut-être 2000 » à l’échelle nationale, a estimé Yannick Ainouche. La France compte 7500 diagnostiqueurs, selon le ministère du Logement.
Début avril, le ministre Olivier Klein a promis un « renforcement de la formation initiale » avec « un nombre d’heures (qui) reste à fixer », ainsi qu’une intensification des contrôles de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF).
Co-construites avec les professionnels, ces mesures contenues dans une feuille de route en cours d’élaboration supposent de réviser l’arrêté encadrant la certification. « D’ici cet été », selon le ministère. « D’ici septembre », d’après Jean-Christophe Protais.