De l'eau potable à l'eau de pluie, des marchés d'avenir pour le négoce

En plus du renouvellement des réseaux d'adduction d'eau potable (AEP), qui constitue un marché de long terme, les négociants s'intéressent à l'eau de pluie, amenée à avoir des usages de plus en plus nombreux.

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Le négoce se rue vers l'eau. Le nécessaire renouvellement du réseau d'AEP constitue un marché au long cours, sur lequel des investissements publics réguliers, nationaux comme locaux, sont faits pour réduire les pertes en eau potable et préserver la ressource. « Les pertes annuelles du réseau sont équivalentes au volume du lac d'Annecy », annonce Édouard Chabert, directeur marketing et commercial grands comptes de Frans Bonhomme.

Plusieurs enseignes se sont organisées. « Pum compte aujourd'hui une vingtaine d'agences spécialisées, dont certaines ne font que ça », souligne Sibylle Daunis, DG de l'enseigne. La spécialisation en AEP demande un travail de fond sur l'offre. Côté produits, les négociants ne se contentent plus des canalisations. « Nous proposons, chez Christaud comme chez Billmat, toutes les technologies de recherche de fuites, de communication de gestion autonome de l'énergie. L'approche ressemble à celle de la fourniture industrielle », explique Christian Rossi, directeur d'activité TP-AEP du Groupe Samse. Puisque les produits sont plus complexes, le service doit lui aussi être à la hauteur. « Dans notre agence de Cournon-d'Auvergne, nous avons des astreintes, mais d'autres le font de manière moins formalisée », détaille Sibylle Daunis. Christaud se voit comme l'urgentiste des réseaux d'eau, avec sa trentaine d'agences AEP. « Nous disposons de plus de 9 M€ de stock pour l'AEP, avec des diamètres allant jusqu'à 300 mm », expose Christian Rossi. Cela permet de fournir la bonne pièce en cas de problème sur une canalisation à toute heure, puisque les équipes de Christaud organisent des astreintes les soirs et les week-ends. Chez Frans Bonhomme, le digital prend le relais d'un maillage de 170 agences spécialisées en AEP.

Mais les négociants regardent au-delà de l'adduction d'eau potable, conscients qu'une partie du marché de demain se joue avec les eaux pluviales. « La croissance sur le segment des bâtiments privés est à deux chiffres », précise Édouard Chabert. Quelques freins subsistent malgré tout. « La logique voudrait qu'on produise moins d'eau potable, et qu'on la remplace par de l'eau de pluie pour l'arrosage des parcs et jardins, le lavage », détaille Christian Rossi. Toutefois, la fiscalité est basée sur les volumes d'eau consommés. Ainsi, une baisse de l'eau potable entraînerait une perte de ressources pour l'entretien des réseaux.

Moustiques et bactéries

De plus, une petite musique monte sur la sécurité sanitaire, vécue comme un frein à la récupération des eaux pluviales. L'apparition de moustiques et de bactéries inquiète.

« La filière de contrôle de l'assainissement non collectif s'est construite avec les Spanc, poursuit Christian Rossi. Il n'y a rien de tel sur l'eau de pluie. » Malgré ces irritants qui freinent le marché, plusieurs acteurs pressentent qu'il y aura un marché considérable, dans les années à venir, pour stocker l'eau de pluie dans de bonnes conditions.

« J'identifie trois enjeux autour de l'eau de pluie, complète Sibylle Daunis. Il faut tout d'abord la capter au maximum au plus près de son point de chute, sur les toits bien sûr mais aussi sur les routes. Cependant, en voirie, elle se charge en hydrocarbures. Il faut donc, et c'est le deuxième enjeu, la dépolluer. Enfin, il faut s'en servir pour le jardin, la voiture, mais aussi pour les toilettes ou le lavage du linge, ce qui est autorisé aujourd'hui mais encore trop peu pratiqué. »

Mutualiser les traitements

« Plusieurs collectivités s'intéressent de près à l'eau de pluie, notamment dans les grandes agglomérations », explique Édouard Chabert. Des solutions pourraient être développées à l'échelle du quartier pour mutualiser les cuves, mais surtout les traitements. La multiplication des périodes de sécheresse devrait conduire les pouvoirs publics, dans les années qui viennent, à restreindre certains usages. Ne vaudrait-il pas mieux filtrer et chlorer l'eau de pluie pour alimenter la piscine que d'utiliser l'eau potable ? La question dépasse d'ailleurs le champ des maisons individuelles. « Le monde agricole commence à percevoir l'eau de pluie comme une ressource », ajoute Sibylle Daunis. Utiliser les toits des bâtiments agricoles ou des systèmes de drainage pour alimenter des cuves en série, installer des sondes qui activent l'arrosage en cas de faible hygrométrie : toute une ingénierie se développe. Dans la ville ou dans les champs, sur les routes ou sur les toits, les marchés de l'eau de pluie pourraient bien irriguer la croissance des acteurs spécialisés dans la décennie qui s'ouvre.

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