Logement
Le PTZ sans restriction géographique fait l’unanimité
FFB, Procivis, Unsfa, USH… Les dix membres de l’Alliance pour le logement se disent satisfaits de quatre dispositions actées dans le cadre de la CMP du PLF 2025.
Commençons par une mesure phare reprise par le gouvernement Bayrou : la « restauration d’un prêt à taux zéro (PTZ) facilitant l’accession à un logement neuf individuel ou collectif pour les primo-accédants, sur tout le territoire », écrivent-ils dans un communiqué commun, le 4 février. Cet élargissement pourrait intervenir au plus tôt à partir du 1er avril.
En 2024, le dispositif avait été recentré -au grand dam des CMistes- sur les appartements neufs en zones dites tendues : A, Abis et B1. Dans l’ancien, il ciblait les logements des zones détendues (B2 et C), sous condition d’une rénovation énergétique. Avec le texte de la CMP adopté, ce sera toujours le cas cette année, en plus du neuf.
Le nombre de PTZ émis baisse chaque année depuis 2021, passant de 73 000 à 45 000 en 2024, alors que la rapide hausse des taux de mi-2022 à mi-2023 a rendu le dispositif à nouveau intéressant pour les ménages éligibles. Ils étaient 29 millions l’an dernier.
Baisse de la RLS : une première étape
Egalement souhaitée par l’ancien exécutif, la baisse de 200M€ de la Réduction de loyer de solidarité (RLS) représente une autre petite victoire pour les acteurs de la filière. Elle est considérée par les bailleurs sociaux -les premiers concernés- comme une première étape avant sa suppression qu’ils réclament au nom du financement de leurs projets de construction et de rénovation.
Concrètement, la ponction par l’Etat de 1,3Md€ sur leur chiffre d’affaires global 2024 doit passer à 1,1Md€ en 2025. « Cette réduction de la RLS permettra d’accroître la production et la rénovation des logements sociaux, ce qu’une feuille de route partagée entre le secteur du logement social et l’Etat matérialisera rapidement »,
a annoncé le ministère du Logement le 3 février.
MaPrimeRénov’ : une stabilité bienvenue
L’Alliance pour le logement se félicite également de « la stabilité du budget dédié à MaPrimRénov’ ». Le principal dispositif de soutien à la rénovation énergétique est confirmé dans ses paramètres actuels suite au décret de décembre 2024 : les ménages peuvent aussi bien financer une rénovation d’ampleur qu’un seul geste.
« Cela se traduit par le maintien du montant de 2,3Md€ d’autorisations d’engagements (les engagements financiers qui permettent de financer les nouveaux projets de rénovation), sans diminution par rapport au texte déposé en octobre 2024 », rappelle le ministère du Logement.
Détail important : la CMP a retenu une réduction des crédits de paiement qui s’appuierait notamment sur des avances accordées aux ménages et la réserve budgétaire de l’Anah. « Cette réduction ne ralentira pas le rythme des rénovations, ni celui des paiements, une fois la loi de finances adoptée. Si le PLF n’était pas adopté, l’absence de paiements des dossiers pas encore validés se poursuivrait, même si le ministère met tout en œuvre pour instruire les dossiers déposés », explique encore le ministère du Logement.
En matière de rénovation toujours, citons également la prorogation jusqu’en 2027 de Loc’Avantages qui exclut les passoires thermiques, dont les plus mauvaises (étiquetées G) ne peuvent plus être mises en location depuis le 1er janvier. Le dispositif a pris fin à cette date également, faute de budget de l’Etat pour cette année. Celui-ci permettait aux propriétaires bailleurs de bénéficier d’une réduction d’impôt s’ils louaient leur bien, affichant une note comprise entre A et E, à un montant inférieur aux loyers du marché local. En complément, l’Anah pouvait leur verser des aides à la rénovation énergétique.
Ajoutons que l’article 24 sexies sur l’évolution du dispositif Denormandie a été supprimé par la CMP. Les contours de cette autre incitation fiscale dédiée aux investisseurs locatifs qui rénovent leur logement n’est donc pas modifié par le PLF 2025. Son échéance est maintenue à fin 2027.
Enfin, si elle salue « l’exonération temporaire des donations à hauteur de 300 000€ maximum par donataire en vue de la construction ou de l’acquisition d’une résidence principale », au nom de la relance du neuf notamment, l’Alliance ne mentionne pas l’enveloppe de 100M€ dédiée aux « maires bâtisseurs », que François Bayrou a promise. Une mesure « anecdotique », selon la FPI, qui milite pour le fléchage d’une partie de la TVA immobilière vers ces élus densificateurs. « Ces logements réalisés en plus grâce à cette incitation financière rapporteront à l’Etat et aux communes : mieux vaut-il obtenir 50% de quelque chose que 100% de rien », explique la fédération.
Droits de mutation : mesure crispante pour le logement
D'autre part, une disposition crispe les promoteurs et les autres métiers du secteur : la possibilité d’augmenter de 0,5 point les droits de mutation à titre onéreux (DMTO). L’idée du gouvernement Barnier reprise par celui de Bayrou est de donner de l’air aux collectivités. En particulier les départements qui les collectent et les perçoivent en partie. Ceux-ci sont affectés par la baisse des transactions immobilières depuis 2021. Une année record à plus de 1,1 million d’opérations enregistrées par les notaires.
Comme promis par l’actuel gouvernement, les primo-accédants ne sont pas concernés, mais les secundo-accédants ou les investisseurs locatifs qui achètent un logement neuf n’y échapperont pas, contrairement à ce qui avait été annoncé par celui-ci. Cette augmentation pourrait se traduire pour les acquéreurs par « 500 à 1 000€ en plus pour l’achat d’un bien immobilier de 200 000€, selon les territoires », avait estimé Catherine Vautrin, ex-ministre du Partenariat avec les territoires, en novembre dernier.
Parmi les autres mesures qui concernent les acteurs du logement, citons la hausse évitée des cotisations des organismes HLM à la Caisse de Garantie du Logement Locatif Social (CGLLS). Un établissement public qui garantit leurs prêts accordés par la Caisse des dépôts et les aide en cas de difficultés financières. Le Sénat a adopté un amendement qui maintient cet effort annuel à 75M€, car le Fonds National des Aides à la Pierre (FNAP) était financé pour 2025. « Cela représente une économie de 300M€ pour les bailleurs sociaux, calcule le ministère du Logement. Si le PLF n’était pas adopté, les cotisations CGLLS devront augmenter car en l’absence de texte, c’est le montant de 375 M€ qui doit être prélevé. »
Renouvellement urbain : un soutien confirmé
En outre, le ministère souligne son « soutien confirmé pour le renouvellement urbain ». L’Anru, dont le nouveau président est l’ex-ministre Patrice Vergriete, bénéficierait d’un abondement de 50M€, comme voté par le Sénat et déjà prévu fin 2024.
Enfin, le ministère réaffirme son « engagement pour le renouveau du bassin minier ». Un programme baptisé ERBM. Les 17M€ promis en novembre dernier par la ministre du Logement Valérie Létard, par ailleurs élue de la région, pour l’aménagement de ce territoire ainsi que les 8M€ fléchés sur la rénovation du parc social au sein de celui-ci restent d’actualité. « Si le PLF n’était pas adopté, cet abondement ne serait pas mis en place, compromettant les rénovations énergétiques et les engagements de travaux par des bailleurs sociaux », avertit le ministère du Logement.
Collectivités
Fonds de garantie à 1 Md€ : ça ne passe toujours pas
« Pour l’essentiel, la commission mixte paritaire a entériné les orientations prises cet automne au Sénat ». L’analyse de Yann Doyen, directeur de l’Agence France Locale, à propos des dispositions de la loi de finances relatives aux budgets publics locaux, s’applique à la mesure qui les touche le plus directement : le « fonds de garantie » s’élèvera à 1Md€ prélevé sur 2000 budgets de fonctionnement.
Dans sa première version, le budget Barnier prévoyait 3Mds€ partagés entre 400 collectivités. Mais même à 1Md€ au lieu de 3 et avec une assiette élargie, ce fonds de garantie continue à susciter l’opposition unanime des élus locaux. Ils dénoncent aussi le maintien du gel de la TVA, considéré comme un non-respect de l’engagement à la compensation intégrale des pertes fiscales (voir plus bas).
Le Fonds vert moins ponctionné que redouté
A 1,037Md€ au lieu des 2,5Mds€ annoncés au printemps dernier par l’ancien ministre de la Cohésion des territoires Christophe Béchu, le fonds vert atterrit lui aussi à un niveau proche de celui qu’avaient approuvé les sénateurs. La loi de finances confirme également le gel de la TVA, avec son impact d’1,2Md€. L’Etat maintient comme prévu ses dotations, en dehors d’un effet de vase communicant au profit de la dotation globale de fonctionnement et au détriment de la dotation de soutien à l’investissement local.
La principale nouveauté réside dans l’abandon de la réduction du taux de compensation du fonds de compensation de la TVA. Grâce à son maintien à 16,4%, au lieu des 14,85% envisagés dans le budget Barnier y compris après sa première au Sénat, les collectivités récupèrent 800M€ directement rattachés à leur budget d’investissement.
Coup de Jarnac pour les employeurs territoriaux
Cette relativement bonne nouvelle trouve son contrepoint non pas dans la loi de finances, mais dans le décret du 30 janvier qui augmente de trois points les cotisations de retraite imposées aux employeurs territoriaux et hospitaliers. L’impact sur les budgets locaux atteint 1,2Md€, selon l’association des maires de France (AMF).
Même si elle « prend acte » de l’allégement du fonds de réserve, cette dernière ne varie pas dans son opposition de principe : « Maintenir les restrictions reste une erreur stratégique et financière. En effet, les projets locaux, déjà largement engagés, nécessiteront le recours à l’emprunt pour compenser les pertes de ressources, ce qui dégradera les comptes publics ».
Les maires redoutent la dette grise
L’AMF chiffre les pertes imputables au gouvernement Bayrou à un total de plus de 6Mds€. Outre les dispositions du PLF qui visent directement les collectivités, l’estimation intègre les ponctions sur la caisse de retraite des fonctionnaires territoriaux et plusieurs autres mesures touchant à la fiscalité, aux moyens des agences de l’eau, à des fonds de soutien réduits pour la petite enfance ainsi qu’à l’amputation des moyens de l’Agence nationale du sport.
« Ces 6Mds€ correspondent au besoin d’investissements sur les routes », calcule Nathalie Brodin, responsable financière de l’AMF. Elle rappelle les immenses défis qui s’imposent aux communes : entretien de 120 000 ponts, réparation des digues léguées par l’Etat, compensation du recul du trait de côte... « L’accumulation de la dette grise finira par nous coûter plus cher que le remboursement des déficits publics », s’alarme la responsable financière.
Les intercommunalités saluent l’élargissement
D’accord avec le diagnostic, lntercommunalités de France encaisse d’autant plus difficilement le choc que beaucoup d’investissements nécessaires à la transition écologique reposent sur ses membres, en particulier dans les infrastructures de transport, l’eau et la gestion des déchets. L’association remercie pourtant les députés et sénateurs d’être sortis de la stigmatisation des collectivités à gros budgets.
« Ils ont compris que la taille ne constitue pas un indicateur de richesse », salue Nicolas Laroche, chargé des finances. « L’élargissement de l’assiette de prélèvement du fonds de réserve va plutôt dans la bonne direction », ajoute-t-il. En revanche, l’association regrette que le gouvernement s’obstine à sortir le Fonds de réserve des comptes des collectivités, ouvrant la voie à des péréquations décidées d’en haut, voire à une confiscation par Bercy.
L’emprunt, variable d’ajustement
Mais après avoir plaidé pour la conclusion du débat budgétaire, Intercommunalités de France relativise l’impact du PLF sur les investissements intercommunaux : « La plupart des projets des collectivités vont se réaliser, car ils n’obéissent pas au rythme annuel des budgets. Mais il faudrait éviter de reconduire les restrictions actuelles au-delà de 2025 », espère Nicolas Laroche.
Alors que le renouvellement municipal interviendra en 2026, Yann Doyen s’interroge : « Que veut l’Etat » ? Selon lui, « le recours à l’emprunt servira de variable d’ajustement, à l’inverse des objectifs affichés ». Le directeur des engagements de l’AFL redoute la dégradation des comptes des collectivités, sans percevoir d’effets vertueux pour les finances publiques de la France.
La TVA gelée ne passe pas
De leur côté, les départements ne digèrent toujours pas la part relative qui leur incombe dans le fonds de réserve, soit 40% de l’effort. Ils dénoncent surtout la confirmation de la mesure qu’ils considèrent comme « la plus pernicieuse » : le gel de la TVA. Cet arbitrage les prive « de la dynamique de leur principale ressource, qui leur a pourtant été historiquement présentée comme une compensation face à la perte de recettes fiscales engendrée par le transfert du foncier bâti au bloc communal », s’étrangle l’Assemblée des départements de France.
Départements au bord de la banqueroute
Certes, l’association présidée par François Sauvadet reconnaît que « la possibilité d’augmenter temporairement le plafond des droits de mutation (DMTO) de 0,5 point maximum devrait permettre à certains départements d’absorber en partie ce énième choc budgétaire ». Mais elle relativise l’impact de cette mesure qui exclut les primo-accédants. A l’AFL, Yann Doyen pointe « un renforcement de la dépendance des départements à une recette cyclique », avant d’ajouter : « Ce n’est pas une bonne réponse à moyen terme ».
En l’absence de soutien de l’Etat, les départements qui connaissent les plus grandes difficultés pourront-ils passer sans encombre l’année 2025 ? Non, répond l’association. Les plus fragiles de ses membres « ne seront sans doute pas en mesure de boucler leur budget, actant ainsi une forme de « cessation de paiement » dont les populations et les services publics seront les premières victimes ». Le diagnostic de « grande fragilité » concerne le tiers des départements. Ces derniers ont perdu les trois quarts de leur épargne brute depuis 2022, rappelle l’AFL.
Mobilités : le versement de la discorde
Dans les derniers jours avant la réunion de la commission mixte paritaire, le bras de fer entre le gouvernement et les régions sur le versement mobilités a tourné à l’avantage des secondes, soutenues par la prise de position d’Alain Grizaud, président de la Fédération nationale des TP. Au lieu des 0,2% défendus avec succès, à l’automne dernier, par Philippe Tabarot, alors rapporteur du budget des Transports au Sénat, la taxe pourra s’appliquer avec un taux maximal de 0,15%.
Cet épisode aura créé une pomme de discorde entre collectivités : également habilités à prélever le versement mobilités, les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) dotés du statut d’autorité organisatrice dénoncent un nouveau prélèvement sur une ressource en tension, régulièrement fragilisée par de nombreuses critiques.
Des besoins immenses
L’association regrette un coup d’épée dans l’eau, par rapport à l’ampleur des besoins : « Nos estimations tournent autour de 500 à 700M€ de recettes supplémentaires pour les régions, un chiffre très en deçà des enjeux financiers des projets. La mesure crée une concurrence entre collectivités sans garantir le financement de ces derniers », se désole Nicolas Laroche.
De son côté, l’association Objectif RER métropolitains salue une « première avancée ». Mais son porte-parole Jean-Claude Degand « regrette que les associations d’élus aient joué à Paris les unes contre les autres, alors que les projets des territoires nécessitent des consensus interacteurs et transpartisans ». Affaire à suivre.
Energie et Climat
Le fonds chaleur malgré tout
« Au milieu du marasme on a sauvé l’essentiel du Fonds chaleur ». Le soulagement teinté d'amertume de Nicolas Garnier délégué général de l'association Amorce dit tout de l'état d'esprit du secteur de l'énergie, par ailleurs en attente de la publication de la PPE 3 (voir plus bas).
Alors que les crédits dédiés à la mission « écologie » ont été rognés de 1,3Md€, le fonds destiné au développement des projets de chaleur renouvelable a été maintenu au niveau de 2024 soit 820M€. « Mais les besoins sont estimés à 1,5Md€ », rappelle Pascal Guillaume, président de la Fédération des services énergie environnement (Fedene) lors de la Journée nationale de la chaleur et du froid renouvelables, le 4 février. « Il faut donc que les 820M€ soient disponibles sur 2025. Comment les utiliser au mieux ? C'est tout le travail de l’Ademe pour doser finement le niveau de soutien et la sélection des projets », souligne-t-il.
La mystérieuse disparition du Fonds territorial climat
Votée contre l'avis du gouvernement et maintenue dans la version de la CMP, la création d’un fonds « climat territorial » doté de 200 millions d’euros « encore dans les tuyaux lundi 3 février au soir », selon Nicolas Garnier, a tout bonnement disparu. Ce fonds allouait aux collectivités ayant élaboré un PCAET, 4€ par habitant pour développer l’ingénierie nécessaire pour mettre en œuvre leur programmation écologique.
La PPE 3 au printemps ?
Présente pour une table ronde sur la planification territoriale du développement de la chaleur renouvelable, la Directrice générale de l'énergie et du climat, Sophie Mourlon, a affirmé l'objectif de voir publiée la future programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) dans les prochaines semaines. « Mon rêve est de la voir validée au moment grandes marées d’équinoxe », a-t-elle plaisanté. Soit fin mars.