Interview

Après Bayrou : « Tout sera conditionné par notre capacité à retrouver une stabilité politique », Alain Grizaud (FNTP)

Simplification de la commande publique, sécurisation et financement des projets d’infrastructures… Le président de la FNTP espère que les textes en préparation sous le gouvernement démissionnaire ne seront pas abandonnés. Il appelle, d’ores et déjà, le futur exécutif à redonner de la visibilité aux collectivités pour ne pas voir l’investissement local s’effondrer, alors que les élections municipales se profilent.

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Alain Grizaud FNTP
Alain Grizaud, président de la Fédération nationale des travaux publics (FNTP)

La loi de validation de l’A69 censée sécuriser les grands projets d’infrastructures devait être votée à la rentrée. Craignez-vous que l’absence de gouvernement ne mette en péril l’avenir de ce chantier autoroutier contesté ?

Concernant l’A69 dont le chantier a repris, je ne suis pas spécialement inquiet. En février dernier, la juge qui avait cassé la RIIPM [raison impérative d’intérêt public majeur, NDLR] s’était prononcée sur l’intérêt du projet et non pas sur le fond. Je fais confiance à la justice administrative, qui se prononcera en novembre, pour confirmer en appel la décision du juge des référés de surseoir à l’exécution de la décision du tribunal administratif de Toulouse et de permettre la poursuite des travaux.

Le retour de cette proposition de loi ne vous apparaît donc pas prioritaire ?

J’appelle évidemment à remettre ce texte le plus rapidement possible à l’agenda. Que je sois raisonnablement serein pour l’avenir de l’A69 ne veut pas dire qu’il faille baisser la garde concernant la sécurisation des futurs projets d’infrastructures telle que promettait de le faire la loi de simplification de la vie économique [ou SVE, NDLR]. Pouvoir instruire la RIIPM en même temps que la DUP [déclaration d’utilité publique, NDLR] est crucial pour ensuite instruire rapidement l’autorisation environnementale, notamment pour le déplacement d’espèces protégées. Tout l’enjeu est là si l’on veut raccourcir les délais et réduire le risque de recours avant le lancement d’un chantier.

Quels autres aspects de la loi de simplification de la vie économique vous paraissent déterminants ?

Nous serons particulièrement vigilants à la pérennisation du seuil de 100 000 euros pour les marchés de travaux de gré à gré qui est, pour l’heure, encore prolongée par voie réglementaire. Nous avions également demandé la généralisation des variantes dans les marchés publics. Aujourd’hui, leur utilisation fait l’objet d’une dérogation. Nous désirons inverser cette logique : qu’elles soient autorisées par principe et que leur interdiction soit précisée dans le contrat si ce n’est pas le cas.

La chute du gouvernement Bayrou met-elle en pause les travaux du Conseil d’orientation des infrastructures (COI), dont vous assurez la vice-présidence ?

Le COI n’a pas posé le crayon. Il poursuit la mission qui lui a été confiée, de lister et prioriser les projets d’infrastructures en fonction de leur maturité. Notre planning est chargé pour mener ce travail et en rendre les conclusions d’ici la fin de l’année.

Que va devenir la grande loi cadre de financement des infrastructures souhaitée par le ministre des Transports démissionnaire, Philippe Tabarot ?

Tout est conditionné par la capacité de la France à retrouver une stabilité politique puisqu’une telle loi ne pourrait être votée que dans le cadre d’une programmation budgétaire. Sans Premier ministre, sans gouvernement et sans majorité, la situation n’est pas simple. On peut toujours espérer une approche transpartisane sur ce sujet comme celle qui a présidé au vote de la loi de programmation militaire. Mais encore une fois, ouvrir sereinement ce type de débat suppose d’abord de la stabilité.

Ce chaos politique est-il d’autant plus dommageable qu’il s’ouvre à sept mois d’élections municipales et donc d’un cycle de marché traditionnellement peu porteur pour les travaux publics ?

Mon inquiétude est grandissante car le manque de visibilité des collectivités dégrade l’activité de notre secteur, très dépendant de l’investissement public local. Nos entreprises sont actuellement dans un brouillard épais puisque nos chiffres de juillet font état d’une baisse significative des prises de commandes. Or, entre la prise de commandes et la réalisation des travaux, le délai peut être de 3 à 6 mois. Notre année 2026 est donc déjà en train d’être impactée avant même de considérer le cycle électoral. Si j’avais un souhait à formuler à l’adresse du futur gouvernement, ce serait qu’il donne une lisibilité forte aux collectivités pour qu’elles ne stoppent pas l’investissement local. Notre fédération, et nos fédérations régionales, sont à pied d’œuvre dans les territoires pour sensibiliser les maires afin que l’investissement local ne soit pas perçu comme une variable d’ajustement.

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Date de réponse 29/09/2025