Interview

«Une suspension de l’activité de dix jours peut être rattrapable», Olivier Salleron, président de la FFB Nouvelle-Aquitaine

Olivier Salleron a été élu aujourd’hui avec 55 % des voix à la tête de la Fédération française du bâtiment (FFB), face au Breton Hugues Vanel. Président de la FFB Nouvelle-Aquitaine et président de la commission sociale à la fédération, Olivier Salleron est à la tête de trois entreprises (5,8 M€ de chiffre d’affaires en 2019, 40 salariés au total), dont celle de génie climatique Sylvain Salleron implantée à Périgueux (Dordogne). Entretien.

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Olivier Salleron, président de la FFB Nouvelle-Aquitaine, a été élu, le vendredi 20 mars 2020, à la tête de la Fédération française du bâtiment (FFB).

Que représente cette annonce dans la période que nous vivons actuellement ?

Au vu du contexte, je vais être en binôme avec mon président actuel. Ce qui est déjà le cas depuis 10 jours, étant président de la commission sociale, j’ai déjà eu des échanges avec le ministère du Travail. Même chose, dans ma région, avec le président Alain Rousset, la Direccte, la Carsat, l’OPPBTP, l’ordre des architectes, etc. Je suis prêt. Mon expérience sociale de la négociation et ma présidence en Nouvelle-Aquitaine me servent beaucoup pour ce nouveau poste.

Quelles seront vos priorités lors de votre prise de poste, le 12 juin prochain ?

Il y a le report des charges et cotisations, des lissages sur les mois suivants… Peut-être qu’exceptionnellement, on pourra faire des demandes d’exonération totale pour les entreprises qui ont vraiment souffert — pour leur donner plus d’oxygène — demander des taux préférentiels à la BPI et se battre pour obtenir des marchés. Inciter les maîtres d’ouvrage à lancer des appels d’offres sur toute l’année et peut-être que l’on prendra moins de congés en août pour rattraper le chiffre. Une suspension de l’activité de 10 jours peut être rattrapable.

« Il faut mettre un protocole en place »

Quels seront les autres axes de votre feuille de route ?

Restaurer les marges, développer l’organisation du BIM et du lean sur les chantiers — même les petits —, lutter contre le travail illégal pour que les prix cessent de stagner à des niveaux bas, la formation des jeunes et des personnes qui veulent se réorienter ou se réinsérer. Il faut attirer les jeunes pour leur montrer que les métiers du bâtiment sont innovants : BIM, exosquelettes, maquette numérique, etc. Créons un « Top chef de chantier » ou le « Meilleur plombier de France » ! Je veux créer une grande direction de la communication au sein de la FFB. Et, en interne, nous devons mettre en valeur ces unions et syndicats de métiers que nous avons au sein de la fédération. En Nouvelle-Aquitaine, j’ai fait beaucoup d’expérimentations de chantier sur ces axes et je souhaiterais mettre cela en application au plus haut niveau.

Comment la fédération gère-t-elle l’impasse dans laquelle se trouvent aujourd’hui les entreprises du bâtiment, en raison de la pandémie ?

Toutes les deux heures, il y a des annonces et contre-annonces… La réunion que nous souhaitions avec la FNTP, la Capeb et les ministres concernés devrait avoir lieu d’ici mardi soir pour envisager une reprise du travail dans les meilleures conditions pour nos employés. On a du travail, des commandes, il fait beau… On préfère bosser et mettre nos salariés sur les chantiers.

Comment pouvez-vous assurer aux salariés que toutes les mesures seront prises pour les protéger en cas de reprise du travail ?

Il faut mettre un protocole en place : savoir quels chantiers seront accessibles facilement en mettant autour de la table les entreprises, les maîtres d’ouvrage, les maîtres d’œuvre et SPS… Les architectes sont aussi concernés, car si tout est bloqué, les APD ne seront pas signés et dans quelques mois, ils n’auront plus de boulot. En trois jours, la grande famille du bâtiment en a pris conscience. Si on doit réintégrer les chantiers — et tout le monde le veut — on doit assurer la sécurité des salariés, savoir dans quelle mesure les fournisseurs travaillent et comment les clients gèrent. Certains maîtres d’ouvrage ont fait des OS de fermeture de chantier, ce qui est très important. Dans le privé, les maîtres d’œuvre nous disent qu’il n’y a plus de réunions de chantier… Même sur les petits chantiers de particuliers, les gens ne veulent pas forcément que des salariés viennent travailler chez eux. C’est la pagaille et ça a touché toutes les entreprises. Dans ces conditions, les boites n’ont pas eu d’autre choix que de fermer. Et comme il y a eu des annonces d’activité partielle facilitée, tout le monde s’est dit « on ne peut plus bosser, donc on s’arrête. » Notre message n’était pas de déserter les chantiers, mais de prendre ses responsabilités et si les salariés n’étaient pas en sécurité, nous ne pouvions pas les laisser aller sur les chantiers car ce sont les patrons qui prennent un risque en cas de problème.

« Il y en a beaucoup qui vont se mettre en arrêt maladie ou prendre des congés »

La demande faite au gouvernement n’est donc plus d’arrêter les chantiers, mais de poursuivre dans de bonnes conditions ?

Si on reprend le travail jeudi prochain, on aura eu nos dix jours d’arrêt. C’était juste le temps d’échanger avec les fournisseurs et les maîtres d’ouvrage.

Et les salariés de vos adhérents, sont-ils d’accord pour reprendre ?

Il y en a beaucoup qui vont se mettre en arrêt maladie ou prendre des congés…. Il est évident que ce sera du cas par cas sur chaque chantier. Si on est obligé de travailler à dix dans 10 m2, il faudra arrêter. En revanche, s’il y a deux ou trois plateaux de 1 000 m2 avec peu de co-activité, que les gars peuvent venir seuls en voiture, ça pourra se faire et on peut faire les réunions de chantier à distance. Avec un bon SPS, ça pourra se régler chantier par chantier.

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