Un regard neuf sur les déchets

Terres excavées -

En Seine-et-Marne, le réemploi de 13 millions de m3 de matériaux redessine une décharge en un parc arboré.

 

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A Villeneuve-sous-Dammartin (Seine-et-Marne), l’oeuvre paysagère « Les Yeux du Ciel » accueillera un labyrinthe végétal, à gauche, et un musée de plein air, à droite (dessin).

Le chantier d'aménagement bat son plein dans l'ancienne gravière de Villeneuve-sous-Dammartin (Seine-et-Marne), devenue en 2014 une installation de stockage de déchets inertes. Dès 2024, le site accueillera « Les Yeux du ciel », une œuvre gigantesque de l'architecte Antoine Grumbach réalisée à partir de terres excavées. Ces deux yeux de 400 m de longueur et 170 m de largeur seront alors livrés au regard des voyageurs atterrissant à l'aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle.

Musée et balade champêtre. Cette pièce de « land art » se composera de deux iris de 4,5 hectares chacun. Pour les rejoindre, une fois achevés les travaux de finition en 2026, il suffira aux visiteurs de traverser, par un chemin, l'exploitation agricole qui occupe la majeure partie du site. L'œil ouest, baptisé Icare, présentera la forme d'un creux pour accueillir un musée en plein air dédié à l'exploration du ciel. Sur la butte en face, l'iris Dédale se décomposera en quatre labyrinthes qui magnifieront les matières vivantes et inertes avec des compositions végétales, en pierres, en terre et en matériaux composites. Enfin, au sud-est du site, l'association d'insertion Equalis exploitera un verger dans un milieu favorable à deux espèces d'oiseaux protégées : la chouette chevêche et de l'œdicnème criard.

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Cette étape artistique préfigure la nouvelle exploitation du lieu. En effet, dès 2026, l'arrêté préfectoral qui autorise le stockage de terre expirera : les 13 millions de mètres cubes accumulés les douze années précédentes ne seront alors plus considérés comme des déchets, l'installation classée pour la protection de l'environnement (ICPE) ayant été transformée en un vaste espace public.

La réglementation sur les déchets garantit la traçabilité des matériaux, désormais considérés comme des ressources.

Pour l'heure, 500 camions y déversent chaque jour des terres excavées provenant d'opérations de construction de logements et de bureaux dans un rayon de 20 km. Un ballet de poids lourds dont le suivi se déroule en trois étapes : vérification des déclarations d'autorisation préalables de chaque client, chantier par chantier ; contrôle visuel lors du déchargement ; et, enfin, surveillance régulière des services de l'Etat. Grâce à leur connais-sance fine de la composition des terres, ce sont les équipes techniques de l'entreprise ECT, maître d'ouvrage et exploitant, qui orientent les camions, pour ajuster le stockage sans engendrer de surcoût.

« Situé à proximité de la gare du Mesnil-Amelot, terminus de la future ligne 17 du Grand Paris Express, notre projet disposera alors de tous les atouts pour devenir une destination à part entière. Il coche toutes les cases, dans notre métier d'aménageur du non bâti », s'enthousiasme Laurent Mogno, président d'ECT.

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Contrainte et chance. Ici, l'économie du projet repose sur la réglementation, qui impose aux maîtres d'ouvrage de financer la gestion des terres excavées, à raison de 15 à 18 euros par tonne : 10 euros pour le transport, le reste finançant le stockage. Une contrainte, mais aussi une chance pour ECT. Détenteur de 60 % du marché francilien des terres excavées, il entend bien s'appuyer sur ce projet pour changer le regard sur son activité.

« Contrairement aux granulats qui reviennent au BTP comme sous-couches routières, la terre ne s'inscrit pas dans l'économie circulaire pour sa valeur marchande. Nous prônons un réemploi d'usage, sociétal et symbolique », explique Antoine Grumbach. La loi sur l'économie circulaire consolide ainsi l'équilibre prôné par ECT : inciter les collectivités à se saisir de l'opportunité de projets, sans perdre les acquis de la traçabilité garantie par le statut de déchet.

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