Solarisation et végétalisation des toits et des parkings : le détail des obligations en vigueur depuis le 1er janvier

Deux ans et demi après l’instauration de l’obligation de solariser et végétaliser les toitures de certains bâtiments et parkings par la loi Climat et résilience, un décret du 18 décembre 2023 visant à rendre opérationnel ce dispositif est enfin publié. Deux arrêtés du 19 décembre ont complété cet arsenal réglementaire. Le premier fixe les caractéristiques que doivent respecter les toitures végétalisées. Le second détaille le pourcentage de toiture devant être couvert par des systèmes de production d'énergies renouvelables ou de végétalisation ; et précise les conditions d'exemption.

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Le dispositif réglementaire en matière de solarisation et végétalisation des toitures et parkings est publié, deux ans et demi après l'adoption de la loi Climat et résilience.

Une publication in extremis pour une entrée en vigueur au 1er janvier 2024. Le décret et les deux arrêtés qui détaillent les exigences fixées par la loi Climat et résilience du 22 août 2021 visant à verdir les toitures de certains bâtiments ainsi que les parkings ont été publiés respectivement les 20 et 29 décembre 2023.

Rappelons que l’article 101 de la loi Climat et résilience a instauré, à l’article L. 171-4 du Code de la construction et de l’habitation (CCH) et à l’article L. 111-19-1 du Code de l’urbanisme (C. urb.), une obligation de végétaliser ou d’installer un procédé de production d’énergie renouvelable, notamment des panneaux photovoltaïques.

Bâtiments et parkings concernés

Cette obligation concerne :

- les constructions des bâtiments ou parties de bâtiment à usage commercial, industriel ou artisanal, à usage d'entrepôt, les hangars non ouverts au public faisant l'objet d'une exploitation commerciale et les constructions de parcs de stationnementcouvertsaccessibles au public, créant plus de 500 mètres carrés d'emprise au sol ;

- les constructions de bâtiments ou parties de bâtiment à usage de bureaux créant plus de 1 000 m² d'emprise au sol.

Pour ces bâtiments, l’obligation s’applique « si au moins la moitié de sa surface de plancher est affectée à un ou plusieurs des usages [commercial, industriel ou artisanal, entrepôt, hangars, bureaux…], indépendamment de l'usage auquel est affectée sa toiture » (nouvel art. R. 171-32 CCH).

Ces obligations s'appliquent également aux extensions et rénovations lourdes de ces bâtiments, ainsi qu'aux aires de stationnement associées « lorsqu'il est procédé à des rénovations lourdes sur ces aires ou à l'occasion de la conclusion d'un nouveau contrat de concession de service public, de prestation de service ou de bail commercial, ou de son renouvellement » (art. L. 171-4 du CCH).

Sont également assujettis :

- les parcs de stationnement extérieurs de plus de 500 m² associés aux bâtiments précités ;

- les nouveauxparcs de stationnement extérieurs ouverts au public de plus de 500 m² ( L. 111-19 du Code de l’urbanisme).

A noter que l’article 101-V de la loi Climat et résilience dispose que l’obligation s’applique également à ces parkings lorsqu'il est procédé à la conclusion d'un nouveau contrat de concession de service public, de prestation de service ou de bail commercial portant sur sa gestion ou son renouvellement.

On relèvera que l’article 40 de la loi du 10 mars 2023 d’accélération de la production d’énergies renouvelables, dite EnR (ou Aper) a également prévu une obligation, au 1er juillet 2023, de solarisation des parcs de stationnement extérieurs existants d'une superficie supérieure à 1 500 m², sur au moins 50 % de leur surface. Le décret d’application est actuellement en cours de rédaction.

Surface à couvrir et caractéristiques des systèmes de végétalisation

L’obligation doit être réalisée en toiture du bâtiment ou sur les ombrières surplombant les aires de stationnement et doit couvrir une surface minimale au moins égale à une proportion de la toiture du bâtiment construit ou rénové de manière lourde et des ombrières créées (art. L. 171-4 III CCH).

L’arrêté du 19 décembre 2023 fixant la proportion de la toiture du bâtiment couverte par un système de végétalisation ou de production d'énergies renouvelables reprend les termes de la loi et précise que l’obligation doit être réalisée sur une surface au moins égale à 30 % de la surface de toiture du bâtiment construit ou rénové à compter du 1er janvier 2024, à 40 % à compter du 1er juillet 2026, et à 50 % à compter du 1er juillet 2027.

Le second arrêté du 19 décembre vient quant à lui fixer les caractéristiques minimales que doivent respecter les systèmes de végétalisation installés en toiture des bâtiments concernés par l’obligation. Selon la notice du texte, elles « portent sur l'épaisseur de substrat, la capacité de rétention en eau, le nombre et les types de végétaux, l'alimentation en eau et l'entretien. Certaines caractéristiques minimales sont adaptées lorsqu'il s'agit d'une construction neuve ou d'une extension et lorsqu'il s'agit d'une rénovation lourde. Les territoires d'outre-mer doivent installer des toitures végétalisées compatibles avec leurs caractéristiques climatiques particulières ».

Rénovation lourde

Le décret du 18 décembre définit les travaux de rénovation lourde, déclenchant l’obligation de solarisation ou de végétalisation des toitures, comme visant ceux « qui ont pour objet ou qui rendent nécessaire le renforcement ou le remplacement d’éléments structuraux concourant à la stabilité ou à la solidité du bâtiment » (nouvel art. R. 171-33 du CCH).

La « rénovation lourde » d'un parc de stationnement est quant à elle définie comme visant le « remplacement total du revêtement  de surface au sol sur une superficie représentant au moins la moitié de la superficie du parc de stationnement » (nouvel art. R. 111-25-2 C. urb.).

Exonérations pour les toitures

Pour rappel, la loi exonère d’une telle obligation :

- les constructions et extensions ou rénovations lourdes de bâtiments ou de parties de bâtiment qui, en raison de contraintes techniques, de sécurité, architecturales ou patrimoniales, ne permettent pas l'installation des dispositifs de végétalisation ou de solarisation ;

- les constructions et extensions ou rénovations lourdes de bâtiments ou parties de bâtiment pour lesquels les travaux permettant de satisfaire cette obligation ne peuvent être réalisés dans des conditions économiquement acceptables (art. L. 171-4-IV du CCH) ;

Le décret vient définir ces critères d’exonérations. Il distingue « l’exception en raison de contraintes patrimoniales » (art. R. 171-34 du CCH) des « autres exceptions » (art. R. 171-35 et s. du CCH). Dans le premier cas, les travaux portant sur des bâtiments - ou parties de bâtiments - inscrits ou classés au titre des monuments historiques, situés aux abords d’un monument historique ou dans un périmètre protégé, ou dans un parc national ne seront soumis aux obligations que si l’autorité en charge de cette protection donne son accord ou autorise les travaux.

Dans le second cas, l’autorité compétente peut exempter les projets de tout ou partie des obligations sur la base d’une attestation du maître d’ouvrage, jointe à la demande d’autorisation d’urbanisme, justifiant qu’il rentre dans l’une des hypothèses légales (contraintes techniques, de sécurité, architecturales) et le cas échéant, d’une note prouvant l’existence de « coûts d’installation disproportionnés « ou « de coûts de production d'énergie renouvelable excessifs », devis et étude technico-économique à l’appui.

Les contraintes techniques et architecturales permettant la dispense d’obligation peuvent résulter de la présence d’installations techniques en toiture, de l’existence d’une pente supérieure à 20 %, de l’impossibilité technique de ne pas aggraver un risque naturel, technologique ou relatif à la sécurité civile.

Les conditions économiques acceptables sont appréciées par rapport aux « coûts » d’installation : l’existence de « coûts d’installation disproportionnés » n’est établie que « lorsque le rapport entre le coût hors taxes des travaux nécessaires à l'installation d'un système de production d'énergies renouvelables ou d'un système de végétalisation et le coût total hors taxes des travaux de construction, d'extension ou de rénovation dépasse un  taux fixé par un arrêté conjoint des ministres chargés de la construction et de l'énergie » (art. R. 171-36 du CCH). Le décret établit ces coûts en fonction du mode de financement de l’installation (en propre ou en tiers investissement).

L’article 2 de l’arrêté du 19 décembre précité précise que l’existence de coûts d’installation disproportionnés est justifiée si l’une de ces conditions est atteinte :

« - lorsque le coût des travaux est supporté par le maître d'ouvrage, si le coût hors taxes des travaux nécessaires à l'installation d'un système de production d'énergies renouvelables ou d'un système de végétalisation, diminué des gains actualisés pouvant être obtenus par la vente de l'électricité produite sur une durée de 20 ans ou par les économies d'énergie réalisées sur la durée de vie de l'équipement, et diminuée des autres dispositifs de soutien financiers, excède 15 % du coût total hors taxes des travaux, […]. La durée de vie de l'équipement à prendre en compte ne peut pas être inférieure à 20 ans ;

- lorsque le coût des travaux est supporté par un tiers-investisseur, si le reste à charge hors taxes excède 15 % du coût total hors taxes des travaux ».

Ombrage des parkings

Autre volet du dispositif, l’ombrage des parcs de stationnement prévu par l’article L. 111-19-1 du Code de l’urbanisme « sur au moins la moitié de leur surface ». Le décret prévoit que la superficie d’un parc soumis à l’obligation d’installer des dispositifs végétalisés concourant à l'ombrage du parking ou d'ombrières intégrant un procédé de production d'énergies renouvelables doit prendre en compte :

- les emplacements destinés au stationnement des véhicules et de leurs remorques, situés en dehors de la voie publique, entre la ou les entrées et la ou les sorties du parking ;

- les voies et les cheminements de circulation, les aménagements et les zones de péage permettant l'accès à ces emplacements.

Les espaces verts, de repos, les zones de stockage, les espaces logistiques, de manutention et de déchargement, ne sont pas inclus dans cette superficie (art. R. 111-25-7 C. urb.).

Lorsque l'ombrage est assuré par des arbres, l'obligation est satisfaite « par la plantation d'arbres à canopée large, répartis sur l'ensemble du parc, à raison d'un arbre pour trois emplacements de stationnement » (art. R. 111-25-8 C. urb.).

Exonérations

Sont exonérés de cette obligation :

- les parcs de stationnement qui, en raison de contraintes techniques, architecturales ou patrimoniales ne permettent pas l’installation des dispositifs de végétalisation ou de solarisation ;

- les parcs de stationnement pour lesquels les travaux permettant de satisfaire cette obligation ne peuvent être réalisés dans des conditions économiquement acceptables du fait de contraintes techniques (art. L. 111-19-1 C. urb.).

Le décret précise également les critères d’exonération de cette obligation (art. R. 111-25-9 et s. C. urb.) : impossibilité de solariser ou végétaliser en raison de contraintes techniques, d’un ensoleillement insuffisant engendrant des coûts d’investissement portant atteinte de manière significative à la rentabilité de l’installation, de coûts excessifs ou compromettant la viabilité économique du propriétaire du parc.

Sont également exemptés les parcs voués à être supprimés ou transformés, sur le fondement d’une autorisation d’urbanisme délivrée avant le 1er juillet 2023. Le décret prévoit enfin la possibilité pour le préfet de département d’exempter temporairement de cette obligation les parcs de stationnement dont la suppression ou la transformation totale ou partielle est programmée dans le cadre d’une action ou d’une opération d’aménagement :

- faisant l’objet d’un projet partenarial d’aménagement ;

- faisant l’objet d’une convention d’opération de revitalisation du territoire ;

- nécessaire à la réalisation d’une opération d’intérêt national ;

- s’inscrivant dans une orientation d’aménagement et de programmation d’un plan local d’urbanisme.

La durée de cette exemption ne peut toutefois excéder sept ans.

A l’instar des exonérations prévues pour les toitures, le propriétaire du parc de stationnement devra joindre, à son dossier d’autorisation de construire, une attestation justifiant des exceptions aux obligations légales.

Entrée en vigueur

Ces nouvelles dispositions s'appliquent aux bâtiments et parcs de stationnement faisant l’objet de demandes d’autorisations d’urbanisme déposées à compter du 1er janvier 2024 ou, pour les travaux ne nécessitant pas d’autorisation d’urbanisme, lorsque la date d’acceptation des devis ou de passation des contrats relatifs aux travaux de rénovation est postérieure au 1er janvier 2024.

Elles s’appliquent également aux parcs de stationnement faisant l’objet de la conclusion d'un nouveau contrat de concession de service public, d’une prestation de services ou d’un bail commercial portant sur sa gestion ou son renouvellement intervenant à compter du 1er janvier 2024.

Les professionnels devront donc s’adapter à ces nouvelles obligations de solarisation et végétalisation qui devront être combinées avec les obligations de déploiement des infrastructures de recharge de véhicule électrique (IRVE). Le ministère chargé de la transition énergétique travaille à un guide d'application de ces mesures réglementaires. Un guide qui sera le bienvenu dès lors qu’il permettra d’apporter une certaine clarification à ce dispositif complexe.

Décret n° 2023-1208 du 18 décembre 2023 portant application de l'article L. 171-4 du code de la construction et de l'habitation et de l'article L. 111-19-1 du code de l'urbanisme

Arrêté du 19 décembre 2023 portant application de l'article L. 171-4 du code de la construction et de l'habitation, fixant la proportion de la toiture du bâtiment couverte par un système de végétalisation ou de production d'énergies renouvelables, et précisant les conditions économiquement acceptables liées à l'installation de ces systèmes

Arrêté du 19 décembre 2023 portant application de l'article L. 171-4 du code de la construction et de l'habitation et fixant les caractéristiques minimales que doivent respecter les systèmes de végétalisation installés en toiture

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