Comment vous organisez-vous ?
Organiser est un grand mot. Dès les premières annonces du gouvernement, nous avons décidé de suspendre nos huit chantiers en cours. Le mardi 17 mars, ils étaient tous mis en sécurité. Nous avons vérifié qu’ils étaient bien clôturés, protégé les ouvertures telles les trémies d’ascenseur, rangé le petit matériel dans des conteneurs pour éviter les vols, etc. Sur l’un de nos chantiers, le bureau de contrôle a pris l’initiative de l’arrêt considérant qu’il n’y avait pas les conditions suffisantes pour fonctionner en toute sécurité. En l’occurrence, confiné, le SPS ne venait plus. Sur un autre, c’est le maître d’œuvre qui a pris ses responsabilités en demandant l’arrêt du chantier en l’absence, sur le terrain, des organes habituels de contrôle et de vérification de la sécurité. De la même manière, il n’y a plus de contrôle technique du ferraillage ou de la qualité et de la résistance du béton. Sur les six autres, nous avons pris l’initiative nous-mêmes.
Par ailleurs, nous avons demandé aux maîtres d’ouvrage avec lesquels nous avions des appels en cours de décaler la remise des offres. Ils ont accepté. Nous parons au plus pressé. L’urgence pour nous est le paiement des salaires du mois de mars et de pouvoir bénéficier ensuite du dispositif du chômage partiel.
« Nous n’aurons bientôt plus de tâches administratives à réaliser »
Comment se passe le télétravail ?
Nous avons mis en place le télétravail pour les ingénieurs d’études et le personnel administratif qui disposent d’un ordinateur portable professionnel. Cela fonctionne vaille que vaille sachant que notre personnel n’a pas forcément une connexion à Internet d’une capacité suffisante et que, de toute façon, nous n’aurons bientôt plus de tâches administratives à réaliser.
Les maîtres d’ouvrage ont-ils signé des ordres de service d’arrêt ?
Pour le moment, nous ne les avons pas encore reçus. Mais je ne veux pas jeter la pierre aux maîtres d’ouvrage. Ils sont comme nous. Ils sont en train de s’organiser et fonctionnent avec des effectifs réduits. Je pense que nous recevrons les ordres de service avec effet rétroactif. Dans le cas contraire, nous monterons au créneau. Il reste le problème de la garde du chantier que certains maîtres d’ouvrage nous demandent d’assumer.
Que pensez-vous des réponses du gouvernement sur les conditions de reprise des chantiers ?
Elles manquent de clarté. A cela s’ajoute la complexité des démarches administratives. Nous avons tous voulu créer un compte sur le site de la Direccte pour déclarer de l’activité partielle. Nous avons essayé dès le lundi 16 mars. A la fin de la semaine, nous n’avions pas pu finaliser l’inscription. Pris d’assaut, le site était inaccessible. Il l’est encore.
« Certains des salariés feront peut-être valoir leur droit de retrait »
Spada Construction va-t-il reprendre l’activité sur ses chantiers ?
J’attends d’en savoir plus sur les préconisations de l’OPPBTP et des services de la Santé. Je suis sceptique. Nous risquons de mettre en danger la santé de nos salariés, mais aussi celle de leur entourage et du reste de la population. Si nous reprenons les chantiers, nous le ferons avec un effectif réduit. Certains des salariés feront peut-être valoir leur droit de retrait. D’autres garderont leurs enfants. Les approvisionnements seront moins efficaces. En clair, nous serons moins performants sur des chantiers qui sont aujourd’hui traités au forfait.
Vous êtes présidente de la fédération départementale du bâtiment et des travaux publics des Alpes-Maritimes (FBTP 06). Quelle est la situation dans le département ?
La plupart des marchés publics sont arrêtés. Mais nous ne le savons pas précisément. Il n’y a pas eu, non plus, de déclarations de maîtres d’ouvrage. La FBTP 06 a mis en place une permanence téléphonique. Nous recevons de nombreux appels d’adhérents paniqués car ne sachant pas comment faire. Nous les rassurons en leur rappelant les efforts pour préserver la trésorerie des entreprises. Par exemple, l’Urssaf a autorisé les entreprises à ne pas payer l’échéance du 15 mars. Elle a accepté un report de trois mois.