Forts de l'expérience du président d'Alcatel, qui a fait chuter son cours de bourse de plus de 38 % en annonçant que ses objectifs n'étaient pas atteints, les géants de l'environnement, de la communication, et de la construction assènent un même message à leurs actionnaires : les engagements sont respectés, les ambitions affichées sont tenues, l'entreprise crée de la valeur. Ainsi, Gérard Mestrallet pour Suez/Lyonnaise des eaux, Jean-Marie Messier pour Vivendi, et Martin Bouygues pour le groupe Bouygues, font plus que jamais assaut de séduction, en jonglant il est vrai avec des chiffres en hausse dans la plupart de leurs métiers.
La dynamique de l'international
L'environnement demeure le noyau stratégique de Suez/Lyonnaise des eaux et de Vivendi : il représentait au 30 juin 1998 64 % de l'activité du premier (la quasi-totalité des métiers dits « centraux » du groupe), et 51 % de l'activité du second, contre seulement 15 % de l'activité de Bouygues.
Gérard Mestrallet a annoncé que l'activité « environnement » de Suez/Lyonnaise des eaux était en hausse de 14,2 %, pour une progression du chiffre d'affaires semestriel total de 9,5 %, à près de 100 milliards de francs. A l'international (hors France et Belgique), l'environnement croît de 52 % au premier semestre : le groupe a acquis Gerasul, au Brésil (énergie), et remporté un gros contrat à Atlanta, aux Etats-Unis (eau potable). Dans les pays émergents (6 % du chiffre d'affaires), Suez/Lyonnaise des eaux a provisionné 1,1 milliard de francs pour « risques potentiels », et examine les opportunités d'investissement offertes par la baisse du prix des acquisitions.
Attitude identique chez Vivendi, qui compense largement la stagnation du marché français de l'environnement, par sa croissance externe à l'international. Le groupe a réalisé plus de 97 milliards de francs de chiffre d'affaire au premier semestre ( + 8 %), avec une progression de 5,5 % dans l'environnement. « Nous avons acquis une société dans l'électricité en Thaïlande, une dans l'eau en Malaisie, et nous regardons de nouvelles opportunités », précise Jean-Marie Messier, qui ne réalise que 5 % de son activité dans les pays émergents.
Le groupe Bouygues a de son côté enregistré une hausse de 8,9 % de son chiffre d'affaires, à plus de 46 milliards de francs, l'environnement augmentant de 6,4 %. Martin Bouygues est plus prudent à propos des zones en crise : « Nous sommes capables de gérer nos risques, et en Asie, les nouvelles commandes concernent essentiellement Hong-Kong et Singapour. »
Le secteur de la construction semble, lui, revigoré. Chez Suez/Lyonnaise des eaux, il diminue en part relative (22 %), mais si le centre de gravité du BTP glisse vers les concessions, l'offshore et la route, il n'est plus question de s'en dégager : « GTM a honoré ses engagements de restauration des marges, et ses perspectives redeviennent positives », se félicite Gérard Mestrallet. Le groupe sera en revanche complètement sorti de l'immobilier en 1999. Jean-Marie Messier considère pour sa part que Vivendi est « une référence forte » pour la SGE, qui représente 32 % de l'activité du premier semestre : « La construction n'est plus exposée à aucun risque significatif. »
Le groupe Bouygues tient quant à lui à conserver son leadership dans le BTP (67 % du chiffre d'affaires) : « Nous allons vivre de nouvelles belles aventures dans ce secteur », explique son président, qui a engrangé des commandes record pour les prochains mois.
Concurrence dans l'énergie
Enfin, le secteur privé se prépare à la fin des monopoles dans l'électricité et le gaz. « Nos ambitions seront fonction des conditions de la loi de transposition », tempère-t-on chez Suez/Lyonnaise des eaux, qui produit 96 % de son électricité (40 000 MW) hors de France et de Belgique, grâce notamment à Electrabel et Tractebel.
Vivendi a mis en ordre son pôle énergie, sous l'enseigne Dalkia. Premier concurrent potentiel d'EDF en France, le groupe, qui possède quelques unités de cogénération, redoute la multiplication des contentieux pour abus de position dominante de l'entreprise publique.
GRAPHIQUES : Ventilation du chiffre d'affaires du 1er semestre 1998 de Suez-Lyonnaise, Vivendi et Bouygues - L'environnement domine chez Suez/Lyonnaise des eaux et Vivendi, tandis que Bouygues reste centré sur le BTP.