L’objectif ZAN fixé par la loi Climat et résilience de 2021 survivra-t-il à 2025 ? Rien n’est moins sûr tant les parlementaires entreprennent méthodiquement son détricotage. En mars, les sénateurs ont adopté la proposition de loi (PPL) visant à instaurer une trajectoire de réduction de l’artificialisation concertée avec les élus locaux dite « Trace » et supprimant notamment l’objectif intermédiaire de réduction de plus de 50 % de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers (Enaf) en 2031.
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Vient maintenant le tour des députés qui, sans attendre d'examiner la PPL Trace, se sont saisis du projet de loi de simplification de la vie économique (SVE) pour remettre en cause le ZAN. D’une courte majorité de 105 voix contre 97, ils ont adopté mercredi 28 mai un article prévoyant que les surfaces ouvertes à l’urbanisation dans les plans locaux d’urbanisme (ou tout document en tenant lieu) peuvent dépasser « l’objectif local de consommation maximale d’Enaf résultant de la déclinaison territoriale de réduction de cette consommation ».
Dérogation à l'objectif régional
Les communes et les EPCI sont ainsi autorisés à déroger au schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet), document de référence chargé de définir et répartir les objectifs de réduction de l'artificialisation des sols entre les différents territoires d'une région. Le dépassement est permis sans justification dans la limite de 30 % de l’objectif régional. Le texte prévoit qu'il est possible d'aller au-delà avec l’accord du préfet.
Un copier-coller
Cet article, ajouté au projet de loi SVE par le député Ian Boucard (Territoire de Belfort – Les Républicains) reprend mots pour mots une disposition figurant dans la PPL Trace votée par le Sénat. Seule différence : la Chambre haute n'avait fixé la limite qu'à 20 %.
Les sénateurs s'inspiraient eux-même d’une circulaire signée par le 31 janvier 2024 par Christophe Béchu lorsqu’il était ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires. Le texte donne la possibilité aux préfets de permettre aux collectivités territoriales « de dépasser de 20 % les objectifs de réduction de l’artificialisation prévus dans le document d’urbanisme directement supérieur ».
Attendre l'examen de la PPL Trace
Le député Ian Boucard avait par ailleurs obtenu en commission que soit ajouté au projet de loi SVE un article reprenant la quasi-totalité des mesures du projet de loi Trace. Cet article a toutefois été retiré du texte en séance publique, par l’adoption d’un amendement du gouvernement. Ce dernier note que les assouplissements à l’objectif ZAN « ne peuvent intervenir au coup par coup, sans vision d’ensemble, dans des textes législatifs concurrents, qui pourraient s’avérer contradictoires ou inconciliables » et préfére poursuivre le débat sur le ZAN « dans le cadre de l’examen très prochain de la proposition de loi Trace devant l’Assemblée nationale ».
Un amendement peut en cacher un autre
Les députés ont aussi adopté un amendement, déposé lui aussi par Ian Boucard, prévoyant que les espaces naturels ou agricoles occupés par une implantation industrielle ou par un projet d’intérêt national majeur, d’intérêt régional majeur, d’intérêt intercommunal majeur ou d’intérêt communal majeur ne soient pas inclus dans la consommation d’Enaf prise en compte dans la fixation de l’objectif de réduction de l’artificialisation.