Pour se reconstruire, Mayotte aura besoin d’une armée de charpentiers et de couvreurs

Avec la quasi-totalité des toits qui ont volé en éclats, les 3800 salariés du BTP présents ne seront pas de trop et auront besoin de soutiens pour reconstruire l’archipel. D’énormes quantités de bois et de tôles devront également être importées.

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Mayotte Cyclone Chido
Mayotte Cyclone Chido

« Aucun mort n’est à déplorer parmi nos adhérents », souffle Julian Champiat, le président de la Fédération Mahoraise du Bâtiment et des Travaux Publics (FMBTP). Les 350 entreprises adhérentes commencent à peine à reprendre pied au milieu d’un département dévasté.

Le secteur du BTP compte 3 800 salariés à Mayotte pour 320 000 habitants, mais cela sera-t-il suffisant pour la reconstruction de l’archipel ? Quels sont les besoins pour les travaux ? Faudra-t-il faire venir des travailleurs qualifiés ? Les réponses doivent être apportées par la cellule de reconstruction de Mayotte, mise en place par la FMBTP en collaboration avec la préfecture de l’archipel. Le coût du chantier à venir reste lui aussi inconnu.

Le secteur opérationnel d’ici quelques jours

Une semaine après le cyclone Chido du 14 décembre, le secteur de la construction pourrait rapidement redémarrer. « On peut espérer que d’ici le milieu de semaine prochaine [autour de Noël, ndlr], l’approvisionnement en électricité, en essence, en nourriture et en eau sera complètement rétabli, précise Julian Champiat. A ce moment, une cinquantaine d’entreprises mahoraises seront de nouveau opérationnelles. »

Le secteur est notamment porté par trois grosses entreprises, la Société Mahoraise de Travaux Publics et de Construction (SMTC) filiale de Vinci, l'Entreprise de Travaux Publics et de Concassage (ETPC), filiale de Colas, et la GTA. Ces entités, capées pour le terrassement et le gros œuvre, ont les capacités d’ouvrir les voies de communication, étape primordiale pour reprendre le contrôle de la situation.

Ces trois entreprises ne sont bien entendu pas sorties indemnes de la tempête. « Toutes leurs grues se sont effondrées, rapporte Bertrand Garin, architecte de l'agence Les 3 Ama basé à Mayotte, Madagascar et La Réunion. Cela signifie au moins deux grues détruites pour chacun, Colas, SMTC et GTA. »

On peut espérer que d’ici le milieu de semaine prochaine, l’approvisionnement en électricité, en essence, en nourriture et en eau sera complètement rétabli

—  Julian Champiat, pdt de la FMBTP

Des milliers de toitures à refaire

Même si l’évaluation des dommages est loin d’être précise, on peut néanmoins esquisser les besoins à venir pour la reconstruction de Mayotte. « De ce que je vois, les dégâts concernent surtout les charpentes-toitures qui ont volé en éclats sur les bâtiments classiques – je ne parle pas des bidonvilles, observe depuis Besançon Julien Philippe, ingénieur à la tête du bureau d’étude ETG basé à Mayotte. L’urgence est la remise en état fonctionnelle d’un bâtiment. Je n’ai pas le sentiment que la destruction du béton soit le sujet. »

Ces premières impressions laissent apparaître des besoins considérables pour la réfection des charpentes, des toitures, de l’électricité et de l’huisserie. Une main d’œuvre qui sera certainement en déficit sur l’archipel. Avant le cyclone, le secteur de la construction était déjà fortement ralenti par des retards et un marché en tension permanente selon les témoignages des architectes et ingénieurs auprès du Moniteur.

Outre le besoin en travailleurs qualifiés, les travaux vont nécessiter d’énormes quantités de matières premières. « Les besoins en bois de charpente et en tôles vont être incommensurables. C’est inimaginable tous les toits qui sont tombés, ma propre maison n’a plus de toit », se désole l’architecte Bertrand Garin, quelques minutes après avoir découvert des photos de sa maison éventrée.

Mayotte, un archipel peu doté en matières premières du BTP

Grâce à ses carrières, l’archipel assure une production locale de granulat et de béton, gérée notamment par ETPC et dans une moindre mesure par IBS (Ingénierie Béton Système). Mais hormis cette matière première, tout est importé massivement, notamment le bois, le ciment et l’acier, essentiels pour refaire les toitures.

Or, l’approvisionnement ne constitue pas le point fort du territoire ultra-marin… « La géographie isolée de Mayotte n’est pas du tout évidente, précise Julien Philippe (bureau d’ingénierie ETG). Il n’y a pas de pont avec les pays voisins comme Madagascar ou les pays africains et européens et l’approvisionnement représente une difficulté du quotidien pour les entreprises du BTP en temps normal. »

Il faut aujourd’hui compter quatre mois de délais entre la commande d’un bien, sa fabrication et son arrivée dans les entrepôts. Les importations viennent habituellement d’Europe mais pour accélérer le rythme, la FMBTP réfléchit à faire venir ses matières premières de pays plus proches comme l’Afrique du Sud.

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