Nul n’est prophète en son pays. Ottawa, capitale du Canada, a précédé Paris, dans la conquête des baignades naturelles urbaines engagée par Wearth Group. Tout en lançant l’aménagement de celle de Grenelle, le plus en aval des trois sites parisiens qui ouvrira au public le 5 juillet prochain, l’industriel de Port (Ain) lorgne vers sa métropole régionale : le Grand Lyon prépare l’ouverture de 21 baignades sur la Saône et le Rhône, d’ici 2027.
Sécurité maximale
Avec des structures dimensionnées pour s’adapter aux vents, à la hauteur des vagues, au nombre d’utilisateurs, aux charges et aux morphologies fluviales et urbaines, le marché des baignades naturelles urbaines stimule la matière grise. « L’ingénierie et l’innovation mobilisent 20 % du personnel de Wearth Group », signale Quentin Bresson, directeur des affaires institutionnelles du groupe de 40 M€ de chiffre d’affaires pour 150 salariés.
Fruit d’un investissement d’1 M€ et réalisé avec la filiale Spisea, le site parisien illustre cette technicité. La baignade se divise en deux bassins. L’un deux, fermé, offre une sécurité maximale aux familles, avec des rampes d’escalier submergées, pensées pour accéder à l’eau en douceur et éviter les coinçages. Lorsque le débit de la Seine dépasse 3 m3/s, la baignade ferme. La ville prévoit le démontage annuel de la structure à l’automne.
L’anticipation récompensée
« Sans tôle ajourée ni angle droit, la conception de chaque pièce vise à éviter les noyades et blessures », poursuit Quentin Bresson, bon connaisseur du sujet comme ancien maître sauveteur. Sans précédent hors prototype, la solution proposée par l’industriel de l’Ain a conduit le maître d’ouvrage à repenser son cahier des charges et à rehausser ses exigences sécuritaires.
« Nous nous préparons depuis 10 ans à répondre à ce type de demande. Aucune autre entreprise de la région lyonnaise ne détient un savoir-faire comparable », affirme Quentin Bresson. Plusieurs arguments éclairent cette stratégie : beaucoup moins chères qu’une piscine terrestre en investissement comme en fonctionnement, les baignades naturelles urbaines offrent des îlots de fraîcheur, sans puiser dans les réserves d’eau potable.
Fusion de l’eau et de la terre
La décennie évoquée par Quentin Bresson s’incarne dans la personne de Laurent Gasiglia. En 2016, cet ingénieur Arts et métiers a repris l’entreprise Poralu Marine, concepteur, fabricant, installateur et exploitant de ports de plaisance, spécialité dans laquelle il revendique le leadership mondial.
En novembre 2024, sa volonté de diversification et de croissance conduit au regroupement de 13 filiales sous une bannière commune : Wearth, fusion anglicisante de l’eau et de la terre. Actionnaire unique, Laurent Gasiglia dote aussitôt la nouvelle entité du statut d’entreprise à mission, avec une stratégie d’investissement orientée vers la décarbonation des process industriels.
Mariage de l’alu et du plastique
Quentin Bresson résume en une formule le savoir-faire du groupe installé sur les bords du lac de Nantua, emblème de la Plastics Vallée française : « Nous avons associé le savoir-faire de ce territoire avec la maîtrise de l’aluminium, au service des aménagements sur l’eau ». Issus de l’usine de rotomoulage, les flotteurs en polyéthylène recyclé s’associent aux structures métalliques.
L’industriel pose la majorité de ses installations et soumet ses quelques sous-traitants, triés sur le volet, à une surveillance étroite. Son offre ne se limite pas aux matériaux qu’il fabrique, comme l’attestent les pontons en béton de Tournon-sur-Rhône (Ardèche). A l’amont des projets, la volonté de couvrir toute la chaîne de l’aménagement des plans d’eau se traduit par les prestations d’assistance à maîtrise d’ouvrage déployées par la filiale Aqua.Strat.
Traduite en chiffre sur la prochaine décennie, l’ambition de Laurent Gasiglia se résume en un mot : le décuplement. En 2034, Wearth Group vise 400 M€ de CA pour 1500 salariés.