La baignade dans la Seine, une victoire olympique

En 2025, les Parisiens pourront plonger dans le fleuve. Les JO ont permis de gagner quinze ans dans la reconquête de la qualité de l'eau.

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Plan baignade
Les cinq ouvrages structurants du plan baignade.

La pluie a joué les trouble-fêtes en ce début de Jeux olympiques. Après la cérémonie d'ouverture, ce sont les compétitions de triathlon dans la Seine qu'elle a perturbées, obligeant les organisateurs à annuler les entraînements et à reporter d'une journée l'épreuve masculine. Suite à l'épisode pluvieux des 26 et 27 juillet, l'eau ne respectait pas les normes sanitaires de baignabilité, selon lesquelles les taux d'Escherichia coli et d'entérocoques intestinaux (deux bactéries fécales) ne doivent respectivement pas dépasser 1 000 unités formant colonie (UFC) pour 100 ml et 400 UFC/100 ml pour les athlètes (900 UFC/100 ml et 330 UFC/100 ml pour le grand public).

Promesses. Quinze jours avant les triathlètes, la maire de Paris avait enchaîné quelques longueurs de crawl, lors d'une « baignade inaugurale » en compagnie de Tony Estanguet, président du comité d'organisation des JO, et de Marc Guillaume, préfet de la région Ile-de-France. Anne Hidalgo tenait ainsi la promesse formulée par Jacques Chirac en 1988 de « se baigner dans la Seine devant témoins pour montrer qu'elle était devenue un fleuve propre ».

Sa dépollution aura pris plus de temps que ne l'imaginait l'ancien maire de la capitale. Elle commence dans les années 1990 par un vaste plan de modernisation du réseau d'assainissement hérité du Second Empire. La Ville dépense en moyenne 33 M€ par an pour réhabiliter les ouvrages existants et équiper de vannes automatisées la quarantaine de déversoirs d'orage de la capitale. « Pilotées par un système de supervision à distance, elles permettent d'optimiser les flux dans le réseau unitaire et de limiter les rejets d'eaux polluées dans le milieu naturel », explique Samuel Colin-Canivez, responsable des grands travaux du réseau d'assainissement parisien. Ces efforts portent leurs fruits : en vingt ans, le volume d'eaux usées rejetées dans la Seine passe de 20 millions de m3 en moyenne par an à environ 2 millions de m3. Dans le même temps, son état écologique s'améliore nettement sous l'effet aussi de la rénovation des stations d'épuration de l'agglomération parisienne.

« La municipalité entraperçoit alors la possibilité d'atteindre les critères sanitaires de baignabilité », poursuit Samuel Colin-Canivez. La candidature aux JO de 2024, déposée en 2016, sert de déclic.

Paris s'engage à organiser dans la Seine les épreuves de natation en eau libre. Après sa désignation comme ville hôte, un plan « Qualité de l'eau et baignade dans la Seine et la Marne » est rapidement finalisé. Copiloté par la maire de Paris et le préfet de région, il associe notamment le Syndicat de l'assainissement de l'agglomération parisienne (Siaap) et les départements de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne. D'un montant de 1,4 Md€, dont 700 M€ financés par l'Etat et 500 M€ par le Siaap, il prévoit la construction de cinq ouvrages structurantspour réduire les rejets d'eaux usées par temps de pluie.

Déversements évités. Un autre volet vise à limiter les pollutions par temps sec, articulé autour de deux actions prioritaires : le raccordement de 255 bateaux parisiens aux égouts et la mise en conformité de 23 000 mauvais branchements - en cas de réseaux séparatifs, les eaux usées sont envoyées dans la canalisation des eaux pluviales et inversement. « La qualité baignade implique une multiplication de déversements évités », résume Samuel Colin-Canivez.

« Notre objectif était de réaliser les deux tiers des travaux prévus ; finalement, les trois quarts ont été menés à bien. En particulier, 100 % des grosses infrastructures ont été livrées à temps », commente Marc Guillaume. La dynamique JO a joué à plein, permettant, selon les acteurs concernés, « de gagner entre dix et quinze ans » dans la mise en œuvre de ce programme, dont les premiers effets sont perceptibles. « Nous constatons une diminution des concentrations bactériologiques. Tendanciellement, nous nous inscrivons en deçà des critères sanitaires pour l'essentiel d'une saison de baignade. Mais nous ne sommes pas à l'abri d'une pluie de forte intensité ou d'un orage violent », pointe Samuel Colin-Canivez.

Pour la Ville de Paris, la prochaine séquence emblématique se déroulera à l'été 2025 avec l'ouverture de trois sites de baignade, cent ans après l'interdiction de piquer une tête dans le fleuve. Comme l'a twitté le président de la République, qui lui aussi a promis d'y plonger, « rendre la Seine et la Marne baignables restera comme l'un des plus beaux héritages des JOP de 2024 ».

Les cinq ouvrages structurants du plan baignade

- Le bassin d'Austerlitz (XIIIe ) d'une capacité de stockage de 50 000 m3.

MOA : Ville de Paris.

Coût : 100 M€ HT.

- Le bassin de rétention du ru Saint-Baudile (30 000 m3 ). MOA : CD 93. Coût : 53 M€ TTC.

Il est notamment couplé à la création d'un siphon sous la Marne et d'un bassin tampon de 5 000 m3 à l'usine de Noisy-le-Grand. MOA : Siaap ; coût : 70 M€ HT.

- La station de dépollution des eaux pluviales du ru de la Lande à Champigny-sur-Marne, qui peut stocker jusqu'à 8 000 m3. MOA : CD 94. Coût : 54 M€ TTC.

- Le collecteur VL8, qui relie sur 9 km Athis-Mons à l'usine de Valenton. Utilisé comme bassin de stockage de 51 000 m3 pendant les JO, il assurera ensuite le transport des eaux usées du sud de l'agglomération parisienne. MOA : Siaap.

Coût : 339 M€ HT.

- Travaux dans le bassin versant Fresnes-Choisy pour créer des canalisations d'eaux usées et remplacer des réseaux existants. MOA : CD 94, 48,5 M€ TTC.

Parallèlement, le Siaap a amélioré son processus de désinfection de l'eau traitée dans ses usines de Valenton et Noisy-le-Grand pour 12,8 M€.

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