De nombreuses règles en matière de construction pourront être écartées ou assouplies à titre exceptionnel pour réaliser au plus vite la restauration de Notre-Dame de Paris. Au conseil des ministres du mercredi 24 avril, l’exécutif a réaffirmé l’objectif d’une reconstruction de l’édifice en cinq ans. Et présenté un projet de loi qui accorde le droit au gouvernement de « prendre par ordonnance, dans un délai de deux ans, un certain nombre de dispositions législatives qui permettront de faciliter les travaux de restauration, en dérogeant, le cas échéant, à des règles de construction pour accélérer le chantier », a indiqué Sibeth Ndiaye, porte-parole du gouvernement.
Le dernier article du projet de loi livre les détails de ce régime exceptionnel. Ainsi pourront être prévues des adaptations ou dérogations "aux règles en matière d’urbanisme, d’environnement, de construction et de préservation du patrimoine, en particulier en ce qui concerne la mise en conformité des documents de planification, la délivrance des autorisations de travaux et de construction, les modalités de la participation du public à l’élaboration des décisions et de l’évaluation environnementale, ainsi que l’archéologie préventive ; [et] aux règles en matière de commande publique, de domanialité publique, de voirie et de transport".
Par ailleurs, indique l'exposé des motifs du texte, "les règles de compétences contentieuses pourront être adaptées par voie réglementaire."
Des inquiétudes et une réserve
Parmi les réactions à cette initiative gouvernementale, celle de Stéphane Bern s'avère particulièrement négative. L’animateur de télévision chargé d'une mission patrimoine par le président de la République s’est dit « inquiet » d’une « loi d’exception » et craint « les précédents » que pourrait faire naître le projet de loi. « Il ne faut pas confondre vitesse et précipitation », a-t-il déclaré. Avant de poursuivre : « Les donateurs veulent la reconstruction de la cathédrale à l’identique. Et il faut se garder des ‘starchitectes’ qui veulent laisser leur nom sur ce bâtiment. Un peu d’humilité est requise devant 850 ans d’histoire ».
Jack Lang s'est également exprimé, mais pour saluer la démarche et « la célérité » de l’action du gouvernement. L’ancien ministre de la Culture n'en émet pas moins une « réserve » sur la pertinence des dérogations aux règles des marchés publics.
Un établissement public d’Etat ad hoc
Le projet de loi prévoit également la possibilité de créer un établissement public d’Etat qui aura pour vocation d’accompagner la conception, la réalisation, mais aussi la coordination des travaux de restauration et de conservation de la cathédrale. Une ordonnance pourra être prise à cette fin dans les six mois après la publication de la loi.
Le texte augmentera en outre la réduction d’impôt sur le revenu à 75 % (au lieu de 66 %) pour les dons allant jusqu’à 1000 euros effectués auprès du Centre des monuments nationaux, de la Fondation de France, de la Fondation du patrimoine et de la Fondation Notre-Dame ainsi que du Trésor public. Pour la Fondation du patrimoine par exemple, 75 % des dons versés pour l’heure par des particuliers pour la restauration de la cathédrale sont d’un montant inférieur ou égal à 1 000 euros (soit 16,4 millions d’euros).
Le Premier ministre Edouard Philippe a rappelé que l’argent récolté serait uniquement dédié au financement des travaux de restauration et à la formation des professionnels, notamment dans les métiers de l’artisanat d’art. La Cour des comptes y veillera : elle a annoncé la mise en place d’un contrôle de la collecte, de la gestion et de l’emploi des fonds mobilisés pour la reconstruction de Notre-Dame de Paris. Lequel « donnera lieu à la publication d’un rapport annuel ».
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