« Je vous remercie de nous indiquer quelle est l’action des établissements que vous représentez en matière de détection, de suivi et de traitement des copropriétés en difficulté. » Amel Gacquerre, sénatrice de l’Union centriste du Pas-de-Calais, donne le ton, le 7 mai, face aux représentants du secteur bancaire priés d’argumenter sur les freins financiers à la rénovation des copropriétés.
Les données clés de l’Agence nationale pour l’habitat (Anah) pour 2023, publiés en janvier 2024, montrent en effet que seulement 51 559 logements en copropriété ont bénéficié d’aides pour leur rénovation l’année dernière, sur un total de 623 790 logements rénovés.
Risque de non-recouvrement
« Les copropriétés sont des objets complexes par nature », assure Pierre Bocquet, directeur du département banque de détail et à distance de la Fédération bancaire française (FBF). Complexes car la multiplicité des acteurs augmente le risque de non-recouvrement des sommes prêtées. Une situation qui explique que « la première source de financement de la rénovation énergétique des copropriétés, c’est l’épargne individuel des ménages ». Pour le porte-parole des banques installées en France, l’enjeu serait de « faire en sorte que les marges opérationnelles soient plus intéressantes » pour le secteur bancaire.
Une autre difficulté de financement des rénovations des logements en copropriété est liée au manque de visibilité des différents acteurs sur un chantier de rénovation. « Les syndics ont besoin d’une solution de financement global du projet, qui le sécurise », explique Nordine Si Mohammed, directeur des marchés spécialisés au sein de la Caisse d’Epargne Ile-de-France, en référence à son partenariat avec Izy by EDF pour financer les travaux des particuliers.
Aligner les intérêts du créancier
Or, si les prélèvements financiers sont effectués sur le compte du syndic, les copropriétaires ne peuvent plus distinguer ce qui relève de leurs charges courantes de ce qui relève du remboursement des prêts liés à la rénovation. Un manque de transparence qui dissuade certains copropriétaires de passer le pas. « Lorsque le syndic récupère la gestion du prêt, y compris le recouvrement, les copropriétaires n’ont plus de vision financière de la rénovation », résume Nordine Si Mohammed. Pour le représentant du premier établissement national qui finance la rénovation des copropriétés, la solution consiste à prélever directement les remboursements d’emprunt sur le compte des copropriétaires : « Cela répond exactement à leurs demandes. »
La dernière difficulté, enfin, porte sur la complexité technique des travaux. « Il y a un réel besoin d’expertise. On voit se développer de plus en plus le rôle des assistants à maîtrise d’ouvrage qui deviennent des acteurs majeurs », poursuit Nordine Si Mohammed. Un besoin d’expertise qui pèse dans la gestion des aides publiques à la rénovation des copropriétés, comme MaPrimeRénov copropriétés. « Nous avançons les subventions, mais nous ne sommes pas en mesure de vérifier comment les travaux évoluent, concède-t-il. Or, c’est cette évolution qui détermine la distribution des aides, ce qui fait que les intérêts du prêteur ne sont pas garantis. »