Jurisprudence

Marchés publics de maîtrise d’œuvre : précisions sur le respect du délai de standstill

Le maître d’ouvrage n’est pas tenu de respecter un délai de suspension entre la notification et la signature d’un marché de maîtrise d’œuvre conclu avec l’un des lauréats d’un concours restreint, a jugé le Conseil d’Etat dans une décision du 13 mars 2025.

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Le délai de standstill suspend la signature du contrat pendant une durée de 11 jours à compter de sa notification au titulaire et aux candidats évincés.
Marchés publics
Conseil d'Etat (CE)Décision du 2025/03/13N°498701
Conseil d'Etat (CE)Décision du 2025/03/13N°498701

Une commune a lancé en mars 2024 un concours restreint de maîtrise d’œuvre sur esquisse pour la construction d’une médiathèque. En juillet 2024, le jury de concours a établi son classement. Dans la foulée, le maire a désigné les candidats classés aux deux premières places comme lauréats du concours. Il a ensuite ouvert une phase de négociations avec les deux lauréats.

A l’issue de ces discussions, le maire a décidé d’attribuer le marché public de maîtrise d’œuvre à l’entreprise que le jury avait classée deuxième. Il en a informé les deux candidats par courrier le 3 septembre 2024. Dix jours plus tard, le soumissionnaire évincé a saisi le juge des référés du tribunal administratif pour obtenir l’annulation de la procédure de passation du marché. 

Le référé précontractuel n’est possible qu’avant la signature du marché

Le 20 septembre 2024, le TA a rejeté cette demande au motif que le contrat avait déjà été signé dès le 3 septembre, rendant sans objet le référé précontractuel. Le candidat évincé a donc engagé un référé contractuel pour obtenir l’annulation du marché de maîtrise d’œuvre. Il considère notamment que le maître d’ouvrage était tenu de respecter un délai de standstill. Mais était-ce vraiment le cas ? C’est à cette question que le Conseil d’Etat a répondu mi-mars (CE, 13 mars 2025, n° 498701, mentionné au recueil Lebon).

Le standstill ne joue qu’au-dessus des seuils européens

Pour mémoire, le délai de standstill correspond à une période de suspension entre l’envoi de la notification du marché et sa signature par l’acheteur. Il a notamment pour objet de permettre aux candidats évincés de pouvoir utilement contester l’attribution du contrat avant sa prise d’effet, dans le cadre d’un référé précontractuel.

L’article R. 2182-1 du Code de la commande publique (CCP) précise que ce délai est d’une durée minimale de 11 jours, ou de 16 jours si la notification du marché n’a pas été faite par voie électronique. Mais, comme le rappelle le Conseil d’Etat, « il n’est exigé que pour les marchés qui sont passés selon une procédure formalisée et pour lesquels la publication préalable d’un avis de marché au Journal officiel de l’Union européenne est imposée ».

La négociation avec les lauréats d’un concours n’est pas une procédure formalisée

L’enjeu est alors de déterminer si un marché de maîtrise d’œuvre attribué après concours doit être considéré comme répondant à ces conditions. La Haute juridiction relève que le CCP prévoit qu’un acheteur « peut passer un marché de services sans publicité ni mise en concurrence préalables avec le lauréat ou l’un des lauréats d’un concours » (art. R. 2122-6). Cette disposition s’applique y compris aux marchés de maîtrise d’œuvre répondant à un besoin dont le montant est égal ou supérieur aux seuils de procédure formalisée (art. R. 2172-2).

Le Conseil d’Etat en déduit que dans la mesure où ces marchés n’ont pas à être passés selon une procédure formalisée, alors le maître d’ouvrage n’est pas tenu de respecter un délai de standstill. Par conséquent, le juge des référés n'a pas à annuler le contrat au motif que le maître d’ouvrage n’a pas respecté un tel délai.

Le Conseil d’Etat indulgent avec l’acheteur

Toutefois, dans cette affaire, l’acheteur avait lui-même fait mention d’un délai de standstill dans la lettre de rejet adressée au candidat évincé. Pour le Conseil d’Etat cette circonstance n’a néanmoins pas d’incidence. La nullité du marché ne peut pas être prononcée en raison d’un manquement à un obligation que s’est imposé le pouvoir adjudicateur alors qu’il n’y était pas tenu, estime la Haute juridiction.

CE, 13 mars 2025, n° 498701, mentionné au recueil Lebon

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