« MaPrimeAdapt’ entre dans une politique de prévention », indique d’emblée Anne-Sophie Perrissin-Fabert, déléguée générale d'Ignes (Syndicat des industriels de la filière électrique). « Depuis l’entrée en vigueur de la prime, les équipements domotiques de sécurité sont finançables, alors qu’ils étaient auparavant exclus des aides. Ces solutions jouent un rôle dans la vie des aidants familiaux, en alertant en cas de situations critiques telles que fuites de gaz, consommation anormale d'eau, chaleur excessive, ou absence prolongée d'activité de leur proche. »
À titre d’exemple, l’installation d’un chemin lumineux pour guider la nuit une personne réduit le risque de chute, tandis que les volets roulants et serrures connectées simplifient les gestes de fermeture/ouverture, y compris sans se déplacer, tout en renforçant la sécurité du logement. « Les logements des seniors peuvent être parfois des logements vieillissants en termes d’installation électrique. Nous avons aussi les détecteurs de fuites d’eau qui peuvent être éligibles pour ceux qui laissent leur robinet ouvert », précise Anne-Sophie Perrissin-Fabert.
Une meilleure pédagogie
Les solutions numériques et domotiques répondent à la volonté de rester chez soi et de vieillir à domicile. « Les artisans ont des solutions à porter et à faire connaître. On les invite à discuter de ces solutions avec leurs clients quand ils les rencontrent. Ce sont des solutions qu’il faut installer en préventif alors que souvent elles sont installées en curatif », insiste Anne-Sophie Perrissin-Fabert. Pour être éligibles à MaPrimeAdapt’, les travaux devront obligatoirement être recommandés par un accompagnateur de travaux, un AMO, qualifiée par l’Anah. Quoiqu’il arrive, ces aménagements offrent plus de confort et de sécurité et valorisent par ailleurs le patrimoine des propriétaires en lui conférant une réelle plus-value. « La pédagogie autour de ces solutions revêt une importance cruciale. MaPrimeAdapt’ est un outil prometteur qui doit aider les Français à aller vers une meilleure connaissance des solutions existantes et leur permettre d’anticiper des fragilités futures », indique Benoit Coquart, président d’Ignes.
Du côté des fabricants
Hager Group est fabricant de solutions de pilotage des bâtiments et de cheminements adaptés aux personnes à mobilité réduite. Cyril Malinvaud, chef de produit, indique : « les capteurs de chute permettent d’avertir les proches pour qu’ils interviennent rapidement. Le fait d’intégrer la domotique dans le dispositif MaPrimeAdapt’ permet aux personnes à mobilité réduite de rester le plus longtemps possible à domicile tout en gardant un haut niveau de confort et de sécurité. » La domotique apporte des solutions pour simplifier les gestes du quotidien comme ouvrir les volets et allumer des lumières, sans avoir à se déplacer et se mettre en danger. « C’est un marché en forte croissance, pour lequel le taux d’équipement dans notre pays est très faible. Il y a donc fort à parier que nous verrons une augmentation de nos ventes liées au dispositif MaPrimeAdapt’. »
En 2024, Hager lance une nouvelle offre KNX adaptée au maintien à domicile avec de nouveaux actionneurs d’éclairage et de volets, ainsi que des gestionnaires de chauffage optimisés pour la commande à distance. « Nous sortons également un nouveau serveur domotique, domovea, qui permet de commander toute l’installation via smartphone, PC ou tablette, et également de réaliser des automatismes. Par exemple, il est possible de baisser les éclairages de l’habitation à 15 % pendant la nuit, afin de permettre aux occupants de toujours avoir la visibilité des espaces et minimiser les risques de chute », conclut-il.
Et les électriciens dans tout ça ?
Très peu d’artisans électriciens semblent au courant de la prime, malgré les quelques annonces avant le 1er janvier 2024. Thierry Darmon, artisan-électricien chez Darmon Electricité à Lyon, témoigne. « Je viens de recevoir deux demandes de devis. En conséquence, j’ai adapté mon offre. La domotique reste chère, même avec la couverture de MaPrimeAdapt’. Je dois faire des dossiers. C’est par les clients que j’ai appris la sortie de cette prime. C’est bon signe. Au lieu de mettre les personnes âgées dans des maisons de retraite qui coûtent, la réhabilitation de l’appartement pourra aider à la venue des aides soignantes », précise-t-il. Il espère avoir plus de chantiers : « Nous avons moins de chantiers car l’immobilier chute. Les banques ne prêtent plus. » Il voit quelques contraintes cependant : « Cette prime nous rajoute des demandes administratives. Ce temps est compté dans le devis. Il faut aussi savoir que les personnes âgées ne veulent pas de changements. C’est dur de les convaincre. Les enfants commencent les dossiers car souvent les anciens ne peuvent plus. »
Matthieu Nion, dirigeant de la Société Télé Réseau Nion, indique la place des bailleurs : « Le bailleur social peut tout prendre en charge, en imposant à tous les résidents les mêmes dispositions. Les bailleurs sociaux ont l’habitude de le faire pour plusieurs logements mais avec la prime, un particulier peut prétendre aux mêmes niveaux d’exigence et peut vraiment choisir ce dont il a besoin, a priori. » Concernant l’aspect technique, les contraintes habituelles ne peuvent être prises en compte par la prime : « vous avez des besoins de goulottes en plus et de moins saigner les murs. Certaines techniques de passages de câbles peuvent être empêchées par des logements avec de gros meubles. » Il conclut : « la prime peut être un accélérateur s'ils passent au-dessous du numérique et s'ils prennent en main leur dossier. »