Après avoir adopté les trois premiers articles relatifs à l’artificialisation (47, 48 et 49) du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets mercredi 14 avril 2021, les députés ont poursuivi en séance publique l’examen des articles suivants, jeudi 15 et vendredi 16 avril. Un examen qui a nécessité le rappel de la commission pour étudier de nouveaux amendements.
Urbanisation d’une zone dans le PLU (art. 49 bis C et 49 bis D). Les députés ont adopté en séance l’amendement n° 4415, déposé par le rapporteur thématique du texte, Lionel Causse (LREM, Landes), qui conditionne l’ouverture à l’urbanisation d’une zone au PLU à la création d’orientations d’aménagement et de programmation (OAP). "La mise en place d’un échéancier prévisionnel des ouvertures à l’urbanisation des zones à urbaniser permettra d’inciter à avoir une réflexion prospective sur les projets et les équipements dès l’amont. L’introduire dans les [OAP] permet une certaine souplesse, dans la mesure où celles-ci pourront être ajustées lors d’une modification du PLU", indique l’exposé sommaire.
Toujours sur les , l’amendement n° 7227, porté par le député parisien Pacôme Rupin (LREM), propose que les OAP relatives à la mise en valeur des trames vertes et bleues soient déclarées obligatoires dans les futurs PLU et PLUi.
Surfaces non imperméabilisées (art. 49 bis F et 49 bis B). Un autre amendement inséré après l’article 49, le n° 7226, porté par Émilie Chalas (LREM, Isère), impose une "part minimale de surfaces non imperméabilisées ou éco-aménageables" dans le règlement des documents d’urbanisme des communes de plus 50 000 habitants, ou de plus de 15 000 habitants "en forte croissance démographique".
Dans le même ordre d’idée, l’amendement n° 7225, déposé par Alain Perea (LREM, Aude) et l’amendement n° 3810, porté par Valérie Petit (LREM, Nord), proposent d’identifier des "zones préférentielles pour la renaturation" dans le document d’orientation et d’objectifs des schémas de cohérence territoriale. Un amendement qui devrait permettre, selon ses auteurs, "d’orienter la compensation de l’artificialisation" là où elle est la plus propice (par exemple pour rétablir des trames vertes ou bleues).
Franges urbaines (art. 49 bis E). L’amendement n° 4416, porté par le rapporteur thématique du texte, Lionel Causse, élargit les possibilités offertes par les OAP de "traiter spécifiquement les franges urbaines, c’est-à-dire les zones de contact entre l’espace urbain bâti et l’espace naturel et agricole qui l’environne". Un amendement modifié par le sous-amendement n° 7402, porté par Alain Perea, qui définit ces franges comme un "espace de transition non artificialisé entre les espaces agricoles et les espaces nouvellement urbanisés".
Bilan du PLU (art. 49 bis G). L’amendement n° 3108, présenté par Lionel Causse, réduit le délai entre deux bilans du PLU pour le ramener à six ans, et non plus neuf, pour que ces bilans prévus par la loi correspondent à la durée d’une législature.
Observatoires du foncier et de l’habitat (art. 49 bis). L’amendement n° 5023, présenté par le député de la Haute-Garonne Jean-Luc Lagleize (Modem), portant sur l’article 49 bis qui crée des observatoires du foncier et de l’habitat, vient préciser les missions de ces observatoires, "afin qu’ils rendent compte annuellement du nombre de logements construits sur des espaces déjà urbanisés et sur des zones ouvertes à l’urbanisation". Une précision qui était prévue dans le rapport que le même député avait rendu au Premier ministre au mois de novembre 2019.
Agences d’urbanisme (art. 49 bis). L’amendement n° 5423, porté par Sandra Marsaud (LREM, Charente), autorise les agences d’urbanisme à apporter leur expertise, ponctuellement, à des territoires qui ne participent pas à leur financement habituel. "Ces actions ponctuelles pourraient permettre de financer ainsi la réalisation d’études sur la reconquête de l’existant, ou l’optimisation de l’organisation de l’espace sur des communes ou des EPCI qui devront prochainement modifier ou réviser leurs documents de planification pour s’adapter à l’objectif de réduction de la consommation foncière", signale l’exposé des motifs de l’amendement. Celui-ci a été sous-amendé par le gouvernement, afin que cette disposition soit limitée aux territoires couverts par un projet partenarial d’aménagement ou une convention d’opération de revitalisation de territoire.
Conventions de sobriété foncière (art. 49 quinquies). Onze amendements (n° 6141, n° 2803, n° 4973, n° 5478, n° 3496, n° 5219, n° 1809, n° 3281, n° 1725, n° 1967 et n° 2299) ont ajouté un article 49 quinquies, qui vient créer des conventions de sobriété foncière. Ces conventions "ont pour objet l’organisation et l’accompagnement de la mise en œuvre du projet global de territoire et du programme d’action porté par les collectivités pour lutter contre la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers et contre l’artificialisation des sols, pour favoriser le recyclage urbain, la lutte contre la vacance et pour mettre en œuvre la trame verte et bleue, les continuités écologiques et la nature en ville. L’ensemble de ces amendements ont été sous-amendés par Lionel Causse en commission, jeudi 15 avril dans l’après-midi, afin de supprimer la possibilité pour le préfet de repousser les délais d’élaboration des documents d’urbanisme, à la suite de la conclusion d’un contrat de sobriété foncière. "La réalisation des contrats ne vient pas se substituer à la territorialisation des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols prévus à l’article 49", prévient le rapporteur. "Il n’est pas souhaitable de repousser davantage les délais de mise à jour des documents de planification", ajoute-t-il.
Rapport sur l’artificialisation des sols (article 50). L’article 50, qui prévoit, pour mémoire, la présentation d’un rapport obligatoire sur l’état de l’artificialisation en conseil municipal, a été amendé par Alain Perea, pour que ce rapport puisse être enrichi des données mises à disposition par l’État par le biais de l’observatoire de l’artificialisation mis en place dans le cadre du plan biodiversité.
La commission avait par ailleurs assoupli les conditions de présentation de ce rapport qui ne doit intervenir que tous les deux ans, et non plus annuellement pour les communes de moins de 3 500 habitants. L’amendement n° 2050, déposé par le rapporteur du texte, vient donc supprimer la mention annuelle du texte du projet de loi, dans un but de coordination.
EPF et Safer (art. 50 bis). L’amendement n° 3311, déposé par Dominique Potier (PS, Meurthe-et-Moselle), vise à intégrer dans le futur rapport à l’horizon 2030, sur l’application de mesures visant à réduire l’artificialisation, les moyens mis à disposition de l’État pour alimenter les opérateurs fonciers que sont les EPF et les Safer, "dans leur mission de renaturation des sols".
ORT et GOU (art. 51 bis A). L’amendement n° 5775 déposé par le rapporteur assouplit la possibilité de déroger aux règles d’urbanisme dans les zones tendues, en étendant les dérogations existantes aux , aux grandes opérations d’urbanisme, tout en prévoyant des possibilités pour le maire de refuser ces dérogations, s’il estime que "le projet ne s’intègre pas harmonieusement dans le milieu urbain environnant, d’un point de vue architectural, environnemental, ou du cadre de vie". Cette "intégration harmonieuse" a toutefois été supprimée par un sous-amendement déposé par Jean-René Cazeneuve (LREM, Gers), rapporteur général du texte, qui vient préciser que les constructions qui dérogent aux règles d’urbanisme ne pourront "dépasser la hauteur de la construction contiguë existante".
Un autre sous-amendement, déposé par Thibault Bazin (LR, Meurthe-et-Moselle), établit une dérogation aux règles d’urbanisme pour les places de stationnement, si le porteur du projet prévoit des espaces de stationnement sécurisé pour les vélos.
Surfaces commerciales (art. 52). Les dérogations qui étaient prévues par le projet de loi pour les surfaces commerciales "à proximité du tissu urbain" s’appliquent désormais aux projets "en continuité avec les espaces urbanisés" (amendements n° 5025 et n° 4410).
L’amendement n° 5897 déposé par le rapporteur du texte vient préciser que, pour les projets supérieurs à 5 000 m2, la Commission nationale d’aménagement commercial sera compétente pour "examiner si les critères permettant de solliciter une dérogation sont réunis". Une surface ramenée à 3 000 m2 par sous-amendement.
Projets soumis à évaluation environnementale (art. 52 bis A). Un amendement (n° 5061), porté par Aude Luquet (LREM, Seine-et-Marne), ajoute aux études d’impacts des projets soumis à évaluation environnementale une évaluation de l’artificialisation des sols.
Autre amendement d’importance, le n° 6345, porté par Émilie Chalas, pose comme objectif à dix ans la réduction de moitié de l’emprise au sol des parkings par rapport à la décennie précédente. "Cet objectif s’accompagne dans la même période de celui d’installer des ombrières pour 50 % des surfaces de parkings extérieurs existants."
Entrepôts logistiques (art. 52 bis). Créé par amendement (n° 5026), l’article 52 bis "vise à renforcer la capacité des collectivités territoriales à planifier le développement de l’implantation des entrepôts logistiques à vocation commerciale, une demande qui émanait des associations représentatives du secteur commercial, qui souhaitaient que les acteurs de l’e-commerce soient soumis aux mêmes contraintes qu’eux le sont par l’article 52.
Cet article transforme le document d’aménagement artisanal et commercial (qui fait partie du au sein d’un ) en document d’aménagement artisanal, commercial et logistique. "Il doit obligatoirement comporter une analyse des conditions d’implantation des constructions logistiques commerciales en fonction de leur surface, de leur impact sur les équilibres territoriaux en termes économiques et en termes d’aménagement".
Densification des zones pavillonnaires (art. 53 bis A). L’amendement n° 5431, porté par Sandra Marsaud, offre des dispositions pour densifier les lotissements pavillonnaires, en simplifiant les procédures de subdivision de lots issus d’un permis d’aménager. Il remplace le dispositif de majorité qualifiée des colotis pour pouvoir subdiviser un lotissement, qui bloque la plupart des projets de densification, par un dispositif de majorité simple.
Définition des friches (art. 53 bis). Créé en commission pour définir officiellement les friches, l’article 53 bis a été amendé en séance publique. L’amendement n° 6160, porté par Damien Adam (LREM, Seine-Maritime), vient ainsi préciser que, pour que la notion de friche soit "pleinement effective et opérationnelle", il sera nécessaire de préciser les modalités d’application de l’article qui les définit par décret. "Le décret permettra notamment de s’intéresser aux aspects liés à l’absence d’usage du bien, sa désaffectation, et le cas échéant la durée de délaissement et d’abandon", indique l'exposé des motifs. Deux autres amendements portent les mêmes dispositions (n° 557 et n° 5452).
Réversibilité d’un bâtiment (art. 54). Pour mémoire, l’article 54 prévoit la mise en place d’études de réversibilité préalables à la construction d’un bâtiment. Il a été amendé en séance publique par l’amendement n° 919, déposé par Martial Saddier (LR, Haute-Savoie), qui prévoit que l’étude ne soit pas transmise au ministère, comme c’était le cas dans la version du texte issue de la commission, mais "aux services de l’État dans le département". Un autre amendement (n° 5027), déposé par Jean-Luc Lagleize, vient ajouter le potentiel de surélévation à cette étude de réversibilité.
Dérogation au PLU (art. 55). Cet article autorise, quant à lui, le gouvernement à prendre des mesures par ordonnance pour rationaliser les conditions d’ouverture à l’urbanisation, pour étendre les possibilités de dérogation au PLU pour les projets sobres en foncier, et introduire des objectifs de sobriété foncière dans les documents de planification relatifs à l’habitat et à la mobilité. Il est modifié par l’amendement n° 3990, porté par Thibault Bazin, qui vient supprimer certaines habilitations à légiférer par ordonnance, considérant que "le renforcement et la rationalisation des conditions d’ouverture à l’urbanisation dans les règles d’urbanisme sont déjà prévus par la présente loi". Cinq autres amendements (n° 2730, n° 294, n° 4660, n° 2454 et n° 225) abondent dans ce sens.
Aires protégées (art. 56). Cet article inaugure le chapitre IV du titre "Se loger" du projet de loi, intitulé "lutter contre l’artificialisation des sols pour la protection des écosystèmes". Il porte notamment sur la mise en place d’une stratégie nationale des aires protégées, "dont l’objectif est de recouvrir, par un réseau cohérent d’aires protégées en métropole et en outre-mer, sur terre et sur mer, au moins 30 % de l’ensemble du territoire national et des espaces maritimes sous souveraineté ou juridiction française. L’amendement n° 5030, déposé par Frédérique Tuffnell (Modem, Charente-Maritime), vise à "recentrer le contenu de la stratégie nationale des aires protégées, sur une base plus en phase avec la définition de l’Union internationale de la conservation de la nature, et d’y intégrer l’indispensable lien avec la lutte contre le dérèglement climatique".
L’amendement n° 6188, déposé par la députée de Polynésie Maina Sage (Agir Ensemble), crée la possibilité pour l’État d’encourager le déploiement d’aires marines protégées en y attribuant des crédits bas carbone.
Philanthropie foncière (art. 57 bis A). Trois amendements (n° 5031, n° 1116 et n° 5057) visent à "encourager la philanthropie foncière", pour "participer à l’atteinte des objectifs fixés par la stratégie nationale des aires protégées". Ils proposent en effet d’exempter de droit de préemption des les donations au profit des personnes morales reconnues d’utilité publique "et dont l’objet principal est la protection de la biodiversité".
Vente de biens dans des zones à risques technologiques ou naturels (art. 58 A). À l’instar des , une communication sur les risques naturels et technologiques majeurs, les risques miniers et la pollution des sols concernant un bien immobilier sera publiée "dès l’annonce de la vente ou de la location, de manière à ce que le potentiel acquéreur soit informé le plus en amont possible de la future transaction", prévoit l’amendement n° 1997 de Stéphane Bouchu (LREM, Vendée) et de plusieurs députés de son groupe. Cette disposition va plus loin que le texte issu de la commission, qui demandait une information "lors de la première visite de l’immeuble". Pour faciliter la lecture des annonces, celle-ci renverra à des sites spécialisés comme Géorisques (sous-amendements n° 7456 et 7457 de Sandra Marsaud).
La même démarche est appliquée aux locations (amendement n° 1999 et sous-amendements n° 7459 et 7460 des mêmes députés).
Conseil national de la mer et des littoraux (art. 58 BA). L’amendement n° 1418 de Sophie Panonacle (LREM, Gironde), sous-amendé par le gouvernement, vise à intégrer les dispositions concernant le Conseil national de la mer et des littoraux dans le code de l’environnement. Reprenant à droit constant le périmètre du Conseil national de la mer et des littoraux, celui-ci est notamment chargé de "défini[r] les objectifs et [de] précise[r] les actions qu’il juge nécessaires pour l’aménagement, la protection et la mise en valeur de la mer et des littoraux, dans une perspective de gestion intégrée des zones côtières". L’amendement abroge également les articles 41 et 43 de la loi n° 86‑2 du 3 janvier 1986 relative à l’aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral.
Liste des communes subissant l’érosion du trait de côte (art. 58 B). L’amendement n° 2003 porté par Stéphane Buchou propose que le Comité national de suivi et de gestion intégrée du trait de côte, transformé en Comité national du trait de côte, soit saisi pour avis pour établir la liste des communes "dont l’action en matière d’urbanisme et la politique d’aménagement doivent être adaptées aux phénomènes hydrosédimentaires entraînant l’érosion du littoral", liste prévue à la section 7 du chapitre Ier du titre II du livre III du Code de l’environnement.
Bail réel immobilier de longue durée (art. 58). "Pour répondre aux attentes des territoires littoraux concernés par la dynamique littorale", les amendements n° 2011 et 2021 de Stéphane Bouchu "précise[nt] et grave[nt] dans le marbre" le calendrier de mise en application des dispositions prévues à l’article 58 sur le nouveau régime de contrat de bail réel immobilier de longue durée, "par lequel un bailleur consent à un preneur des droits réels, en contrepartie d’une redevance foncière, en vue d’occuper […] des installations, ouvrages et bâtiments situés dans des zones exposées au recul du trait de côte ou à des risques naturels aggravés par le changement climatique". Le gouvernement devra publier une ordonnance "obligatoirement au plus tard neuf mois à compter de la date de" promulgation de la loi et déposer un projet de loi de ratification "obligatoirement au plus tard trois mois à compter de la date de" cette promulgation.
Stratégies locales de gestion intégrée du trait de côte (art. 58). Les stratégies locales de gestion intégrée du trait de côte sont intégrées aux éléments à prendre en compte pour "définir ou adapter les outils d’aménagement foncier et de maîtrise foncière nécessaires à l’adaptation des territoires exposés au recul du trait de côte" (amendement n° 3939 de Sophie Pinacle).
Usage des drones (après l’art. 58). "Afin de pouvoir mener correctement les travaux de cartographie du littoral mais aussi de disposer de meilleures connaissances sur les phénomènes naturels en cours qui sont susceptibles d’avoir un impact sur les zones à enjeux et de contribuer à l’élaboration de l’information acquéreur locataire définie à l’article L. 125‑5 du Code de l’environnement", l’amendement n°5805 du gouvernement permet l’usage de drones, "dans un cadre toutefois rigoureux s’agissant de l’usage des données qui sera opéré" et qui sera précisé par un décret en Conseil d’État.