Les 6, 7 et 8 mars prochains se dérouleront à Agen (Lot-et-Garonne) les journées nationales d'études de l'Union nationale artisanale maçonnerie-carrelage (Capeb). Son président attend la publication de la loi Grenelle, et se prépare à une rude concurrence.
Pour sa troisième édition en tant que président de l'Union, Dominique Métayer annonce d'emblée : "Les maçons et les carreleurs sont au cœur des enjeux considérables liés aux économies d'énergie. Nous attendons aujourd'hui de connaître très précisément ce que contiendra la loi Grenelle, prévue avant l'été. Mais nous devons d'ores et déjà positionner nos entreprises sur ces marchés. Cela paraît une évidence, mais la concurrence va être rude."
Principal écueil
Principal écueil des entreprises artisanales : être identifiées comme acteur de cette problématique, aussi bien au niveau des particuliers, des grands acteurs de l'énergie que des responsables politiques. "Le poids de l'artisanat dans l'économie française est tel que les petites entreprises sont incontournables dans la mise en œuvre des politiques publiques liées au logement, assure Dominique Métayer. Et les maçons, parce qu'ils sont en lien direct avec les clients et qu'ils interviennent sur le bâti, doivent en tirer avantage." En construction neuve, peu d'inquiétudes. Les industriels mettent à disposition des professionnels des produits thermiquement performants avec les blocs à isolation répartie. Le recours aux hourdis isolants est courant, tout comme le devient la mise en place de rupteurs de ponts thermiques en rive de planchers.
"Le véritable enjeu, c'est la réhabilitation du parc existant, là où se trouvent les principaux gisements d'économies d'énergie", indique le président de l'Union nationale artisanale maçonnerie-carrelage. Evitant soigneusement de parler de diagnostic de performance énergétique - ne voulant pas se substituer aux diagnostiqueurs -, Dominique Métayer estime que le maçon doit être en mesure de procéder à une analyse précise du bâti. "Pourquoi les compétences que l'on nous reconnaît aujourd'hui dans l'application des réglementations comme la RT 2005 seraient-elles obsolètes demain ?"
Dans ce sens, la Capeb développe des outils d'aide aux calculs, à la préconisation de travaux, et propose des formations spécifiques. Les maçons devant par ailleurs cultiver le "réflexe énergie". Exemple : penser à isoler un plancher avant d'entreprendre la rénovation d'un revêtement carrelé. Dominique Métayer fait fi des dogmatismes techniques : "Si nous devons procéder à un ravalement de façade, pourquoi ne pas envisager une isolation par l'extérieur ?"
Vers le tous corps d'état ?
"Nous traitons aujourd'hui nombre de chantiers en lien direct avec nos clients. Il nous faut cultiver cette proximité à l'heure où une multitude d'opérateurs apparaît sur la place." Le président de l'Union est très prudent face aux grands acteurs du monde de l'énergie qui se veulent apporteurs d'affaires. « En nous cantonnant au rôle d'exécutants, nous perdons une grande part de ce qui fait l'intérêt de notre métier. Comment motiver les jeunes dans ces conditions ? » Pas question pour autant de déclarer la guerre aux grands réseaux, mais "notre collaboration avec eux doit être choisie et non subie". Le point fort du maçon, selon Dominique Métayer : un positionnement sans arrière-pensée. "Nul besoin de vendre des travaux pour obtenir des certificats blancs et pas de solution toute faite à proposer."
L'entreprise de maçonnerie-carrelage du futur est-elle une entreprise tous corps d'état ? "Non, répond Dominique Métayer. Personne n'a la prétention d'être compétent dans tous les domaines. C'est pourquoi nous encourageons la constitution formalisée de groupement de plusieurs métiers afin d'apporter une réponse globale aux clients." Si la recommandation d'un confrère est une pratique répandue, elle n'est pas visible. C'est pourquoi le patron de l'Union insiste sur la nécessité d'être identifiés par la clientèle en tant que groupement même si "chaque entreprise négocie et traite indépendamment avec le client". Au final, l'encouragement à un "mix" entre culture individuelle et jeu collectif.
Autre voie de progrès
Autre voie de progrès : développer les services après travaux, proposer de nouvelles garanties, assurer le suivi de l'ouvrage via un carnet d'entretien. "Vérifier les joints de jonction menuiserie-maçonnerie, la propreté des grilles de ventilation, l'état des souches de cheminée et effectuer les réparations nécessaires. Autant de prestations que nous pouvons proposer en service après-vente." Reste que dans la bataille pour l'amélioration de la performance énergétique du bâti, la TVA à 5,5 % est en première ligne. "Cette disposition est un levier essentiel pour permettre à nos clients d'entreprendre des travaux d'amélioration de leur habitat. Les politiques actuelles faisant du logement un produit de première nécessité, revenir sur la TVA à 5,5 % serait un total contresens."
Julien Beideler