Le réseau de chaleur et de froid du Village des Athlètes dopé par la géothermie

La Solideo met en place un nouveau réseau de chaleur et de froid sur le site du Village des Athlètes. Il sera raccordé au réseau existant de l’EPT Plaine commune, en accord avec son délégataire Engie Solutions. L’ensemble, qui profitera d’un apport géothermique, atteindra un taux EnR de 66 %.

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Le village des Athlètes en chantier. Au loin, la tour Pleyel.

« Notre objectif a été de diviser par deux les émissions de gaz à effet de serre émises par les ouvrages réalisés lors des Jeux olympiques et paralympiques 2024, depuis la construction des ouvrages jusqu’à leur fin de vie », pose Antoine du Souich, directeur de la stratégie et de l'innovation à la Société de livraison des ouvrages olympiques (Solideo). « Or, alliée à une conception bioclimatique, l’utilisation d’énergie renouvelable nous permet de décarboner à plus de deux tiers les bâtiments en exploitation », assure-t-il.

C’est pourquoi les équipes, avec Engie Solutions, se sont tournées vers un réseau de chaleur et de froid alimenté en base par de la géothermie pour chauffer et refroidir les bâtiments du Village des Athlètes. Y compris dans sa phase post-JO dite « Héritage », lors de laquelle les chambres des sportifs deviendront des logements et des bureaux, avec des commerces en pied. « Mais l’intérêt du réseau ne s’arrête pas là. Il maille un territoire plus vaste car il s’agira aussi de fournir l’énergie au futur hôtel de la tour Pleyel en réhabilitation ainsi qu’à la future ZAC Pleyel », projette Antoine du Souich. Cette mixité programmatique permettra de mutualiser des besoins différents et donc cumuler en simultané des besoins en chaud, comme le chauffage et l’eau chaude sanitaire pour les logements, et des besoins en froid comme le rafraîchissement pour les bureaux ou des restaurants par exemple. « De quoi construire une solution énergétique performante aussi bien sur le plan environnemental que tarifaire », souligne Antoine du Souich.

Se greffer au réseau existant

Pour approvisionner ces bâtiments tout au long de l’année, il a été décidé de mettre d'abord à profit le réseau existant de l'établissement public territorial Plaine Commune. « Ce réseau de 70 km délivrant une puissance de 360 GWh est le deuxième plus gros réseau d’Ile-de-France juste derrière celui, plus connu, de la Compagnie parisienne de chauffage urbain (CPCU). Il s’étend sur les commune de Saint-Denis, l’ile-Saint-Denis, Pierrefitte-sur-Seine, Aubervilliers et Stains. Son énergie de base, de la biomasse, permet d’atteindre aujourd’hui un taux d’ENR de 56 % », explique Yann Madigou, directeur général de Plaine Commune Energie chez Engie Solutions.

A l’été 2023 un nouveau réseau de 10 km, parcourant les souterrains du village, viendra se greffer à ce réseau déjà existant. Il alimentera le village des athlètes, la tour Pleyel et la ZAC des Lumières Pleyel soit 600 000 m2 de bâtiments. Une centrale de production, dont la construction du génie civil est en cours, abritera quatre thermo-frigo-pompes. Leur particularité : produire du chaud et du froid simultanément. « Elles alimenteront un réseau primaire de 4 km d’une eau chauffée à 60 °C et un autre réseau primaire de 3 km d’une eau glacée à 7°C », détaille Yann Madigou.

Ces réseaux, déroulés depuis mai 2021 jusqu’à l’été 2023, desserviront chacun une trentaine de sous-stations, qui seront réalisées lors du premier semestre 2023 dans les sous-sols des bâtiments, où se feront les échanges de calories pour fournir les bâtiments en chauffage, eau chaude sanitaire et refroidissement.

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La centrale de production du village des Athlètes accueillera quatre thermofrigopompes La centrale de production du village des Athlètes accueillera quatre thermofrigopompes (david Godichaud)

De la géothermie en base

En base, ce réseau sera donc nourri par de la géothermie sur aquifère du lutétien, dont l’installation a été réalisée de janvier à septembre 2021, à la ponte nord est du futur grand parc de Saint-Denis, face à l'Allée de Seine. Trois puits de production capteront une eau à 80 m de profondeur d’une température de 14°C. Elle sera rejetée plus loin par huit puits d’injection, avec une somme des débits de 325 m3/h égaux aux débits d’entrée. « L’installation géothermique, raccordée par 3 km de canalisation, fournira une puissance thermique de 2,6 MW, et permettra d’éviter 4500 t d’émission de CO2 / an », assure Yann Madigou, avec à l'appui de ces chiffres des études internes et les tests des puits après la phase de forage.  « Cet apport énergétique significatif permettra au réseau de Plaine commune de gravir la marche des 68 % d’ENR, sur le quartier Pleyel », poursuit-il. En appoint, pour le tiers restant, le réseau restera alimenté par du gaz naturel.

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Le réseau de chaleur et de froid du village des Athlètes sera dopé par de la géothermie. Le réseau de chaleur et de froid du village des Athlètes sera dopé par de la géothermie.

En complément, d’autres centrales de production seront aménagées par ailleurs. Un groupe froid sera posté sur les toits de la tour Pleyel, des chaudières gaz sur le technicentre de la SNCF, et une autre centrale de la CPCU dans les locaux de la RATP.

In fine, ce bouquet énergétique produira 30 GWH en consommation de chaud et 14 GWh de froid par an pour les territoires de Saint-Denis et Saint-Ouen.

Le montant total des investissements s’élève lui à 26,8 millions d’euros HT

28°C moins de 60h/an dans les logements en 2050

Le réseau de chaleur et de froid du Village des Athlètes, greffé à celui de Plaine commune, alimenté aux deux tiers par des énergies renouvelables, porte une autre innovation. « Nous avons comme objectif que l’intégralité du village soit confortable au climat de 2050, c’est-à-dire que même les pièces les plus chaudes des logements ne dépassent une température de 28°C que moins de 60 heures par an, sur une année moyenne de 2050 », explique Antoine du Souich, directeur de la stratégie et de l'innovation à la Solideo. « Les solutions passives telles que la configuration urbaine, l’enveloppe bioclimatique ou la ventilation naturelle sont efficaces pour répondre au climat actuel, mais insuffisantes au regard des prévisions réalisées avec Méteo France pour les décennies à venir », affirme-t-il.

Pour lui, une façon d’y arriver est d’apporter « à dose homéopathique » du froid aux logements, au moyen d’une solution globale. C’est donc cet objectif en tête que la Solideo et Plaine commune Energie ont fait le choix de raccorder tous les bâtiments, les bureaux comme les logements, au réseau de froid. « Nous souhaitons travailler une intelligence de délestage entre un tertiaire qui recevra du froid et des logements qui en auront besoins à un certain moment », détaille Yann Madigou, directeur général de Plaine Commune Energie chez Engie Solutions.. Les conditions de service restent, elles, à inventer. « L’enjeu n’est pas de distribuer du froid en quantité, qui génèrerait des consommations d’énergie et de carbone supplémentaires, mais bien de répondre à des questions sanitaires d’habitabilité des logements, et d’éviter des solutions de climatisation au cas par cas qui aurait des effets néfastes sur le climat », exprime Antoine du Souich.

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