Après presque trois ans d’application de la Réglementation environnementale 2020, la filière s’est réunie en octobre dernier pour livrer ses retours d’expérience et préciser le texte. Sans en modifier l’ambition ou les grands équilibres, le décret n° 2024-1258qui en résulte, paru le 30 décembre 2024 et entré en vigueur au 1er janvier 2025, traite de situations particulières jugées contraignantes et pour lesquelles des ajustements sont nécessaires.
Le surplus de matériaux inhérents aux logements de petites surfaces pris en compte
« L’une des problématiques que nous avons relevées concerne les bâtiments de logements collectifs constitués de petits appartements [dont la surface moyenne est inférieure à 40 m², NDLR], comme les résidences étudiantes par exemple », pointe Guillaume Meunier, consultant bas carbone pour l’Institut français pour la performance du bâtiment (Ifpeb), qui a participé à la consultation publique.
En effet, la multiplication des logements implique de nombreuses cloisons, et une plus grande densité d’équipements sanitaires au regard de la surface. Soit un surplus de matériaux par rapport à des logements aux surfaces plus élevées, qui ne sont pas prises en considération par la RE 2020, ce qui rend les seuils difficilement atteignables. « Le décret apporte une modulation qui assouplit l’exigence sur l’indicateur carbone de la construction (Ic construction) pour en tenir compte », indique l’expert.
« D’autre part, pour les bâtiments d’habitation collective de petite taille (d’une surface de référence inférieure à 1300 m²), un assouplissement de l’exigence carbone a été introduit, afin de contrebalancer l’impact des ascenseurs dans la comptabilisation des émissions, alors même que leur installation est obligatoire », complète le ministère de l’Aménagement du territoire et de la Décentralisation.
Se raccorder à des réseaux de chaleur peu vertueux sans augmenter son poids carbone
Le décret concerne aussi les réseaux de chaleur urbain (RCU). En effet, au titre du Code de l’énergie (article L. 712-1), les RCU alimentés à plus de 50 % par une énergie renouvelable ou de récupération sont classés. D'où une obligation de raccordement des bâtiments neufs dans leur zone de développement. « Or certains réseaux classés n’atteignent pas cette année un niveau de décarbonation suffisant pour permettre aux bâtiments qui y sont raccordés de respecter les exigences de la RE 2020 pour le jalon 2025 », pointe le ministère.
Le décret vise ainsi à ne pas renforcer en 2025 les exigences de l’indicateur relatif à l’impact carbone de l’énergie (Ic énergie) pour l’ensemble des bâtiments raccordés à un RCU classé. « Il prévoit l’utilisation de l’indicateur Ic énergie_max de 2022, un coefficient qui permet d’atteindre le seuil réglementaire dans un contexte de raccordement obligatoire », complète Guillaume Meunier. « En parallèle, ces assouplissements invitent au verdissement de la chaleur et des réseaux, même si une grande inertie subsiste à cause des investissements et des travaux à mener », déplore-t-il.
Par ailleurs, le décret prévoit un allégement des exigences pour les maisons raccordées à un réseau de chaleur ou de froid pour correspondre à un niveau d’ambition similaire à celui applicable aux logements collectifs.
Des panneaux photovoltaïques en quantité
Le décret met en place une troisième adaptation importante : « Elle étend la modulation spécifique déjà accordée aux panneaux photovoltaïques installés en bureau à l’ensemble des typologies de construction soumises à la RE 2020, afin de valoriser cette technologie », décrypte le ministère. À l’origine, ce changement a été instauré, car la loi relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables (Aper) de 2023 impose aux bureaux l’installation de panneaux photovoltaïques. Elle permet de limiter leur impact sur le poids carbone des matériaux (comptabilisé par l’Ic construction) pour ne pas défavoriser les projets soumis à cette obligation. Désormais, « la directive européenne révisée sur la performance énergétique des bâtiments adoptée en 2024 imposera le déploiement d’installations d’énergie solaire pour tous les types de constructions neuves », rappelle le ministère. En conséquence, « cette modulation s’étend à l’ensemble des typologies soumises à la RE 2020, afin d’inciter à installer des panneaux photovoltaïques en toiture en quantité, sans nuire aux atteintes des objectifs carbone », explique Guillaume Meunier.
Le décret prévoit aussi un ajustement des exigences énergétiques pour les zones chaudes en basses altitudes pour mieux tenir compte des contraintes locales du pourtour méditerranéen. Rappelons que toutes ces modifications sont applicables depuis le 1er janvier 2025, et coïncident donc avec le nouveau jalon 2025 de la RE 2020.