Le bureau de Frédéric Chareton résonne d’éclats de voix. Paul Amiette, ATC, homme de terrain en sort brutalement, direction le distributeur à café, avec son visage des plus mauvais jours. Jacques André, le responsable marketing achats, la tasse à la main et le sourire au lèvre, l’interpelle :
- Alors, Paul, positif cet entretien avec Frédéric ? En fait, nous nous sommes affrontés sur la façon dont j’organise mon travail. De ce différend, j’en déduis que mon chef ne m’aime pas ! Jacques André, conscient du problème, tente d’apaiser son jeune collègue :
- Allons, calme-toi ! Comme tous les commerciaux, tu es un grand affectif mais tu as une chance exceptionnelle de travailler sous l’autorité du meilleur des directeurs d’agence. Mais que s’est-il passé au juste ? - Fréderic Chareton me reproche mon manque de professionnalisme. J’ai eu droit à toutes les remontrances classiques adressées à un commercial : “tu passes trop souvent à l’agence, les clients sont sur les chantiers, non au bureau”, “ton portefeuille clientèle est mal équilibré”, ou encore “tu ne fais pas assez de prospects, tu ne dégages pas assez de marge, tes devis sont mal ficelés”. Jacques l’interrompt : - Arrête. Ton chef est de nature anxieuse, toujours sous pression, la crainte de ne pas atteindre les résultats attendus plane au-dessus de lui et le rend nerveux. Il est exigeant avec ses collaborateurs, comme avec lui-même ! - Mais, je suis dans mes objectifs, s’insurge Paul. Et il le sait, mais n’en a pas parlé. Dans ces conditions, je ne peux pas bien vivre la situation. Quand résultat rime avec engueulade, c’est démotivant. C’est bien la peine que je me défonce pour l’entreprise si mon travail n’est pas reconnu. Mon prédécesseur avait raison : “Moins on en fait, mieux cela vaut”.
Jacques le coupe sèchement : - N’exagère pas ! Si tu as atteint tes objectifs, tu as dû toucher ta prime ?
- Peut-être, mais ce trop-plein de pression me donne envie de flanquer ma démission et d’aller voir ailleurs… Chez nos concurrents. A cet instant, Frédéric Chareton débouche du fond du couloir et s’approche du distributeur à café, cœur des Négociants Réunis. - Qui parle de partir ? Pas toi, Paul ? Un bon savon n’a jamais fait de mal à personne. Tu as du potentiel, des capacités mais il faut encore améliorer ton organisation. Je ne doute pas qu’avec un peu d’efforts tu y arrives, et ce n’est pas Jacques qui me contredira. N’est-ce pas Jacques ?
