Éric Boilley peut être rassuré. Selon le directeur de LCB, « la greffe a bien pris ». Engagée dans une « démarche de progrès » depuis mi-2006, l’association a déjà convaincu 32 sociétés – un quart de ses membres – de parapher la Charte environnementale. Et vingt autres d’ici la fin de l’année. Parmi les prochains entrants ? Accueil Négoce Bois que LCB a rencontré cet été. « Toute une filière est en marche pour modifier les habitudes de consommation », prêche ce héraut de l’éco-matériau. Fin juillet, « 60 % des membres d’Expert Relais Bois étaient signataires de la charte sur les 240 négoces labellisés, calcule Michel Bouchalais, animateur du réseau. L’évolution de notre modus operandi accélèrera le mouvement. Outre le FCBA, des organismes privés peuvent maintenant auditer la chaîne de contrôle des distributeurs ».
Certains vont plus loin. À l’instar de Wolseley France qui purge certains comptes fournisseurs (voir p. 12). À côté des grands noms du secteur, des indépendants aussi sont actifs. Comme le Comptoir Cévenol du Bois (CCB) certifié Pefc en juin. Dans le Gard, l’hyperspécialiste fait même de la résistance. Voilà un an, Stéphane André, le Dg, a budgété 1 M€ pour doter son dépôt d’Alès d’un nouvel atelier de seconde transformation. Près de 2 000 m² où se côtoient scie à plat à commandes numériques, plaqueuse de chant, ponceuse, scie à format. Cet équipement high-tech lui permet de mieux fidéliser ses clients. Et de se positionner sur l’agencement, les collectivités. « Grâce à des délais très courts : à J 1 sur le standard ; jusqu’à 72 h chrono pour le travail à façon. Services et réactivité restent nos seules armes pour garder notre indépendance », lâche le dirigeant. Un “ gros mot ” dans un climat de concentration ?
« Le ralentissement de la construction [mises en chantier à - 6,6 % sur 12 mois à fin juillet, selon le Meeddat] va sans doute intensifier les opérations de croissance externe. D’autant que moins de 10 % du parc évolue encore sous le régime de l’indépendance pure. La Loi de modernisation de l’économie et son volet sur la négociabilité commerciale risquent d’accélérer ce mouvement de fond pour optimiser la compétitivité des achats », observe Géraud Spire, à la tête de la CNBM. Du coup, c’est un peu le jeu de chaises musicales.
Des généralistes très offensifs
Après un passage éclair chez Sylvalliance, l’emblématique Fargeaudoux est entré chez VM Matériaux à l’été 2007. « Une adhésion qui renforce notre image bois », confiait alors Philippe Audureau, président du groupe vendéen. Entre temps, via Atlantem, l’adhérent MCD a étoffé son pôle fabrication en reprenant, dans l’Ouest, des acteurs de la menuiserie industrielle. Dernier en date : BTP Charpentes, fin juillet. Une logique similaire qui, en 2006, avait conduit son alter ego rhônalpin, le groupe Samse-Doras, à s’allier à Henry Timber ; un négociant et importateur de bois sur Grenoble. « Ce partenariat offre un soutien logistique pour déployer, entre autres, le concept Moboa au sein de MCD [45 sites à fin 2008] », se félicite Olivier Malfait, président du directoire. Fin 2008, la plate-forme passera de 40 000 à 50 000 m² couverts.
Pour « continuer de relancer son pôle bois [123 M€ HT de CA en 2007, hors M ] », le distributeur régional a recruté, fin août, un Dg issu du sérail ; les dépôts spécialisés n’étant alors plus gérés par les directeurs régionaux de Samse et Doras. Selon Jérôme Thfoin, « ce segment est un relais de croissance sur un marché du gros œuvre en repli ». Comme pour enfoncer le clou, le directeur marketing du groupe annonce le déploiement d’un “ Indicateur Moboa ” chez MCD. Ce panel d’une quarantaine de produits de construction bois suivra l’évolution des ventes chez les huit adhérents du groupement. Moyen aussi de vérifier que l’offre – bordée par les futures échéances : RT 2010 et 2015, BBC dès 2012… – répond aux attentes des clients. « Sous l’effet du Grenelle, la croissance s’oriente résolument vers des marchés encore plus techniques et des métiers aux compétences élargies. Charpentiers et menuisiers veulent s’adosser à de vrais centres d’expertise leur apportant des solutions clé en main », rappelle Patrick Bertrand, Dg adjoint chargé des enseignes de spécialités du Groupe Point. P. Allusion à deux récents rachats, alors que le distributeur continue sa course en tête sans sourciller. D’un côté, le francilien Fabre ; un ex-Sylvalliance intégré fin 2007. De l’autre, le varois CBC ; un adhérent Nébopan repris en mai. À eux deux, ces hyperspécialistes apportent dans la corbeille près de 33 M€ HT de CA additionnel. Et – surtout ! – un indéniable savoir-faire industriel que la filiale de SGDB veut harmoniser dans ses réseaux. Du coup, chez le nordiste Dubois, un plan d’investissement est en route. Ses dépôts lyonnais et nantais s’équiperont en atelier de menuiseries intérieures.
Pas question pourtant de mettre sur pied la griffe Point. P Bois ! Ce serait, tout au plus, une marque ombrelle pour ses enseignes multirégionales (Dispano et Dubois) et son réseau azuréen Sicobois qui vient d’ouvrir un dixième dépôt.
Contre-feux des groupements
Gedimat, lui, a franchi le Rubicon. Après moult tentatives avortées en quinze ans, le groupement vient de formaliser Gedibois. « Aujourd’hui, les adhérents spécialisés bois-panneaux drainent environ 10 % de notre CA. Cette seconde enseigne permettra de fédérer des indépendants non regroupés (estimés à environ cent dépôts) avec l’appui d’une centrale structurée ayant adapté son concept au bois-panneaux. La société Souillac à Sarlat [24] l’a déjà adopté », dévoile Yves Martin-Delahaye, président du directoire de Gedex. Pendant ce temps, Wolseley France entre dans une période de turbulences. Alors que, sur onze mois, le bénéfice d’exploitation a fondu de 15 % (à fin juin), un plan prévoit de fermer 40 agences (bois-matériaux, sanitaire-chauffage) et la suppression de 400 postes. Engagés dans une rationalisation du back office, Réseau Pro et Panofrance continuent d’optimiser la logistique. Avec, notamment, la mise en route d’une sixième plate-forme régionale Batimob en 2009.
Sur un marché très bataillé, le “ club des trois ” contre-attaque chez CMEM. À la tête de la division Bois & Matériaux d’Accueil Négoce – fonction créée en avril 2007– , David Fillon, ex-Placoplatre, annonce les priorités : « Continuer d’investir dans l’outil de production [450 k€ sur 2008] pour se lancer dans le pré-débit de Mob, voire à terme le mur à ossature bois. S’appuyer sur la nouvelle organisation par secteur géographique pour favoriser la croissance externe en bois et… matériaux ». Quant au concept Solumob initié il y a deux ans, les premières maquettes seront exposées courant 2009. Son confrère, Sylvalliance, envisage aussi de renforcer ses sites de production pour « répondre aux besoins de produits finis dans des délais très courts ». Après l’arrivée l’an dernier du rhodanien Junet Bois, des Ets Chossière au sud de Paris et le rachat de CBI (6 agences dans le Nord, 40 M€ HT) par Barillet, « nous pouvons encore nous renforcer en Normandie, dans l’Est et le Centre. Sans pour autant lancer une course effrénée aux adhésions ! Au regard de notre structure actuelle, nous n’irons pas au-delà d’une vingtaine de membres », tempère Dominique Riou, délégué général.
Un effet de seuil qu’Alain Bessière, le président de Nébopan qui vient de recruter le bordelais MBA (41 M€ HT), ne souhaite également pas dépasser ; son groupement devant visser l’année « aux alentours des 400 M€ HT, pour une puissance d’achat d’environ 250 M€ ». Alors que Tanguy (Altéral) vient de monter à 51 % dans le capital du breton Hue, l’un des vingt adhérents Nébopan. L’Orcab s’active aussi. Son chargé de développement, Marc Alezier, annonce quatre ouvertures de coopératives bois depuis janvier et un projet « bien avancé » dans le Jura. En attendant une consolidation européenne de la distribution, neuf scieurs du Massif alpin se sont alliés au sein d’AlpSciage. « La marque fait écho au souci de massifier les achats en centrales », plaide son président, Jean-François Lapierre. Tandis que l’indépendant CCB pourrait un jour… rejoindre un groupement. La fièvre de l’or vert est sans doute à ce prix.
Le poids des spécialistes en 2007 (valeur en M€ HT) 2007 | 2005 | |
CMEM dont : | 749 | 635,7 |
Nébopan | 345 | 294,7 |
Sylvalliance | 290 | 250 |
Accueil Négoce | 114 (1) | 91 |
Wolseley France | 715 | 611(2) |
Groupe Point. P | 550 | 630(3) |