L'Aquitaine s'inquiète pour ses approvisionnements en granulats

Lors de son dernier colloque, début juillet, l'Unicem Aquitaine, qui fédère 850 entreprises de production et transformation de granulats a tiré la sonnette d'alarme. L'approvisionnement se tarit et les ouvertures de carrières sont de plus en plus longues à obtenir. Autre pique: le port de Bordeaux s'apprête à importer massivement des granulats étrangers ce qui pourrait déstabiliser totalement la filière aquitaine.

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Patrice Gazzarin, Président de l'Unicem

Entre les élus et l’Unicem, le dilemme est le suivant: alors que la demande en granulats augmente, et que l’offre stagne, comment faire accepter aux habitants la nécessité d’ouvrir de nouveaux sites d’exploitation ? Les élus réunis par l’Unicem lors de son dernier colloque début juillet à Bordeaux, ne cachent pas la difficulté: «l’attractivité démographique du territoire aquitain et particulièrement de la métropole bordelaise engendre des besoins accrus en logements et en infrastructures. Ce qui suppose une production de granulats soutenue dans les années à venir, alors même que se pose la question de l’acceptabilité des carrières au sein de nos territoires. De fait, l’ouverture de nouveaux sites est devenue rare» témoigne Dominique Alcala, vice-président de Bordeaux Métropole et maire de Bouliac.

Menace de pénurie ? C’est ce qu’annonce Patrice Gazzarin, président de l’Unicem Aquitaine. «Pour faire face à la demande en Aquitaine et répondre aux besoins d’aménagement et de construction, il faudrait deux fois plus de carrières». Les experts y voient une tendance de fond: «la mondialisation génère le repli local, la remise en cause de l’Etat comme seul dépositaire de l’intérêt national et le syndrome Nimby, «not in my backyard» » explique Philippe Subra, professeur à l’Institut français de géopolitique. Malgré tous les efforts d’information et d’explication, la concertation n’apporte toujours pas les résultats escomptés. Enfin, la décision finale n’est pas la décision collective, elle appartient à l’autorité décisionnaire».

La balle serait donc dans le camp des élus qui jouent un rôle majeur dans l’implantation des carrières ? Certains tiennent bon, comme a pu en témoigner Alain Sanz, maire de Rébénacq (64) et président de l’association des maires de Pyrénées-Atlantiques: «malgré les réticences de la population, j’ai maintenu le projet de création d’une carrière. Ce que je ne regrette pas: il a su concilier économie, emploi et bien entendu environnement avec des impacts bien maîtrisés; la carrière est maintenant intégrée dans son territoire». Mais c’est aussi la responsabilité des services de l’Etat dans le processus de décision qui a été rappelée, notamment sur l’aspect prospectif. Pour l’Unicem, «il est capital d’exprimer les besoins en matériaux dès les documents d’urbanisme, qui préparent les gisements de demain. Economiquement, les carrières de proximité garantissent un coût économique et écologique acceptable pour la collectivité».

Des importations qui fragilisent l’emploi local

Encore faut-il jouer à domicile. Mais que faire face à une concurrence annoncée de granulats importés ? Il y a quelques mois, l’Unicem s’inquiétait de l’installation d’un nouveau terminal portuaire à Grattequina en aval de Bordeaux, avec un soutien financier conséquent de l’Etat, de la région, du département de la Gironde et de la métropole. «Le soutien financier public conséquent témoigne d’un double constat: celui, enfin partagé par les acteurs publics sur les difficultés croissantes que rencontrent les industriels pour accéder aux ressources locales et approvisionner dans des conditions satisfaisantes les chantiers locaux, décidés par ces mêmes collectivités.»

Mais aussi, un constat d’échec sur la capacité de ces mêmes acteurs à prévoir les conditions d’approvisionnement durable dans leurs documents d’urbanisme, dans les schémas d’infrastructures et de transport, les schémas de carrières. Alors que la ressource est disponible localement. «Sur le plan économique, les exportateurs étrangers se sont alignés sur les prix de marché, mais si on détruit la ressource locale, alors ils seront seuls, et la région Aquitaine sera captive de ce schéma d’approvisionnement.»

Conclusion de Patrice Gazzarin «les pouvoirs publics doivent aussi prendre leurs responsabilités. Cette situation est d’autant plus insupportable et paradoxale quand on sait que la région dispose des ressources nécessaires».

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