Huit entrepreneurs s'associent pour remédier au dépôt de bilan d'un promoteur

Baisser les bras suite au dépôt de bilan d'un promoteur, une fatalité ? Huit PME arrageoises viennent de démontrer avec succès le contraire. Ainsi, lorsque la SCI Minelle, filiale du promoteur immobilier Europanord, a déposé son bilan en juin 2000, son passif atteignait environ 5 millions d'euros (32,8 millions de francs). Le projet était sain, la moitié des appartements avaient été commercialisés, mais Europanord avait utilisé pour d'autres sociétés les créances bancaires mises en place pour financer le chantier. Les deux tiers des travaux avaient été réalisés, et les entreprises avaient déjà encaissé un tiers du montant total (6,86 millions d'euros, soit 45 millions de francs), mais il en restait un tiers à régler, et la même proportion en prestations à effectuer. Dans un scénario classique, la SCI aurait été liquidée, son opération cédée à bas prix et les entrepreneurs, créanciers chirographaires, n'auraient rien touché ou presque. A Arras, ils sont donc montés au créneau pour mener le projet à son terme et limiter les pertes. Après le dépôt de bilan, ils se sont retrouvés à la Fédération du bâtiment. Un avocat leur a expliqué comment présenter leurs créances et en a regroupé une partie.

Hervé Oudar, directeur général de Holbat (entreprise générale), et Pascal Pawlaczyk, gérant de l'entreprise de peinture Saudemont, se sont fait nommer contrôleurs. Selon Me Weppe, l'avocat arrageois qui les a assistés, «cette démarche, qui positionne les créanciers en position de partie jointe à la procédure, a l'avantage d'ouvrir l'accès à toutes les audiences et à toutes les informations». Les deux ambassadeurs du groupement ont ainsi pu prendre connaissance de l'audit du cabinet Argos Bâtiment Conseil, montrant la viabilité du projet. Pour éviter une cession qui aurait ouvert la voie aux surenchères, ils décident de proposer un plan de redressement par continuation.

Holbat, Saudemont et six entreprises (Legrand, SGEE, Numéro Bis, Cannata, Roos et Deneuville) ont créé une nouvelle entité juridique, la société Nouvelle Minelle, dont ils sont chacun actionnaires proportionnellement au montant de leur créance.

Pour poursuivre l'activité de l'ancienne SCI, les entrepreneurs devaient reprendre son passif, eux-mêmes étant prêts à ne recouvrer que 30% de leurs créances. Une négociation bien menée avec les banques a permis de ramener le volume des créances bancaires à reprendre de 290 000 à 168 000 euros.

Enfin, le Groupe Hainault Immobilier (GHI) a joué un rôle décisif. Le bailleur social, qui avait déjà acheté 32 logements, a accepté d'acquérir une deuxième tranche de 37 logements. Cette opération, assurant un apport de trésorerie essentiel pour la relance du chantier, ne laissait que 12 appartements à commercialiser par les nouveaux opérateurs.

Le tribunal de commerce a donné son feu vert en mars, et les travaux ont repris à marche forcée (vendus aux particuliers dans le cadre de l'amendement Périssol, les appartements devaient être terminés en juillet). La dernière tranche sera bouclée à la fin de l'année.

Les entrepreneurs ont tiré un enseignement de leur expérience : désormais, ils demandent aux maîtres d'ouvrage privés de leur fournir, comme la loi l'impose, des garanties de paiement pour tout marché supérieur à 12 000 euros.

PHOTO : HERVE OUDAR, directeur général de l'entreprise générale Holbat (à droite), et Pascal Pawlaczyk, gérant de l'entreprise de peinture Saudemont, ont créé, avec six autres entreprises nordistes, une nouvelle société afin de pouvoir poursuivre leur chantier de construction de 104 logements.

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