Bonne nouvelle : les engagements de financement de FEEBat - la formation professionnelle aux économies d’énergie dans le bâtiment - ont été reconduits. Une nouvelle fois, EDF la co-finance à hauteur de 50 millions d’euros grâce au dispositif des certificats d’économies d’énergie (CEE). Officialisée en janvier dernier par Cécile Duflot, ex-ministre du Logement, et Philippe Martin, ex-ministre de l’Ecologie, cette nouvelle ère FEEBat semble plus favorable à son essor : le dispositif constitue en effet une des pierres angulaires du plan de rénovation énergétique de l’habitat dévoilé en mars 2013 et de son objectif de 500 000 logements rénovés par an d’ici à 2017. Créé en 2008, pour mettre en œuvre le Grenelle de l’environnement, le programme FEEBat a eu dès l’origine pour vocation d’accompagner entreprises et artisans sur les marchés liés à la performance énergétique. Une petite révolution car il devait leur permettre d’intégrer de manière systématique cette dimension dès l’amont d’un projet. D’où la mise en place avec le concours de l’Ademe, de la Capeb, d’EDF et de la FFB, de trois modules FEEBat réservés à la rénovation puis, par la suite, de deux autres (dont un pour le marché du neuf), et pris en charge dans le cadre du dispositif des CEE. Au total, « 66 000 stagiaires ont été formés dans FEEBat depuis 2008 », dévoile Christina Nirup, chef de la formation externe à l’Ademe. Mais, l’engouement pour FEEBat n’a pas toujours été évident.
L’éco-conditionnalité pour moteur
Il a fallu attendre 2013, période à laquelle « la formation FEEBat est devenue un outil pour mener à la mention complémentaire RGE* et au principe d’éco-conditionnalité », remémore Laurent Martin Saint-Léon, délégué général de la Fédération du négoce de bois et des matériaux (FNBM), pour que FEEBat décolle réellement. D’environ 10 000 stagiaires formés par an depuis 2008 - avec plutôt des creux - FEEBat rencontre enfin le succès et atteint son record de 20 000 candidats l’année dernière. Et pour cause : l’éco-conditionnalité en vigueur dès le 1 juillet prochain va conditionner le versement des aides de l’État au financement des travaux de rénovation énergétique réalisés par les particuliers (voir notre enquête p. 36). Ces travaux devront être réalisés par des professionnels porteurs de cette mention RGE, qui devront justifier des compétences d’un référent technique. Et ils devront - pour la plupart - en passer par FEEBat. En effet, même si les qualifications Qualit’EnR suffisent à la démarche RGE, l’Ademe conseille de suivre les modules 1 et 2 en plus. Et pour les entreprises certifiées Qualibat ou Qualifelec avec des mentions d’efficacité énergétique et celles qui se tournent vers les démarches Pro de la performance énergétique de la FFB ou Eco-Artisan de la Capeb, FEEBat est un incontournable (modules 1 et 2, voire 3 dans certains cas).
2014-2017 : la troisième ère FEEBat
Mais, le nombre d’entreprises RGE sera-t-il suffisant alors que l’éco-conditionnalité démarre le 1 juillet prochain, et que FEEBat cherchait encore ses marques en mars dernier ? L’objectif gouvernemental de 30 000 entreprises RGE fin 2014 sera-t-il atteint ? Sans aucun doute selon Christina Nirup. « En 2013, 18 000 mentions RGE ont déjà été délivrées. » Pour accompagner les nouveaux candidats, « certains modules existants, ou dits équivalents FEEBat, vont disparaître au profit d’un module dédié RGE. Il tiendra compte des compétences du référent technique RGE obligatoire dans l’entreprise », poursuit Christina Nirup. Pour l’instant, la Direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP) rédige le décret sur l’éco-conditionnalité qui donnera lieu à un arrêté précisant la formation adaptée RGE. Dès 2015, des organismes de formation pourront se faire habiliter pour diffuser ce module RGE. Mais en attendant, 2014 va être une année transitoire : « une liste de formations va être vite validée pour permettre aux entreprises de choisir quelles formations suivre en attendant la mise en place complète du système pour 2015. Nous avons une visibilité pour FEEBat jusqu’en 2017, alors que la précédente convention de 2013 ne courrait que sur un an », rappelle la responsable formation externe de l’Ademe. Tout en précisant que l’intérêt de FEEBat est qu’elle soit financée, « mais cela ne devrait pas durer », ajoute Christina Nirup. Autre élément de cette ère 14-17 : elle vise en priorité les entreprises du bâtiment et leur mention RGE. Si le négoce y restera « toujours bien sûr associé, il n’est pas la priorité dans ce programme FEEBat version 2014/2017 », note Christina Nirup. D’ailleurs, les fins observateurs l’auront peut-être détecté lors de sa visite à Batimat en novembre dernier : venue pour signer les trois nouvelles chartes RGE, Cécile Duflot dévoilait que le négoce pourrait être concerné par l’éco-conditionnalité. Mais au travers de la certification ou du référentiel de qualité plutôt que par la formation FEEBat.
Peut-être la fin du financement FEEBat pour le négoce
La coupe budgétaire pour le négoce était-elle déjà programmée ? « Lors du dernier comité de pilotage de FEEBat, il est apparu une incertitude sur le fait que la prise en charge du financement des modules de formations FEEBat, pour les collaborateurs des négoces professionnels des produits du bâtiment, puisse être reconduit dans le cadre de la convention devant être signée entre les pouvoirs publics, EDF et les organisations professionnelles», confirme Jean-Pascal Chirat, vice-président de la Fédération du négoce sanitaire-chauffage (Fnas). « Cette décision, si elle se confirmait, ne manquerait pas de créer une situation préjudiciable aux négoces. En effet, les résultats des exercices précédents, produits par l’Opca Intergros, démontrent une forte assiduité des personnels grossistes à ces formations jugées d’un grand intérêt (près de 2 000 stagiaires pour le bilan 2011/2013) ». Aussi Jean-Pascal Chirat ajoute-t-il : « Les fédérations professionnelles souhaitent donc que le dispositif soit maintenu ». D’autant plus, pourraient arguer les négociants, que l’enveloppe financière sollicitée par le négoce est d’un montant relativement faible au regard du montant global évoqué de 50 millions d’euros sur trois ans pour l’ensemble du dispositif. Un brin de paille… qui pourrait malgré tout peser dans la balance, face à l’engouement des entreprises du bâtiment pour se former à FEEBat, et qui risque de voir les 50 millions d’euros s’épuiser avant la fin de la nouvelle ère 14-17. Une relance budgétaire dans le cadre des CEE sera-t-elle alors décidée ? Personne ne peut répondre pour l’instant à cette question. «La formation FEEBat est un des moyens importants permettant de gagner en performance et il serait dommage d’en limiter l’effet», conclut Jean-Pascal Chirat. «Même si les acteurs du négoce n’ont pas attendu ce dispositif pour se mobiliser en faveur de la rénovation énergétique de l’habitat, notamment en soutenant activement la démarche RGE auprès des professionnels concernés par la mise en place des règles de l’éco-conditionnalité.»