Une mesure de mise en conformité au droit européen dont se seraient bien passés certains porteurs de projet. Un décret du 25 mars 2022 introduit une clause-filet dans la procédure d’évaluation environnementale pour les projets situés en deçà des seuils de la nomenclature « étude d’impact ». Ce texte fait suite à l’injonction du Conseil d’Etat prononcée en avril 2021. Les juges du Palais-Royal avaient estimé que la nomenclature annexée à l’article R. 122-2 du Code de l’environnement ne permettait pas de garantir que tous les projets susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement fassent effectivement l’objet d’une évaluation environnementale.
Examen au cas par cas
Le décret rectifie le tir et crée un article R. 122-2-1 au Code de l’environnement prévoyant que l’autorité compétente pour autoriser ou recevoir la déclaration soumet à un examen au cas par cas tout projet, « y compris de modification ou d'extension », situé en deçà des seuils fixés à l’annexe de l’article R. 122-2, qui lui apparaît susceptible d'avoir des incidences notables sur l'environnement ou la santé humaine. « L'autorité compétente pour la première demande d'autorisation ou déclaration déposée » doit informer le maître d'ouvrage de sa décision motivée dans les quinze jours à compter du dépôt du dossier. Le maître d’ouvrage doit alors saisir l’autorité en charge de cet examen au cas par cas (ministre chargé de l’environnement, Autorité environnementale ou préfet de région selon les cas – voir art. R. 122-3 du Code de l’environnement). Etant précisé que le porteur de projet peut décider de saisir lui-même l’autorité en charge de cet examen au cas par cas.
Par ailleurs, le décret prévoit des dispositions d’articulation avec certaines procédures d’autorisation et de déclaration pour « permettre d’activer ce dispositif », avait précisé le ministère de la Transition écologique lors de la présentation du projet du décret en janvier dernier.
Les dispositions retouchées concernent principalement le contenu du dossier et les délais d’instruction applicables aux installations, ouvrages, travaux et activités soumis à la loi sur l’eau (Iota), aux sites inscrits et classés, aux ICPE soumises à déclaration, aux autorisations de défrichement, et à l’utilisation et occupation du domaine public maritime.
Projets loi sur l’eau
Pour les Iota soumis à autorisation ou à déclaration, le dossier devra comprendre, outre les pièces déjà requises, « la mention des demandes d’autorisation ou des déclarations déjà déposées pour le projet d’installation, d’ouvrage, de travaux ou d’activité au titre d’une autre législation, avec la date de dépôt et la mention de l’autorité compétente » (art. D. 181-15-1 et R. 214-32 du Code de l’environnement).
Lorsque le préfet soumet le projet relevant de l’autorisation à un examen au cas par cas, « le délai d'examen du dossier et les délais laissés aux autorités, organismes et personnes consultés dans cette phase d'examen » sont suspendus. « Cette suspension est levée à la réception, par le préfet, soit de la décision de ne pas prescrire d'évaluation environnementale […], soit de l'étude d'impact prévue à l'article L. 122-1 » (art. R. 181-16 du Code de l’environnement).
Pour les projets relevant de la déclaration, le délai laissé au préfet pour s’y opposer sera interrompu s’il décide de recourir à l’examen au cas par cas. Si l’autorité chargée de cet examen dispense d’évaluation environnementale, « un nouveau délai de deux mois court à compter de la réception de cette décision par le préfet ». Si une évaluation environnementale est prescrite, le déclarant doit alors informer « le préfet de la procédure qui fait office d'autorisation au sens de l'article L. 122-1. L'opération soumise à déclaration fait l'objet d'une décision d'opposition expresse » (nouvel art. R. 214-35-1 du Code de l’environnement).
ICPE soumises à déclaration
Pour les ICPE soumises à déclaration, le décret complète l’article R. 512-48 du Code de l’environnement et précise que le déclarant peut mettre en service et exploiter l’installation 15 jours après la délivrance de la preuve du dépôt de son dossier, sauf si le préfet soumet le projet à l’examen au cas par cas. Dans ce cas, la mise en service ne pourra intervenir qu’après une décision de dispense d’évaluation environnementale ou qu’après une autorisation, lorsque l’autorité chargée de l’examen au cas par cas aura conclu à la nécessité de réaliser une évaluation environnementale. Dans tous les cas, le déclarant doit transmettre au préfet la décision de cette autorité.
Autorisations de construire
Enfin, le décret retouche plusieurs dispositions du Code de l’urbanisme relatives aux autorisations de construire (déclaration préalable, permis de construire, d’aménager et permis de démolir). A noter notamment que le délai d’instruction de droit commun des déclarations préalables (un mois) est majoré de deux mois lorsque le projet est soumis à participation du public par voie électronique (art. R. 423-25 du Code de l’urbanisme).
Un nouvel article R. 451-6-1 vient aussi prévoir que le dossier joint à la demande de permis de démolir devra comprendre le cas échéant :
- « l'étude d'impact ou la décision de l'autorité chargée de l'examen au cas par cas dispensant le projet d'évaluation environnementale ». Il reviendra alors à l'autorité compétente pour délivrer l'autorisation d'urbanisme de vérifier que le projet « est conforme aux mesures et caractéristiques qui ont justifié la décision de l'autorité chargée de l'examen au cas par cas ;
- l'étude d'impact actualisée [...] ainsi que les avis de l'autorité environnementale compétente et des collectivités territoriales et leurs groupements intéressés par le projet rendus sur l'étude d'impact actualisée. »
Décret n° 2022-422 du 25 mars 2022 relatif à l'évaluation environnementale des projets