Quel impact aura l'euro sur votre politique commerciale ?
L'euro va influencer une donnée fondamentale pour l'entreprise : l'expression du prix. Bien préparer en interne les changements que l'euro va engendrer permettra de mieux en tirer profit en externe. La création de la monnaie unique et la suppression des risques de change dans la zone euro offriront de nombreuses opportunités (un accroissement considérable des sources d'approvisionnement, le développement de nouveaux produits, l'ouverture de nouveaux marchés et des échanges à risques moindres). Mais aussi des contraintes, notamment avec la période transitoire : le choix du moment de traduction des tarifs et catalogues, la définition de nouveaux prix, le double affichage, la modification de certains conditionnements, l'adaptation des processus de facturation et d'encaissement (développement du paiement électronique et scriptural). Inévitablement, la transparence accrue des prix en Europe due à l'euro provoquera un rapprochement des niveaux de prix et des pratiques commerciales, ce qui peut vous amener à modifier profondément vos politiques tarifaires et d'achats.
Clients ou fournisseurs peuvent-ils imposer le passage à l'euro dès le début de la période transitoire ?
D'un point de vue juridique (Conseil de Madrid de décembre 1995, projet de règlement européen sur l'introduction de l'euro), personne ne pourra vous imposer de basculer votre comptabilité à l'euro : il s'agit d'une décision de gestion interne. Vos clients pourront néanmoins payer dans la monnaie du contrat ou en euros.
D'un point de vue pratique, les relations clients/fournisseurs restent contractuelles. Rien ne pourra donc empêcher une entreprise de chercher à imposer à ses clients et/ou fournisseurs des conditions générales de ventes, des bons de commande ou des factures en euros. Aussi, le Conseil national de l'euro a entériné une règle de bonne conduite et d'autodiscipline déterminée par le groupe de travail Simon/Creyssel pour que le coût et les contraintes d'un passage à l'euro au cours de la période transitoire soient pris en charge par l'entreprise qui en aura l'initiative. Ce qui devrait conduire à ce que :
en tant que fournisseur, vous ne puissiez convertir votre système de facturation à l'euro que si vous êtes en mesure de continuer à émettre des factures en francs pour les clients qui le souhaiteraient ;
en tant que client, vous ne puissiez convertir votre système d'achats que si vous êtes en mesure de continuer de passer vos commandes en francs aux fournisseurs le souhaitant.
D'un point de vue technique, les fonctionnalités de vos logiciels comptables seront déterminantes. Si vous avez déjà une comptabilité auxiliaire multidevises capable de recevoir et émettre des factures en francs et en devises, le respect du principe énoncé ne posera pas de problème. Sinon, la situation dépendra de votre activité :
si vous souhaitez conserver vos systèmes monodevises parce que votre entreprise n'a pas vocation, après 2002, à émettre ou à recevoir des factures dans plusieurs devises, vous pourrez conserver une comptabilité auxiliaire pour traiter deux unités monétaires pendant la période transitoire. Et vous passerez directement à une organisation « tout en euros » le 1er janvier 2002.
si vous pensez avoir rapidement un nombre significatif de clients ou fournisseurs souhaitant traiter en euros, l'achat d'un nouveau logiciel pourrait se justifier.
Faut-il modifier les chaînes de facturation ou d'achat dès 1999 ?
Vous ne pourrez pas totalement éviter de gérer des flux en francs et des flux en euros au cours de la période transitoire. Deux types de problèmes peuvent se poser :
Un problème de monnaie de règlement, qui devrait être résolu car les banques convertiront les flux arrivant sur votre compte ;
un problème de lettrage, résultant du fait que la facture et le règlement d'une commande pourraient être libellés dans deux monnaies différentes, avec pour conséquence des arrondis de conversion ne permettant plus de rapprocher facture et règlement. Pour minimiser les modifications à apporter aux chaînes de facturation et d'achat pendant cette période, vous avez intérêt, pour chaque contrat ou opération, à définir contractuellement avec votre client/fournisseur l'unité utilisée.
Quelles modalités retenir pour le double affichage des prix ?
A compter du 1er janvier 1999 : dans le cas d'un double affichage de vos prix en francs et en euros, votre prix en euros doit être calculé en appliquant strictement les règles de conversion et d'arrondissage (fiche 4 ; Le Moniteur du 13 février 1998, p. 33).
Avant le 1er janvier 1999 : si vous voulez sensibiliser votre clientèle à l'utilisation de l'euro avant son introduction, le Conseil national de la consommation recommande de respecter ces principes : se fonder sur la valeur de l'écu ; utiliser six chiffres, respecter les règles d'arrondissage, préciser le taux de conversion.
Comment les grands facturiers vont-ils réagir ?
On désigne sous les termes de « grands facturiers » les entreprises telles que EDF, GDF, France Télécom, La Poste, les grands distributeurs d'eau. Trois questions se posent, relatives à l'unité monétaire qui sera utilisée pour la tarification, la facturation et le règlement.
La tarification : les grands facturiers s'orientent vers un maintien de leurs tarifs en francs jusque vers la fin de la période transitoire.
La facturation : a priori, le principe est aussi celui du maintien en francs. Certains proposeront néanmoins une facturation en euros dès 1999, le choix pouvant n'être offert qu'aux grands comptes. A partir du 1er janvier 1999, la plupart des grands facturiers devraient cependant pratiquer un double affichage minimal (libellé en euros du total TTC par exemple).
Les moyens de paiement : vous serez libre du choix de l'unité de règlement des factures jusqu'en 2002.
A RETENIR
Quel impact commercial ?
L'euro va amener les entreprises à reconsidérer leurs politiques tarifaires et d'achats à tous les niveaux
Quand basculer ?
Le choix du moment pour intégrer ces changements sera fonction de votre activité et du comportement de vos clients et fournisseurs.
Quels critères de décision ?
Personne ne peut obliger une entreprise à basculer dès 1999. Mais toute entreprise doit pouvoir accepter des flux en francs et en euros dès cette date.