En théorie, l'aluminium est un métal recyclable à 100 % et à l'infini, sans perte de ses qualités intrinsèques de légèreté, de résistance et de durabilité. Mieux, recycler un kilogramme d'aluminium permet d'économiser 95 % d'énergie par rapport à la production d'un matériau vierge. La filière a donc entamé en 2013 sa structuration afin de pouvoir collecter et refondre d'anciens profilés. Mais la réutilisation de l'aluminium des menuiseries en nouveaux éléments est loin d'être effective. Pourquoi ? Entre autres raisons, parce que le matériau est très convoité par les industriels de l'automobile, qui réutilisent les deux principaux alliages de la construction, le 6060 des menuiseries et le 6005 des garde-corps.
Dès qu'il est revendu à des ferrailleurs, le précieux métal échappe au secteur de la construction. Ces derniers l'expédient chez des opérateurs capables de le débiter en « chips » d'aluminium. C'est le cas de Derichebourg Environnement qui, fort de son réseau de 175 points de collecte, traite ensuite le métal dans ses usines grâce à un process complexe et coûteux nécessaire à son parfait nettoyage. « Il faut enlever les joints de caoutchouc, le zinc et tous les résidus de colle ou de laque susceptibles d'altérer la qualité, et donc les performances, du produit en sortie de ligne », explique Abderrahmane El Aoufir, directeur général délégué de Derichebourg Environnement. Dans sa filiale de Lomme (Nord), la société produit chaque année 77 400 tonnes d'aluminium recyclé, à destination, essentiellement, du secteur automobile.
Intégrer 75 % de métal recyclé dans les fenêtres. Afin d'améliorer la collecte des menuiseries en fin de vie et de capter leur propre gisement, les industriels s'organisent. Ainsi, le SNFA, l'organisation professionnelle qui regroupe les concepteurs, fabricants et installateurs de menuiseries en aluminium, cherche à améliorer la traçabilité des produits. Elle doit publier en fin d'année une étude sur le marché du recyclage accompagnée d'une estimation du gisement urbain que représentent les bâtiments conçus dans les années 1970.
De son côté, depuis 2019, le groupe Hydro, connu en France pour les marques Technal, Wicona et Sapa, recycle 24 000 tonnes de menuiseries en fin de vie à Dormagen, en Allemagne. L'industriel prévoit d'ouvrir une nouvelle usine en Espagne en juin afin de traiter chaque année 20 000 tonnes de produits post-consommation. Si ces quantités paraissent dérisoires au regard des besoins conjoints des secteurs du bâtiment et du transport, estimés à 750 000 tonnes/an par Aluminium France, elles permettent néanmoins déjà au groupe Hydro de produire ses premières fenêtres avec 75 % de métal recyclé. L'empreinte carbone du matériau, baptisé Circal 75R, est de 2,3 kg d'équivalent CO2 pour un kilo d'aluminium produit. Une performance, comparé à l'aluminium de première fusion européen (6,8 kg de CO2) ou chinois (20 kg de CO2).
Pour aller plus loin, c'est la conception des profilés qu'il faudra revoir
Concevoir des menuiseries modulaires. Mais pour aller vraiment plus loin, c'est la conception même des profilés qu'il faudra revoir. Pour l'instant, « adapter d'anciens châssis à des constructions neuves reste une opération difficile et coûteuse », rappelle Nicole Perez, directrice marketing et développement du groupe Hydro. A long terme, c'est bien l'écoconception de menuiseries modulaires qui semble être la meilleure option.