Environnement - Loi d'orientation agricole : panorama des mesures qui touchent le BTP

Protection et gestion des haies, espèces protégées, contentieux… La loi du 24 mars 2025 vise aussi à faciliter la vie des porteurs de projets de construction et d'aménagement.

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Loi d'orientation agricole
Loi d'orientation agricole

Promulguée le 24 mars 2025, la loi n° 2025-268 d'orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture vise entre autres à apporter des réponses aux protestations du monde agricole. Trois nouveautés législatives méritent d'être mises en lumière dès lors que leur champ d'application est susceptible de concerner tout maître d'ouvrage, et pas seulement les exploitants agricoles.

Un cadre juridique unique pour les haies

Les haies font l'objet de réglementations diverses, poursuivant des objectifs différents, qu'il s'agisse du droit de l'environnement, notamment la législation relative aux espèces protégées, du droit de l'urbanisme, à travers les mesures de protection dont elles peuvent faire l'objet dans les plans locaux d'urbanisme (PLU) ou encore des règles de la politique agricole commune (PAC).

Protection et gestion durable. L'article 37 de la loi crée un régime administratif unique des interventions ayant vocation à impacter les haies, en créant dans le Code de l'environnement (C. env.) une nouvelle section consacrée à la protection et la gestion durable des haies (art. L. 412-21 et suivants).

Elles sont désormais définies comme une unité linéaire de végétation, autre que des cultures, d'une largeur maximale de vingt mètres et qui comprend au moins deux éléments parmi les trois suivants : arbustes, arbres et autres ligneux.

Exclusion. Ne constituent pas des haies au sens de ces dispositions, les allées et alignements d'arbres (y compris ceux qui ne bordent pas les voies ouvertes à la circulation publique), les haies implantées en bordure de bâtiments ou sur une place qui constituent l'enceinte d'un jardin ou d'un parc attenant à une habitation ou qui sont situées à l'intérieur de cette enceinte, ainsi que les haies existant sur la chaussée d'un chemin rural.

Déclaration unique préalable. Le nouvel article L. 412-22 du Code de l'environnement soumet « tout projet de destruction d'une haie » à une déclaration unique préalable, à l'exception notable des travaux nécessaires à la préservation du gabarit de sécurité des infrastructures linéaires qui relèvent d'une logique d'entretien. Ainsi, si la destruction de la haie est assujettie à l'un ou plusieurs des régimes de déclaration visés à l'article L. 412-24 dudit code, la déclaration unique en tient lieu. Le silence de l'administration au terme d'un délai de quatre mois à compter de la réception de la déclaration vaut absence d'opposition.

Autorisation. L'autorité administrative peut indiquer à l'auteur de la déclaration que la mise en œuvre de son projet est subordonnée à une procédure d'autorisation lorsqu'une des législations mentionnées à l'article L. 412-24 précité soumet la destruction de la haie à une telle autorisation préalable. La déclaration est alors instruite comme une demande d'autorisation unique (art. L. 412-23 C. env. ). Si la destruction de la haie est induite par un projet soumis à autorisation environnementale, c'est ce régime qui s'applique et qui embarque la déclaration ou l'autorisation « haie » (art. L. 181-2 C. env.)

Champ d'application. Les décisions rendant applicables les régimes de déclaration ou d'autorisation unique sont, notamment, la dérogation espèces protégées, l'absence d'opposition au titre de Natura 2000 ou encore l'absence d'opposition à déclaration préalable pour les travaux en espaces boisés classés ou sur des éléments protégés par le PLU lorsque la décision est prise au nom de l'Etat.

Compensation. Toute destruction de haie est subordonnée à des « mesures de compensation par replantation d'un linéaire au moins égal à celui détruit », et sous réserve d'éventuelles prescriptions nécessaires au respect des intérêts protégés par les législations mentionnées à l'article L. 412-24 précité (art. L. 412-25 C. env.). L'objectif est de parvenir à une augmentation nette du linéaire de haies de 50 000 kilomètres à horizon 2030.

Sanctions. Le fait de détruire une haie en cas d'opposition à la déclaration ou en l'absence de l'autorisation unique est puni de peines d'amendes allant jusqu'à 750 euros, sans préjudice d'éventuelles sanctions administratives. Un décret en Conseil d'Etat, dont la publication est envisagée pour décembre 2025, précisera les conditions d'application de ces nouvelles dispositions.

   L'article 37 de la loi crée un régime administratif unique des interventions ayant vocation à impacter les haies.

Le délit d'atteinte aux espèces protégées réformé

L'article L. 415-3 du Code de l'environnement définit le délit d'atteinte à la conservation d'espèces protégées, qu'il s'agisse de la violation d'interdictions pures et simples ou de la méconnaissance de dérogations espèces protégées (art. L. 411-2 I 4° C. env.).

Pour mémoire, la Cour de cassation a jugé qu'une faute d'imprudence ou de négligence suffisait à caractériser l'élément moral du délit (Cass. crim., 18 octobre 2022, n° 21-86.965, publié au Bulletin). Cette approche a été remise en cause par l'article 31 de la loi, âprement débattu, qui limite la répression aux seuls cas d'atteintes commises intentionnellement ou par négligence grave. En pratique, cette évolution devrait donc exclure toute possibilité de poursuite fondée sur une imprudence ou une simple négligence.

Amende administrative. L'administration peut néanmoins ordonner le paiement d'une amende administrative d'un montant de 450 euros maximum (art. L. 171-7-2 C. env.). La nouvelle rédaction de l'article L. 415-3 étant plus douce, elle s'applique immédiatement aux faits commis avant son entrée en vigueur dès lors qu'aucune condamnation définitive n'est intervenue.

Un régime contentieux adapté

Un an après la publication du décret n° 2024-423 du 10 mai 2024, qui a adapté la procédure contentieuse applicable notamment aux ouvrages hydrauliques agricoles et aux autorisations environnementales, le législateur a complété le dispositif en créant - à compter du 1er septembre 2025 - un régime dédié au contentieux de certaines décisions en matière agricole (art. L. 77-15-1 et s. du Code de justice administrative, art. 44 de la loi).

Cette réforme ne concerne que certains projets, dont les ouvrages de stockage d'eau ou de prélèvements sur les eaux superficielles ou souterraines à la condition que ces projets poursuivent à titre principal une finalité agricole. Une liste fixe les décisions (autorisation environnementale, dérogation espèces protégées, non-opposition à déclaration préalable ou permis délivrés en matière d'urbanisme…) bénéficiant du nouveau régime contentieux.

Régularisation et suspension. Ainsi, le législateur a, d'une part, créé un régime de régularisation similaire à celui de l'article L. 181-18 du Code de l'environnement et d'autre part, restreint les conditions du référé-suspension. Ce dernier ne peut être présenté que jusqu'à l'expiration du délai fixé pour la cristallisation des moyens. La condition d'urgence est présumée satisfaite, et le juge doit statuer dans le délai d'un mois. Enfin, est introduit un régime de suspension du délai de validité des autorisations accordées jusqu'à la notification de la décision juridictionnelle irrévocable au fond.

Ce qu'il faut retenir

  • La loi du 24 mars 2025 d'orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture comprend des mesures intéressant le secteur de la construction.
  • Elle instaure un régime administratif unique pour les haies dans le Code de l'environnement. Ainsi, toute intervention sur les haies doit dorénavant faire l'objet d'une déclaration ou autorisation préalable unique. Des mesures compensatoires doivent être mises en place en cas de destruction de haies.
  • La répression du délit d'atteinte aux espèces protégées est désormais limitée aux seuls cas d'atteintes commises de manière intentionnelle ou par négligence grave.
  • Enfin, la loi crée un régime contentieux spécifique en faveur de certains projets comme les ouvrages de stockage d'eau.
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