C’est l’histoire d’un rendez-vous maintes fois repoussé, presque tenu puis annulé. Attendue depuis des mois et des mois, la publication de la 3e programmation pluriannuelle de l’énergie est passée par pertes et profits emportée dans la chute du gouvernement Bayrou.
Pourtant le décret était prêt, sa publication au JO du 1er août annoncée aux rédactions le 31 juillet et puis patatras.
« Ce décret il faut réaliser que ce sont 200 pages d’annexes », rappelle Jules Nyssen, président du Syndicat des énergies renouvelables (SER). « Et les équipes du Journal officiel ont indiqué qu’elles n’avaient pas les capacités pour publier du jour au lendemain le texte dans l’édition du 1er août. Il y a eu un nouveau délai qui a fourni l’occasion à François Bayrou de reporter encore une fois la publication. »
Fin des appels d’offres
Toujours pas de PPE à la rentrée donc et toujours les mêmes problèmes pour la filière de l’énergie française : « Nous nous sommes habitués aux retards mais jusqu’à présent, nous étions couverts par les textes programmatiques et les séquences d’appels d’offres de la PPE2 (2019-2028). Or nous arrivons aujourd’hui au bout du bout de ces éléments programmatiques », alerte Jules Nyssen. « Rappelons qu’une PPE couvre 10 ans en deux périodes de cinq ans. La première période présente des objectifs précis par filière et la deuxième, de simples tendances. C’est dans cette période-là où nous évoluons actuellement et que la première période de la PPE 3 (2025-2035) devait venir remplacer. »
En l’absence de nouveaux objectifs chiffrés précis, les projets vont donc progressivement s’arrêter. « Il n’y a pas de document support qui permet de justifier les soutiens publics aux différentes filières », confirme Jules Nyssen. « Pour prendre un exemple dans les EnR avec l’éolien en mer : il n’y a plus assez de volume cible dans la PPE 2 pour lancer l’appel d’offre n°10 de 10GW. Au maximum ça pourrait être 2 GW ce qui est très insuffisant. Pour les autres filières comme le photovoltaïque, il reste de la marge mais à terme, tout s’arrête en 2028. Il n’y a plus de visibilité pour une industrie qui est une industrie du temps long. Ce qui va avoir pour effet de stopper les projets. Les industriels ne vont en effet pas engager des moyens sans visibilité sur le soutien public qu’il soit financier ou réglementaire. »
Menace sur le nucléaire
Autre effet inattendu : alors que la France doit relancer son programme nucléaire, la PPE2 prévoit, elle… son arrêt. « La PPE actuellement en vigueur prévoit que la France ferme en 2027 et 2028 deux réacteurs nucléaires et 14 d’ici 2035 », rappelle Jules Nyssen. « Et que le gouvernement devra désigner les réacteurs qui devront fermer d’ici la fin de l’année…Tous ceux qui ont lutté contre la publication de la PPE ont donc porté un coup à la relance du programme nucléaire », ironise-t-il.
Reste comme issue la proposition de loi Grémillet de programmation énergétique, qui va reprendre sa navette parlementaire, qui permettrait de résoudre le problème. « S’il est en conformité avec la loi, le décret pourrait être publié immédiatement », assure Jules Nyssen. Mais pour ça il faut une loi et un nouveau gouvernement.