Enfin une vision globale sur la sinistralité des balcons

A quelques semaines de l’ouverture, en janvier prochain, du procès faisant suite à l’effondrement d’un balcon à Angers ayant entraîné la mort tragique de quatre personnes, l’Agence Qualité Construction (AQC) a rendu public son rapport sur la sinistralité des balcons. Le point avec son auteur, l’expert en béton armé Jean-Pierre Thomas.

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Après, l’effondrement d’un balcon à Angers, le 15 octobre 2016, qui avait provoqué la mort de quatre jeunes gens et fait 14 blessés, les autorités ont commandé un rapport à l’Agence Qualité Construction sur la sinistralité de ces éléments architecturaux.

Il y aurait en France entre 10 et 15 millions de bacons. Plébiscité par les Français lors du premier confinement, cet élément d’architecture devrait se développer fortement dans les années à venir. Aussi, le rapport « Balcons : points de vigilance » que l’Agence Qualité Construction (AQC) vient de rendre public tombe à point nommé. « L’objectif était de dresser un état des lieux des désordres observés sur les balcons, des pathologies liées à la garantie décennale comme des problèmes d’infiltrations jusqu’aux atteintes à la solidité, puis de dresser une série de recommandations » explique son auteur, Jean-Pierre Thomas, directeur technique adjoint du groupe Stelliant, branche Expertise Construction. L’étude avait été finalisée en novembre 2019 mais les autorités ministérielles ont mis du temps à la valider.

Vers la rédaction d’un guide sur la conception et la réalisation

Ce rapport a été commandé par la Direction de l’Habitat de l’Urbanisme et des Paysages (DHUP) du ministère de la Cohésion des territoires après l’effondrement d’un balcon à Angers, le 15 octobre 2016, qui avait provoqué la mort de quatre jeunes gens et fait 14 blessés.

Toutefois, même si les trois expertises diligentées par le juge d’instruction en charge de l’affaire confirment l’existence de malfaçons dans la construction de l’immeuble, le cas d’Angers ne figure pas parmi les 192 dossiers et les quelque 350 rapports d’expertises analysés dans ce document, prévient Jean-Pierre Thomas, du fait que l’ouvrage avait largement dépassé le délai décennal après réception. De fait, les analyses portent sur des bâtiments livrés entre 2001 et 2015.

Reste que ce document de 36 pages est une grande étape dans la connaissance de ce type d’événements et sera probablement suivi de recommandations techniques officielles qui, pour l’heure, font défaut. « Au-delà de ce rapport, l’AQC a été missionnée pour réfléchir, avec les organismes professionnels concernés, à la rédaction d’un guide sur la conception et la réalisation des balcons, déclare Jean-Pierre Thomas. Une première réunion devrait avoir lieu début 2021. »

Problème n° 1 : l’infiltration

A l’image du marché, la plupart des défaillances ont été constatées dans des immeubles résidentiels et sur des ouvrages en béton (plus de 90 %). « Je me suis rendu compte que près de la moitié des pathologies étaient dues à des défauts d’infiltration » précise l’expert. Dans deux cas sur trois, des fissurations ont été constatées au niveau de la jonction entre la dalle du balcon et la façade. Coulage des balcons ou éléments préfabriqués, les deux grands systèmes constructifs sont concernés de la même manière.

Egalement à l’origine de certains dégâts : une trop faible pente, des défauts sur les systèmes d’étanchéité et un vieillissement des matériaux (décollement des carrelages ou d’enduit). Les risques liés à la structure ou les atteintes à la solidité (en particulier les flexions excessives) ne représentant que 15 % des cas étudiés. Sont le plus souvent mis en cause un défaut de positionnement des armatures, un excès d’enrobage ou encore une insuffisance de section d’armatures.

S’ils sont très minoritaires, du fait d’une faible part de ce type d’ouvrage dans l’ensemble de la construction nationale, les pathologies concernant les ouvrages en bois ont également été examinées. Deux risques principaux ont été observés : des attaques de champignon liées aux soucis de stagnation d’eau et les problèmes constructifs entraînant un dommage à la solidité. « La construction bois ne se satisfait pas d’à peu près » résume Jean-Pierre Thomas.

Les coûts de reprise de ces pathologies se situent dans une moyenne située autour de 28 000 euros allant de 5 700 euros pour des simples problèmes d’infiltration à des factures de 120 000 euros pour des problèmes d’atteinte à la solidité.

Enfin, même si quelques situations ubuesques ont pu être constatées comme l’installation d’un jacuzzi ou d’une piscine, la question des usages semble peu problématique, les balcons ou terrasses étant très largement dimensionnés avec une résistance calculée pour une charge d’exploitation théorique de 350 kg/m², contre 150 à l’intérieur des logements.

Des contrôles nécessaires

Les défauts étant clairement identifiés, le rapport formule une série de propositions pour renforcer la sécurité des balcons. Concernant la construction même, il recommande la définition d’une pente minimale (1,5 % semble une valeur consensuellement admise) ou encore que les principes d’encastrement des dalles en porte-à-faux à la façade soient définis pour limiter la complexité des dispositions d’armatures (notamment lors de présence de rupteurs thermiques, de plus en plus fréquents).

Enfin, le rapport préconise également de systématiser et de formaliser un système de contrôles interne et externe, impliquant tous les acteurs.

Sur les bâtiments existants, à l’image du contrôle technique obligatoire pour les automobiles, Jean-Pierre Thomas recommande un suivi périodique des constructions et la réalisation de diagnostics portant sur la solidité des ouvrages, plus ou moins approfondis, notamment au-delà d’un certain âge. Et l’expert de citer un des rares exemples en vigueur. « A Monaco, lors des Grands prix automobiles, un arrêté fixe les conditions d’occupation des balcons et impose de faire vérifier les structures par un organisme agréé » raconte-t-il. A suivre donc.

Le rapport « Balcons : points de vigilance » publié en novembre 2020 par l’Agence Qualité Construction (AQC) :

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