En 2021, la transition écologique est encore insuffisamment prise en compte par les porteurs de projets

L’Autorité environnementale a publié le 11 avril son rapport annuel. Elle y constate notamment un décalage important entre les ambitions des porteurs de projets et leurs moyens d’action en matière de transition écologique.

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Rapport AE 2021
Rapport annuel 2021

Avec 159 avis rendus (contre 91 en 2020), l’année 2021 s’est avérée « exceptionnellement chargée » pour l’Autorité environnementale (Ae) qui a mis en ligne le 11 avril 2022 son rapport annuel d’activité. 2021 a également été caractérisée par une saisine sur un « nombre inégalé » de plans et programmes (68), en particulier ceux prescrits par des directives européennes (schémas directeurs d’aménagement et de gestion de l’eau [Sdage], plans de gestion des risques inondations [PGRI] et documents stratégiques de façade [DSF]). A titre de comparaison, l’Ae avait instruit 45 plans et programmes en 2019 et 26 en 2020. Mais « elle a aussi dû renoncer à émettre 13 avis faute de moyens suffisants pour les examiner », précise le rapport.

Dossiers inédits

L’instruction de « nombreux dossiers inédits » (nucléaire notamment) a permis à l’autorité d’aborder un panel diversifié de politiques publiques. Dans son rapport, elle consacre ainsi 5 zooms aux thématiques pour lesquelles 2021 a constitué une année charnière : la transition énergétique, la politique agricole, l’eau, l’adaptation au changement climatique et les outils financiers au service de la transition écologique. 

Comme elle l’avait déjà indiqué dans son rapport annuel 2020, l'Ae note que les évolutions induites par l’ordonnance du 3 août 2016 (réforme de l’évaluation environnementale) sont encore « insuffisamment assimilées » par les porteurs de projets, en particulier pour ceux introduits avant l’ordonnance. Elle relève malgré tout une progression dans la compréhension de la notion de projet, le contenu et l’actualisation des études d’impact.

Progression lente pour l'aménagement et les infrastructures

Pour les projets d’aménagements et d’infrastructures, la progression est observable mais lente. L’Ae continue à déplorer souvent une absence d’actualisation des études d’impact initiales. Le cas des zones d’aménagement concerté (ZAC) mérite toutefois une mention particulière : « Plusieurs maîtres d’ouvrage veillent à compléter leurs études d’impact initiales et, à cette occasion, à revoir leur programmation si nécessaire ». Ce qui démontre « une meilleure appréhension du processus d’évaluation et de sa finalité », afin qu’à l’issue du processus décisionnel le projet ait le moins d’impact possible sur l’environnement et la santé.

Concernant les infrastructures de transport, l’Ae constate des dossiers « de plus en plus soignés et solides ». Saisie notamment sur les nouvelles lignes de TGV Montpellier-Perpignan (LNMP) et Provence-Alpes-Côte d’Azur (LNP-CA), elle relève que « la qualité des études d’impact mérite d’être soulignée. » Sur les dossiers impliquant à la fois l’organisation des déplacements et des aménagements, l’Autorité regrette toutefois « une approche technique dépourvue d’une réflexion suffisante sur les usages et le cadre de vie. » 

Attention accrue nécessaire pour les projets industriels

L’actualisation des études d’impact des projets industriels devrait elle aussi faire l’objet d’une attention accrue par les porteurs de projet. L’Ae insiste notamment sur la nécessité de décliner pleinement la notion de « projets » aux projets industriels, en rupture avec la logique d’« installation » des autres réglementations et pour que les incidences sur l’environnement soient évaluées de façon globale.

Avec 11 avis rendus sur des demandes de cadrage préalable (*), l’Ae indique que le recours à cette procédure devient plus fréquent, dénotant « une volonté accrue des maîtres d’ouvrage de sécuriser la démarche d’évaluation environnementale et l’enquête publique », ce qui constitue une démarche positive à souligner.

Un écart préoccupant entre ambitions et moyens d’action

Alors que l’année 2021 a été marquée par la parution de la loi Climat et résilience, l’autorité consacre un « zoom » à la prise en compte de la transition écologique par les porteurs de projet.

Le constat est sans appel : alors que « le changement climatique et l’effondrement de la biodiversité sont à l’œuvre », l’Autorité environnementale déplore un écart préoccupant entre les ambitions environnementales affichées par les projets et les dossiers tels qu’ils sont présentés. La transition énergétique reste encore insuffisamment prise en compte, notamment sur la réduction nécessaire des consommations énergétiques.

Elle exhorte ainsi les maîtres d’ouvrage à se montrer plus exigeants sur la prise en compte de ces enjeux, en particulier concernant les projets d’aménagement et d’infrastructures. La « sobriété énergétique et la baisse des émissions de gaz à effet de serre restent à inscrire dans les plans / programmes et projets », avertit l’Ae. Pour y remédier, les auteurs préconisent notamment un suivi consolidé, aux niveaux territorial et national, des émissions de gaz à effet de serre de tous les projets pour « mieux apprécier le décalage entre des objectifs de plus en plus ambitieux et la réalité. »

Ces insuffisances apparaissent aussi dans les plans et programmes. Amenée notamment à rendre quatre avis sur des plans de programmation énergétique (PPE, S3REnR, PCAET), l’autorité reconnaît des objectifs « ambitieux » mais « souvent fixés sans rapport avec les moyens effectivement déployés pour les atteindre ». En l’état, l’Ae considère que ces plans et programmes « ne sont pas à la hauteur de l’objectif fixé dans l’Accord de Paris de limiter le réchauffement climatique à 1,5°C. »

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