Distribution sanitaire-chauffage : les mutations s’accélèrent pour les négoces spécialisés

Sur un marché qui ne redémarre toujours pas, les spécialistes sanitaire-chauffage doivent faire face aux appétits d'autres segments de la distribution professionnelle ainsi qu'à la montée des ventes Internet. 

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Sur un marché évalué à 7,3Mds € les leaders se renforcent

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Sur un marché évalué à 7,3Mds € les leaders se renforcent Sur un marché évalué à 7,3Mds € les leaders se renforcent

L'effondrement des ventes depuis mi-novembre 2012 n’augure pas d’une année 2013 très positive pour le négoce sanitaire-chauffage. Un coup dur pour le secteur qui, depuis trois ans, voit le segment du chauffage échouer dans ses tentatives de relance. D’autant que, parallèlement, la concurrence des négoces électriques s’est intensifiée et que de nouveaux acteurs montrent de l’appétit pour le marché : quincailliers, multispécialistes des matériaux, sans parler des acteurs du Net.

«En 2013, nous devons défendre nos marges»

Patrice Guiraud, président de la Fnas

"Le segment de la salle de bains en 2012 a clairement mieux fonctionné que le chauffage.Même des secteurs que nous avions identifiés comme porteurs et qui sont, objectivement, les sources de progression de nos marchés sont très bagarrés alors qu’ils devraient permettre une montée en gamme. En 2013, le négoce va devoir se battre pour défendre ses marges brutes attaquées par les clients, et ses marges nettes sapées par les charges et les taxes. Il va falloir trouver des économies et on peut s’attendre à une crispation sur les emplois. Mais nous devons plus que jamais former nos équipes, être encore plus performants et convaincre sur notre offre et nos services. Il ne faut pas hésiter à aller sur d’autres marchés et je pense clairement à la cible des électriciens. Enfin, nous espérons un plan de relance des EnR par une politique de crédits d’impôts intelligente et pérenne."

Dans cet environnement anxiogène, le rachat de Brossette par le groupe Point. P (même si la cession de son enseigne sanitaire-chauffage par Wolseley n’était pas une surprise) a entraîné beaucoup d’interrogations chez les concurrents. La puissance de feu de ce nouveau pôle Cedeo/Brossette, en termes d’achats et d’organisation logistique et informatique, pourrait faire la différence… ou non ! Car le travail à réaliser est énorme et le groupe Point. P ne laisse filtrer aucune information (celui-ci a d’ailleurs refusé de répondre à cette enquête).

En attendant les effets de cette concentration, les indépendants réunis au sein du groupement Algorel et les groupes multirégionaux (Aubade, Richardson, Tereva) se renforcent. Ainsi, selon une étude de Développement Construction, 48 % des ventes du secteur sont captées par des groupes indépendants dont le chiffre d’affaires dépasse les 30 M€ HT. Ces négociants sont particulièrement actifs sur le segment de la salle de bains. Porté par la progression des ventes en sanitaire depuis 2011, le négoce a en effet fortement investi sur les salles d’exposition. Des efforts récompensés si on en croit la hausse des visites en showrooms rapportée par la plupart des intervenants.

Cultiver la relation au particulier

Aussi le groupement Algorel confir-me-t-il son objectif d’une centaine de salles Au fil du bain d’ici à 2015 et va reconduire cette année sa stratégie de communication pour asseoir la visibilité de son enseigne auprès des particuliers. D’ailleurs, les politiques de communication des négoces s’affinent sur ce sujet. Faisant le constat qu’encore beaucoup d’installateurs ne proposent pas de projets complets de rénovation ou n’abordent pas le sujet de l’accessibilité spontanément, les négociants affutent leur stratégie de contacts directs avec le client final.

Ainsi, Accueil Négoce vient de mettre en place une structure dédiée à Internet. L’objectif est d’amener le particulier à exposer son projet, comprendre son besoin, l’aiguiller vers la bonne solution, l’amener à visiter les salles d’exposition, à consulter les catalogues en ligne, et le mettre en relation avec un installateur… Ou lui vendre les équipements s’il en formule le souhait. Les supports tels que les catalogues sont également repensés pour aider les installateurs à faire ce travail de prescription. Ainsi un catalogue spécifique aux 34 salles d’exposition Aqualys (groupe Descours & Cabaud) sera lancé en 2013. L’enseigne va d’ailleurs profiter d’une remise à plat de son concept pour le redimensionner aux attentes du marché. Chez Socoda, la branche sanitaire-chauffage (qui a enregistré huit nouveaux adhérents en 2012) va bénéficier pour la première fois en 2013 d’un catalogue thématique.

Persister sur l’accessibilité

Dans ces showrooms et ces catalogues, la problématique sur l’accessibilité ne cède pas de terrain. «On doit se positionner fortement sur l’accessibilité qui représente un potentiel de développement et un relais de croissance évident», souligne Matthieu Rolland, directeur général d’Algorel, qui va dédier en 2013 un catalogue pour les collectivités et les personnes à mobilité réduite. La plupart des salles présentent donc une offre «accessibilité» sous la forme d’un box ou «en infusant dans plusieurs box des équipements pratiques qui vont séduire les cibles visées, plutôt que de stigmatiser les risques ou la perte d’autonomie dans un seul box», note Blaise Lacroix, directeur de marché sanitaire-chauffage-plomberie-RGI de Descours & Cabaud.

Parallèlement, pour rassurer ce client, de nombreux points de vente s’appuient plus fortement sur les marques. En revanche, vis-à-vis des installateurs, les négociants continuent de soutenir leur offre MDD pour couvrir le segment économique. Ainsi Mabille a lancé, en avril 2012, sa marque propre Aquance. Algorel a remis à plat son offre MDD en sèche-serviettes fin 2012. Prolians a travaillé une gamme robinetterie complète pour sa MDD Opsia. Les acteurs sont donc résolument offensifs sur le sanitaire.

Information et formation toujours en ligne de mire

Sur le segment du génie climatique, en proie à un tassement global des ventes, la problématique des négociants est différente. Pourtant la stratégie des investissements a été maintenue et les thèmes travaillés depuis plus de deux ans demeurent : RT 2012, efficacité énergétique, EnR. Même si les solutions proposées sont de plus en plus familières, les négoces poursuivent leur travail de fond pour informer leurs clients sur ces sujets réglementaires, techniques et commerciaux.

Chez Socoda par exemple, le groupement réédite en 2013 son guide sur la RT 2012 et lance un «Tout savoir sur l’efficacité énergétique». Le groupement Algorel a publié un guide RT 2012 que les adhérents de l’enseigne Bleu Rouge présentent à leurs clients lors de soirées animées par un spécialiste. La formation des équipes demeure aussi un leitmotiv pour tous. Ainsi Prolians va-t-elle lancer un état des lieux sur les connaissances de son personnel pour adapter ses formations aux besoins réels. Accueil Négoce a organisé en janvier 2013 la rencontre de ses équipes avec ses fournisseurs durant deux jours car, «il est difficile d’être expert en tout pour nos équipes ; or, les catalogues sont de plus en plus épais et se renouvellent plus vite», note Jean-Pierre Campech, président du groupe.

Bref, l’énergie des distributeurs est toujours focalisée sur ces segments de la performance énergétique et des EnR. «Nous devons de toute façon prendre et garder notre place sur ces marchés car ce sont des relais de croissance et que nous sommes attaqués sur nos métiers traditionnels», souligne Matthieu Rolland. Il est vrai que la pression plus forte du négoce électrique auprès des plombiers a réactivé la concurrence entre les deux réseaux. Or, parallèlement, la baisse des prix fragilise la valorisation que ces technologies pourraient offrir. D’ailleurs, de plus en plus de négociants proposent des certificats d’économies d’énergie pour agir sur le coût final de leurs produits sans toucher à leur marge.

Alerte sur Internet

Mais une autre concurrence alerte les négociants sur la pérennité de leur modèle : celui des vendeurs à distance, notamment via Internet. Ceux-ci sont d’autant plus dangereux qu’ils se positionnent sur la robinetterie, la plomberie, les pièces détachées et accessoires qui contribuent largement aux marges. La résistance s’organise (sites e-commerce de VF Confort, Mabille, Accueil Négoce, par exemple). «C’est un business model différent qui exige des équipes et une logistique adaptées», souligne tout de même Jean-Pierre Campech (qui ambitionne 15 M€ de ventes d’ici à quatre ans sur la VAD). C’est à ce prix que le négoce traditionnel regagnera des parts de marché.

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