Avec 17 % de la consommation énergétique nationale, le tertiaire est l'un des secteurs les plus gourmands. Pour contrôler et réduire la facture, les bâtiments sont aujourd'hui bardés de capteurs. Une tendance encore accentuée par le dispositif Eco Energie Tertiaire et le décret Bacs, imposant au 1er janvier 2025 l'installation d'un système de gestion technique du bâtiment (GTB) lorsque leur surface est supérieure ou égale à 1 000 m2 . L'objectif est de réduire les consommations de 40 % en 2030, 50 % en 2040 et de 60 % en 2050. Mais alors que le nombre de capteurs est appelé à exploser, l'impact environnemental de ces objets connectés ne doit pas être négligé…
Autonomie totale grâce au solaire. Pour les rendre plus vertueux, certains fabricants travaillent sur leur optimisation énergétique, leurs matériaux, leur connectivité ainsi que leur fin de vie. Sur l'énergie par exemple, soit les batteries gagnent en autonomie comme c'est le cas chez eLichens et Ubigreen, soit les capteurs comme ceux conçus chez NodOn (Mondial du Bâtiment, hall 1, stand N004) s'en affranchissent car « ils utilisent le solaire et sont donc totalement autonomes », décrit son P-DG, Thomas Gauthier. Un sujet sur lequel travaille également Bruno Lafitte, ingénieur éclairage et TIC à l'Ademe (hall 1, stand J74) : « Les capteurs qui utilisent l'énergie de leur environnement - soleil, différence de température, pression - ne produisent que quelque millijoules, mais cela suffit à leur fonctionnement. Mais s'il y en a de plus en plus, ils sont loin d'être majoritaires. » Certains gains d'énergie sont également permis par l'utilisation de protocoles de communication basse consommation, comme LoRa, pour envoyer des données vers le cloud. Mais Marc Attia, cofondateur d'eLichens, déplore un manque de standardisation qui ferait fluctuer les consommations : « Nous n'avons pas réussi à accorder les industriels sur la connectivité. » Selon Didier Babout, directeur du cabinet de conseil Convertgence, spécialisé dans l'écoconception, en plus de travailler sur la sobriété des capteurs, il faut également en questionner leurs usages. « Avons-nous réellement besoin d'en installer 200 à chaque fois ? » interroge-t-il.
Recyclage à développer. Du côté des matériaux, 80 % des instruments d'Altyor intègrent du plastique recyclé. Pour guider les entreprises dans leur choix, l'éco-organisme Ecosystem propose un guide pratique pour intégrer cette matière première secondaire dans les équipements électriques et électroniques. Concernant la fin de vie cependant, la filière ne traite pas spécifiquement les capteurs de smart building, les déchets étant avant tout collectés par grande famille. Pour cette raison, NodOn a choisi de gérer elle-même la fin de vie de ses dispositifs en attendant une filière plus structurée qui récupérera davantage de matériaux, comme elle le fait déjà à petite échelle… Cela sera peut-être le cas avec l'application au 1er janvier 2023 de la filière de responsabilité élargie des producteurs (REP) de récupération des déchets du bâtiment et la création de nouveaux éco-organismes.
Malgré ces efforts, on peut légitimement se demander si le poids environnemental du numérique ne va pas atténuer les bénéfices en matière de réduction des consommations. Aucune étude n'évalue encore l'impact de ces bâtiments devenus « smarts », mais l'Ademe a commencé une analyse comparative de différents ouvrages (neuf, ancien non rénové et rénové) et prend en compte la flexibilité qu'ils apportent au réseau électrique.
