Les ferblantiers et installateurs du Bas-Rhin attendent le gouvernement de pied ferme. Le 10 juin, il doit abattre ses cartes quant à la répartition des surcoûts sanitaires sur les chantiers, dans le cadre du troisième projet de loi de finances rectificative qui sera présentée mercredi prochain en conseil des ministres. « Dans ce projet de loi, nous aurons l’occasion d’examiner les moyens de prendre en charge ces surcoûts pour qu’effectivement, ça ne pèse pas sur la rentabilité des chantiers de bâtiments et de travaux publics », a promis le ministre de l’Economie Bruno Le Maire ce mardi.
Le sujet devient chaud aux yeux des artisans et PME bas-rhinois d’installation en sanitaire, chauffage, génie climatique et couverture, réunis dans la Corporation des professionnels ferblantiers et installateurs (Copfi). « Il s’est propulsé au premier rang des préoccupations dans la dernière enquête menée auprès de nos adhérents et réalisée dans les trois premières semaines de mai. Jusqu’alors, le souci premier était de mettre la main sur les masques », relate Jean-Philippe Dolt, secrétaire général de la Copfi. Celle-ci réclame « au minimum » le partage de la facture à 50/50 entre le maître d’ouvrage et l’entreprise, en estimant qu’arriver au 100 % à la charge du donneur d’ordre, ou tendre vers 100 %, relèverait de la logique.
De la quarantaine de réponses à l’enquête se dégage une grande hétérogénéité de cas de figure, s’agissant de l’approvisionnement en fournitures, de mise en œuvre pratique du guide de l’OPPBTP. Il en va de même sur les surcoûts. Les conclusions ne confortent pas l’impression générale que la commande publique ne soulèverait pas de soucis quant à les négocier et que ceux-ci se concentreraient chez les particuliers. « La principale pierre d’achoppement, nous la rencontrons auprès des bailleurs sociaux », poursuit Jean-Philippe Dolt.
Sus à la « technocratie »
L’attente qui se prolonge sur les règles de prise en charge crée une fébrilité, qu’exprime avec sa verve et son franc-parler habituels le président de la Copfi Bas-Rhin, Christian Meyer. « Voilà des semaines qu’on attend, ça ne peut plus durer, il faut savoir maintenant ! Et sortir du diktat économique des donneurs d’ordre ! », tonne-t-il.
« Les artisans se retrouvent devant cette alternative qui n’en est pas vraiment une : soit perdre un client (pour l’avenir) en lui demandant d’assumer sa part des frais supplémentaires, soit prendre en charge intégralement le surcoût, mais en mettant alors la trésorerie de l’entreprise à mal », ajoute-t-il.
Dans son entreprise de 10 salariés qui subit une perte de chiffre d’affaires de 51 % depuis la mi-mars, Christian Meyer souligne que les dépenses en masques et autres EPI particuliers d’adaptation à l’épidémie « représentaient déjà 9 000 euros le 11 mai au matin ». « Il faut qu’on arrête la technocratie qui s’est manifestée une fois de plus ! », exhorte-t-il : « Pour obtenir une prise en charge à 50 % de ce coût, on nous a dit qu’il fallait s’équiper en protection comme dans un magasin, avec ruban de distanciation, vitres en plexiglas et j’en passe… alors que nous ne recevons pas du public ! Alors, une fois de plus, pour rentrer dans les cases, il faut louvoyer… en achetant ces matériels dont je n’ai pas besoin ».