CNR Logement : ce que les collectivités en attendent

A l’approche de la présentation des mesures issues du Conseil national de la refondation (CNR) dédié au logement, « Le Moniteur » donne la parole aux collectivités, qui militent pour un changement de politique vis-à-vis des bailleurs sociaux.

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Emmanuel Heyraud, délégué adjoint de l'association France Urbaine, deviendra délégué général le 1er juillet prochain.
Emmanuel Heyraud, délégué adjoint de l’association France Urbaine, deviendra délégué général le 1er juillet prochain.

Après les promoteurs immobiliers et les bailleurs sociaux, les architectes et enfin les entreprises de bâtiment, « Le Moniteur » sonde d’autres acteurs du logement : les collectivités.

Fragilisées par la suppression progressive depuis 2018 puis totale depuis cette année de la taxe d’habitation, celles-ci attendent du gouvernement qu’il actionne, le 5 juin prochain à l’occasion de la présentation des conclusions du Conseil national de la refondation (CNR) dédié au logement, l’éternel levier fiscal. Objectif : inciter les maires à construire, bridés par les habitants de plus en plus réfractaires à la densification et contraints financièrement.

« Réinstaurer la taxe d’habitation »

Emmanuel Heyraud, délégué adjoint de France urbaine qui en deviendra le délégué général à partir de juillet, imagine ainsi « une contribution résidentielle versée par les propriétaires et locataires en faveur de la transition écologique ». D’une certaine manière, il s’agirait de « réinstaurer la taxe d’habitation ». Cette « carotte fiscale » apparaît « impopulaire » de prime abord mais pourrait être acceptée par « les habitants (qui) savent que sans nouvelle taxe, ils auront moins de prestations et de services locaux », assure-t-il.

Et de rappeler : « Dans les grandes métropoles, la politique de logement ne peut pas reposer uniquement sur la taxe foncière payée par les propriétaires, qui représentent 30% de la population. »

France Urbaine milite par ailleurs pour un statuquo concernant l’encadrement du prix des fonciers, qui renchérit le prix payé par les clients particuliers des promoteurs. « Nous ne voulons pas généraliser cette mesure car il n’y a pas les mêmes prix et les mêmes besoins entre les différentes villes. Cela doit rester sur la base du volontariat », insiste-t-il.

L’association aux 108 membres (métropoles, grandes villes…) souhaite en outre une fluidification du parcours résidentiel. Dans son viseur : « les propriétaires qui ne veulent plus vendre dans ce marché sclérosé à cause de la remontée des taux d’intérêt et les personnes qui restent plus longtemps que prévu dans des logements d’urgence », faute de place dans le parc social. 2,4 millions de ménages sont en attente d’un logement social, soit une hausse annuelle de 7%, selon l’Union sociale pour l’habitat (USH). 

Supprimer la RLS

De son côté, Jean-François Debat, président délégué de Villes de France, plaide pour un soutien des organismes HLM, dont la capacité d’autofinancement s’amenuise. « Il faut relancer la production de logements, notamment sociaux, soutient-il. Car si la machine est grippée, ce n’est pas à cause de la conjoncture, de la guerre en Ukraine et la cherté des matériaux, mais à cause du gouvernement qui a décidé de faire les poches du secteur HLM. Il les prive d’environ 1Md par an depuis 2018. Et ce milliard, il manque dans les fonds propres des bailleurs sociaux. »

Le maire socialiste de Bourg-en-Bresse (Ain) est en faveur de la suppression de la réduction de loyer de solidarité (RLS), mesure dénoncée par l’Union sociale pour l’habitat (USH). « Il faut redonner cet argent aux organismes HLM dans le cadre de contrat d’objectifs : l’Etat rend tant d’euros de RLS aux bailleurs sociaux, et ces derniers s’engagent sur un nombre de mises en chantier et de réhabilitations. »

Quant à la remontée des taux d’intérêt des crédits immobiliers qui freine les sorties de foyers logés au sein du parc social, le porte-parole de 860 villes moyennes et 400 intercommunalités imagine « un dispositif de soutien à l’accession à la propriété des 20 ou 30% de ménages les plus modestes, dont le projet d’achat est bloqué par la hausse des taux, via des prêts aidés ». Et le prêt à taux zéro (PTZ) qui sera prolongé au moins jusque fin 2024, comme promis par le gouvernement ? « Il faut revoir les critères, l’élargir à davantage de bénéficiaires », plaide-t-il.

Muscler les autorités organisatrices de l’habitat

A long terme, les collectivités appellent à muscler les autorités organisatrices de l’habitat (AOH), créées par la loi 3DS de 2022 dans le but d’articuler la politique nationale du logement avec les spécificités de chaque territoire. « Il faut donner à ces coquilles vides plus de compétences en matière de régulation des meublés touristiques, de lutte contre l’habitat indigne... Nous pourrions également expérimenter, sur le temps d’un mandat, la distribution des aides de rénovation énergétique, en remplacement des relais locaux de l’Agence nationale de l’habitat (Anah), pour plus d’efficacité dans l’atterrissage des fonds et encore réduire le reste à charge des ménages modestes et très modestes », explique Emmanuel Heyraud.

Jean-François Debat va dans le même sens : « Avec MaPrimeRénov’, le gouvernement a privilégié le nombre de dossiers à l’efficacité de la rénovation thermique. Au lieu de financer un chantier de 6 000€ pour un gain énergétique de 15%, il faudrait davantage accompagner de 20 000€ pour un gain de 50%. Il faut y aller franco : massifier les aides, en ciblant les logements G et F (visés par une interdiction de mise en location, NDLR) pour une vraie baisse des consommations et une amélioration de la qualité du bâti. »

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