Interview

Bordeaux: "La variable d’ajustement doit être le prix du foncier"

Arnaud Roussel-Prouvost, président de la FPI Nouvelle-Aquitaine. A l’occasion du 14e salon du logement neuf, du 27 au 29 septembre à Bordeaux, les promoteurs vont pouvoir présenter 200 programmes et 4 000 produits. Pour la FPI, il s’agit encore d’une belle édition. Mais la baisse de production de logements inquiète la profession, qui estime vivre une époque charnière et attend des décisions de la part des élus.
 

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Arnaud Roussel-Prouvost, président de la FPI Nouvelle-Aquitaine.

Quels sont les sujets qui vous occupent actuellement ?

Bordeaux Métropole met en place un dispositif pour créer du logement à prix maîtrisé dans le secteur diffus. Nous discutons depuis plus d’un an avec les services de la métropole pour créer une offre significative de logements à 3 000 euros du mètre carré de surface utile (SU).

Comment cela se concrétise-t-il ?

Le conseil de métropole a entériné début juillet le principe d’un socle de 50 % de logements libres dans le secteur diffus et 50 % à répartir, en fonction d’une cartographie et des besoins déterminés par le PLU, entre le logement social et le logement à prix maîtrisé. Le but est de compléter une offre de logement social qui devrait osciller entre 30 % et 35 %. Nous serons donc entre 15 % et 20 % de production à prix maîtrisé.

« La variable d’ajustement ce doit être le prix du foncier et non celui du logement libre. »

Quel est l’objectif de cette nouvelle offre ?

L’objectif n°1 était de faire émerger une offre significative de ce type de logements pour éviter la gentrification, faire revenir les classes moyennes et avoir une offre qui correspond aux revenus des ménages. Il s’agit également de faire baisser, de manière mécanique, le prix du foncier dans la métropole. On ne pourra pas acheter le foncier aussi cher qu’on a pu l’acheter ces dernières années car on aura une production à un prix inférieur. La péréquation ne peut plus continuer compte tenu du niveau de prix atteint. La variable d’ajustement ce doit être le prix du foncier et non celui du logement libre.

Avez-vous le sentiment d’avoir trouvé la solution ?

C’est une solution intelligente que l’on espère efficace, car la règle est la même pour tout le monde et l’objectif est commun, partagé par les opérateurs et les élus. Personne n’a intérêt à ce que l’inflation des prix se poursuivre, en revanche, il est nécessaire que toutes les catégories de population puissent se loger dans la métropole. A la FPI, on porte le souci d’une métropole inclusive. Ne pas le faire impose aux gens de faire plusieurs heures le matin pour aller travailler. Si on ne les loge pas ici, on va être amené à les loger à 40 km de la métropole, c’est un vecteur d’étalement urbain. C’est d’un autre temps, on ne peut pas continuer ce mouvement des années quatre-vingt du développement des lotissements car nous n’avons pas les infrastructures qui permettent d’absorber un accroissement de la population en marge de la métropole. Les infrastructures doivent continuer à évoluer, mais pour couvrir les besoins actuels.

« Ce ne sont pas les opérateurs qui ont la réponse, mais les élus »

Cela relance le débat de la densité, qui en cette période électorale, a du mal à passer.

On doit reconstruire la ville sur la ville pour répondre à l’afflux de population. Et ce ne sont pas les opérateurs qui ont la réponse, mais les élus. Patrick Bobet, président de Bordeaux Métropole, a déclaré qu’il fallait 10 000 nouveaux logements toutes catégories confondues. A moins de 10 000, on continuera à creuser le déficit du logement et à consommer de l’espace naturel.

Où en est la production de logements privés ?

Au premier semestre 2019, nous avons enregistré 2274 ventes nettes, contre 2081 sur la même période en 2018 (+9,3 %). Avec l’objectif des 10 000 logements, nous devrions en construire entre 6 500 et 7 000 logements par an. On en est très loin… D’autant que les mises en vente ont baissé de 52 % entre le premier semestre 2018 et ce début d’année. Un phénomène qui risque de s’aggraver en 2020 et 2021.

« Lorsque l’on revient au niveau communal, on constate que depuis mars 2018, il y a une volonté de suspendre la production de logements »

Comment l’expliquez-vous ?

Moins de permis de construire ont été déposés. On parle d’un besoin de production au niveau de la métropole, mais lorsque l’on revient au niveau communal, on constate que depuis mars 2018, il y a une volonté de suspendre la production de logements. C’est une exaspération de la population qui est relayée par les maires.

La situation pourrait se détendre, une fois les élections municipales passées ?

Après 2014, il y a eu une nouvelle production de logements. Mais aujourd’hui, le logement et les mobilités sont tellement au cœur des campagnes municipales qu’on est à une époque charnière de décisions concernant la politique d’aménagement du territoire. C’est à l’ensemble de la communauté du logement (architectes, urbanistes, paysagistes, promoteurs…) de réfléchir à des formes de logements collectifs plus aimables qui se rapprochent de ce que les gens souhaitent — à savoir le pavillon avec jardin. Il faut de l’intimité, une pièce extérieure et de la nature. Tout en densifiant.

Vous êtes attenduss ?

Nous ferons des propositions, mais à la fin, ce sont les politiques qui décideront du contenu des règlements d’urbanisme qui vont conditionner la réponse à ces grandes questions. C’est aux politiques de nous dire ce qu’ils souhaitent ; et la réponse qu’ils apportent aux demandes de logements ne nous semble pas être la meilleure. Des nouvelles solutions ne pourront émerger que dans le cadre d’une certaine densité. Car quand on évoque des logements avec une pièce extérieure, un volet paysager important, etc. ce sont des coûts supplémentaires ; qui ne peuvent être absorbés qu’avec un modèle économique nouveau avec une densité et une hauteur plus importantes.

La hauteur, un sujet encore tabou à Bordeaux ?

On l’accepte dans les grands quartiers, mais pas dans le diffus, alors que les ventes s’y élèvent à 68 %. Le diffus doit être retravaillé pour faire accepter la hauteur au bénéfice des formes architecturales et de la qualité. On ne peut pas construire ou reconstruire sur la ville en produisant à R+1 le long du tramway ! Et c’est la densité qui permet de conserver de l’espace au sol.

A quel niveau de la discussion en êtes-vous avec les élus ?

La prise de conscience émerge, mais dans les faits, il y a encore des réticences.

Le 14e salon du logement neuf se déroulera du 27 au 29 septembre à Bordeaux

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