A vec le sans-fil comme fer de lance, l’enjeu, pour les industriels, est de renforcer l’autonomie de l’outillage électroportatif. « Le développement de cette catégorie de produits passe par l’augmentation de la capacité des batteries », confirme Patrick Berrivin, adjoint au directeur général de Makita. Avec les machines 18 volts (V), devenues tête de pont sur le marché du professionnel en atteignant des niveaux élevés de performance, tout en légèreté et en robustesse, l’ampérage a augmenté de « 3, 4, et même 5 ampères, en charges rapides », confie Patrick Berrivin. Résultat, après les moteurs brushless (sans charbon) « qui ont déjà accru de 30 % l’autonomie des machines », tous les industriels, en 2015, planchent sur l’autonomie et ont sorti leurs nouveautés.
Il est vrai quel que soit le type d’appareil mobile, il n’est rien de pire que de manquer de batteries. Alors que 85 % des outils désormais vendus exploitent les batteries Lithium Ion (Li-Ion), Makita vient de lancer un chargeur double port apportant, à temps égal de charge, une autonomie multipliée par deux. Pour compléter sa mobilité, le port USB qu’il intègre peut recevoir tablettes et smartphones. Chez Metabo, avec sa nouvelle batterie LiHD, savante association de cellules haute performance et de capacité à gérer un courant fort, on annonce une autonomie augmentée de 87 %, une durée de vie doublée et 67 % de puissance électrique en plus qu’une batterie classique Li-Ion. D’où la possibilité nouvelle de passer certains outils filaires en version sans fil, de la meuleuse d’angle aux rainureuses à aspiration intégrée, par exemple.
« Pour tout ce qui concerne les évolutions produits, nous devons répondre aux attentes de nos utilisateurs et à leurs besoins avec de nouvelles technologies et des innovations », abonde Grégory Toy, responsable du marketing de l’outillage professionnel chez Robert Bosch France. « Étant donné qu’en France le contexte macroéconomique génère des marchés difficiles, des solutions concrètes dynamisent le marché grâce à l’innovation ». Ainsi, la marque aux 5 000 brevets annuels, tous secteurs confondus, parie désormais sur l’induction : cette technologie repose sur un transfert d’énergie sans contact au système de charge sans fil, comme pour les smartphones. Conséquence, il n’est plus nécessaire de changer la batterie Li-Ion, laquelle se recharge par simple contact avec le chargeur. « Avec cette batterie 18 V, les professionnels n’ont plus besoin d’en acheter une seconde de secours. Ils peuvent recharger leurs outils dans le véhicule, pendant les déplacements par exemple ». Cerise sur le chantier, cette batterie à induction est compatible avec tous les outils et les chargeurs de catégorie 18 V du fabricant, une universalité à laquelle les marques premium de l’outillage électroportatif se sont attachées. Cela a aussi largement contribué au développement du sans-fil grâce à un triptyque gain de temps-mobilité-productivité.
Une offre nue et sur mesure à développer
Reste que l’outillage électroportatif ne peut vivre uniquement du sans-fil, parce que, comme pour tout marché, la maturité guette à un moment ou à un autre. « La technologie sans-fil représente 47 % du segment professionnel aujourd’hui et, de fait, le filaire recule. Les progressions pour l’industrie vont aussi opérer sur les produits complémentaires et vers tout ce qui va autour de la batterie », affirme Patrick Berrivin. À côté de l’incontournable 18 V « qu’il faut mettre en avant et parce que désormais 90 % des machines utilisent la même batterie sur le principe de l’universalité du chargement, il est important de développer des gammes de produits sans batterie et sans chargeur pour que les professionnels étoffent leur atelier ». Répondant du coup à un besoin de complémentarité, ses gammes dites nues s’inscrivent dans une logique prix plus abordable pour élargir le champs des possibles, et modifient le comportement d’achat.
Valoriser la sécurité
Conscient de la modularité, Dewalt vient de lancer une offre d’outils nus sur sa plate-forme 18 V. Dans une logique de système permettant une plus grande modularité du parc de machines, le fabricant propose d’acquérir d’abord les batteries en fonction de l’autonomie désirée (deux ou trois batteries en version 2 Ah Li-Ion ou 5 Ah Li-Ion), puis le chargeur. Ensuite, pour les métiers du bois, du métal ou de la couverture, les professionnels peuvent choisir parmi plus de 20 références : perceu-ses-visseuses, visseuses plaques de plâtre, meuleuses, scies sauteuses ou circulaires… Mais, outre la puissance et l’autonomie améliorées des machines, une autre préoccupation retient l’attention des industriels : la sécurité et le confort au travail.
« Pour les pros, les critères d’achat sont la performance, avec une réponse par l’augmentation du voltage, l’autonomie accrue par l’ampérage, qui sera, du coup, moins important à terme si la technologie de l’induction s’installe, et l’ergonomie sur l’outil qui doit être plus léger et offrir une meilleure prise en main », décrit Grégory Toy. Mais que l’outillage soit filaire ou non, « au niveau européen ou français, l’opérateur doit être de plus en plus protégé en améliorant ses conditions de travail. La sécurité active est régie par les normes qui sont un minimum à atteindre. » L’optimisation des conditions de travail est poussée par les CHSCT (1) de grands groupes, qui manifestent un intérêt très important sur la sécurité et la santé des utilisateurs, en appui avec les caisses régionales d’assurance maladie. « Ces entreprises sont en attente de sécurité accrue pour leurs opérateurs, à l’instar de notre perforateur sans fil avec batterie 36 V dont les vibrations ont été réduites, ou les meuleuses pour lesquelles nous avons développé des systèmes de frein », ajoute le dirigeant de Robert Bosch.
À l’heure où la pénibilité devient un enjeu de société, la préoccupation « rejaillit sur les plus petites entreprises demandant des outils moins nocifs, moins bruyants, qui dégagent moins de poussières et de vibrations, limitant ainsi les troubles musculo-squelettiques », énumère Patrick Berrivin. Les meuleuses s’équipent d’aspiration des poussières, la perforation d’aspiration directe au perçage, « et l’ajout de ces options comme l’antivibration, en plus de l’innovation, permet de maintenir un niveau de prix dans la durée »… et de valoriser le marché.
Il faut aussi convaincre les plus petites sociétés de s’équiper. Si le secteur du bois est sensibilisé - les ateliers notamment -, d’autres, tels les métiers du béton ou de la peinture, ont intérêt à opter pour ces options de protection des utilisateurs, d’autant que la logique de confort et de sécurité va de pair avec un accompagnement pour améliorer la productivité. À l’instar de box ou de coffrets, en fait des solutions de rangement à préparer en amont du chantier, faciles à transporter, « et qui deviennent même établis sur le chantier. L’encombrement est minime et le gain de temps important. Nous évoluons aussi vers des approches systèmes accompagnées de services dont la qualité fait la différence dans un contexte concurrentiel », reprend Grégroy Toy.
Le SAV se traduit par le remplacement lorsqu’un outil est en panne, les garanties estampillent les machines comme les batteries, « car aujourd’hui nous nous positionnons au-delà du fournisseur d’outils. Nous sommes aussi un apporteur de solutions ». Un dernier enjeu dans un secteur où l’innovation ne suffit plus pour se différencier à l’heure où les produits d’import commencent à se positionner.