Au village olympique, les bois tropicaux ne s’avouent pas vaincus

Les bois tropicaux veulent revenir dans la course aux marchés des installations des Jeux olympiques de 2024. Certes, le 17 juillet, le maître d’ouvrage Solideo a répété par courrier sa fin de non-recevoir à l’association technique internationale des bois tropicaux (ATIBT). Mais avec le soutien de cette dernière, les pays du bassin du Congo répondront par une visite diplomatique, cet automne en France.

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Bois tropical
Malgré ses positions fortes dans des prestations haut-de-gamme dont témoigne cet escalier, le bois tropical souffre d'une image politique et écologique désastreuse.

« Non, il n’est pas trop tard ». A l’argument du calendrier brandi le 17 juillet par la Solideo, maître d’ouvrage du village olympique, pour fermer la porte aux bois tropicaux, l’Association technique internationale des bois tropicaux (ATIBT) oppose le témoignage de plusieurs industriels associés aux marchés : « Ils éprouvent des difficultés techniques, surtout pour les huisseries, les fenêtres et l’isolation. Jusqu’à la fin de cette année, un amendement au cahier des prescriptions d’excellence environnementale (le CPEE annexé aux marchés de la Solideo, NDLR) pourrait les sortir de l’impasse », plaide le directeur général Benoît Jobbé-Duval.

Science contre science

Engagés dans la rédaction des fiches de déclaration environnementale et sanitaire qui, d’ici à la fin de l’automne, mettront leurs produits en conformité avec la règlementation environnementale 2020, les promoteurs des bois tropicaux ne comprennent pas mieux les arguments relatifs au bilan carbone : « Qu’on nous juge sur pièce », demande l’ATIBT.

Cette dernière se montre dubitative, tant sur « l’intense consultation » qui a précédé la rédaction du CPEE que sur le comité scientifique dont s’est entourée la Solideo dans cet exercice : « Ces consultations n’ont touché ni l’ATIBT, ni d’autres associations professionnelles concernées, et nous ne connaissons pas la liste des scientifiques qui ont accompagné le maître d’ouvrage », réagit le directeur général.

Carbone contre carbone

« Parlons carbone jusqu’au bout », insiste Benoît Jobbé-Duval. Au cœur de sa propre argumentation scientifique, il place la nécessité vitale, pour l’avenir de la planète, de promouvoir la gestion durable des forêts tropicales.

Les grands organismes de certification, en particulier PEFC et SFC, consolident le point de vue de l’association, dont les réflexions scientifiques reposent sur le partenariat avec les Français et les Belges du Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad) et de l’université de Gembloux.

ONG contre ONG

Revendiquée par la Solideo, la caution morale de l’organisation non gouvernementale WWF n’impressionne pas plus le directeur général : « WWF fait partie de nos membres et soutient constamment notre démarche, dans nos fréquents échanges. Je suis très surpris que la Solideo l’invoque ».

Après le congrès mondial pour la nature qui lui ouvrira une première tribune début septembre à Marseille, la contre-offensive du bois tropical prendra la forme d’un voyage diplomatique en France des autorités de Malaisie et du bassin du Congo (Cameroun, Gabon, Congo et République démocratique du Congo), soutiens constants des démarches de l’ATIBT aux côtés de trois organisations professionnelles françaises : le Commerce du Bois, l’Union des métiers du bois de la fédération française du bâtiment et l’Union des industries du panneau contreplaqué, cosignataires du courrier qui a lancé l’affaire en avril dernier.

Contre-offensive

« Nous voulons à tout prix éviter qu’un tel précédent ne fasse école », poursuit Benoît Jobbé-Duval, rappelant la symbolique mondiale du rendez-vous de 2024 et la rupture introduite par l’exclusion des bois tropicaux, dans l’histoire des chantiers olympiques. Les entraves à la gestion durable de la forêt tropicale risqueraient selon lui d’ouvrir les vannes de la déforestation au profit de monocultures comme celles de l’hévéa ou du palmier à huile.

A ce contre-modèle, il oppose l’exemplarité du Gabon, qui a rendu la certification de la gestion forestière obligatoire, renforçant la dynamique en cours dans l’ensemble du bassin du Congo, où 3,5 millions d’hectares en instance vont s’ajouter aux 11 millions déjà certifiés. « Des progrès certes trop lents, mais il faut les encourager », estime le directeur général de l’ATIBT.

La controverse révèle à ses yeux la difficulté à retourner une image, comme en témoigne cette anecdote : « Récemment, un très grand architecte m’a confié son attachement aux qualités techniques et esthétiques de nos produits, tout en ajoutant : "on ne peut pas communiquer dessus. C’est trop sensible" ». La bataille médiatique et politique continue.

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